Métro Montréal

UNE QUESTION DE RESPECT

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habitait avec les Atikamekw, dans sa jeunesse. Un aîné qui dépeçait un ours lui avait dit qu’il fallait toujours parler à sa viande, la remercier et exprimer de la gratitude envers l’animal. Ma mère, des dizaines d’années plus tard, continue de transmettr­e ses enseigneme­nts.

Tuer un animal n’est pas drôle. Même si on le chasse, on l’aime de tout notre coeur. C’est pourquoi j’éprouve un profond malaise quand je vois des chasseurs poser fièrement sur des animaux ensanglant­és, lorsque je parcours mon fil d’actualités Facebook. Nuhmshum, mon grand-père, frappait le tambour pour les orignaux et ne se vantait jamais de ses exploits de chasse, même s’il était le meilleur. L’humilité est la valeur première chez les Cris, et bien des chasseurs oublient de respecter ces animaux qui se sacrifient pour nous nourrir. J’éprouve aussi un malaise en voyant

Tuer un animal n’est pas drôle. Même si on le chasse, on l’aime de tout notre coeur. C’est pourquoi j’éprouve un profond malaise quand je vois des chasseurs poser fièrement sur des animaux ensanglant­és.

des gens se balader avec la tête de l’orignal sur leur pick-up. La tête de l’orignal, oostoogon dans ma langue, est une partie privilégié­e qu’on garde pour les festins. Le museau, les joues et la langue sont des parties délicieuse­s très prisées chez les Autochtone­s. Alors, quand je vois des gens les gaspiller, j’ai de la peine. J’ai aussi de la peine quand je vois les gens faire des concours de panaches, comme si ces animaux servaient à satisfaire les égos. De plus, les plus gros mâles sont les meilleurs géniteurs, donc on évite de les tuer. Leur viande est également beaucoup moins tendre.

Ma corvée de boucherie d’orignal aura duré deux jours. Ç’a été long et difficile. Les animaux savent nous donner des défis même après avoir traversé dans le monde des esprits. Treize jours de vieillisse­ment dans le coton à fromage et 470 lb de viande plus tard, je me prépare pour la corvée de viande de caribou qui arrivera sous peu. Chaque fois, je m’émerveille devant toute la reconnaiss­ance que ma famille ressent envers ces animaux. Comme j’aimerais que ce soit le cas pour tous les chasseurs du Québec…

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