La science du goût en 8 bouchées
LE GOÛT LES PAPILLES EN ÉVEIL
Sur le plan scientifique, le terme « goût » a une définition plus limitée que dans l’imaginaire collectif. C’est la signature chimique qu’on perçoit, grâce aux papilles gustatives et à leurs récepteurs spécialisés, quand on se bouche le nez !
Les goûts fondamentaux sont bien connus : le sucré, le salé, l’amer et l’acide, tous perceptibles, même si on souffre d’un vilain rhume. « Je trouve même qu’on les sent plus quand on est enrhumé; on dirait que c’est plus évident ! » dit la goûteuse professionnelle chez Cintech, Sophie Vincent.
Il y a aussi l’umami, découvert en 1908 par le chimiste japonais Kikunae Ikeda. Pour décrire cette saveur, on cite le goût d’un bouillon de boeuf, sans le côté salé, mais aussi le parmesan et l’oignon. « C’est un goût de profondeur, explique Christopher Laurent, un doctorant en anthropologie à l’Université de Montréal, qui consacre une partie de sa thèse au sujet. C’est un bon goût, réconfortant; d’ailleurs, signifie “goût délicieux” en japonais. Contrairement aux autres saveurs, ce n’est pas possible d’avoir trop d’umami. »
Il est provoqué par la présence de glutamate dans les aliments (d’ailleurs, le chimiste japonais en a breveté et commercialisé une version synthétique : le fameux glutamate monosodique, un exhausteur de goût). Au début des années 2000, des scientifiques ont découvert que le corps humain possède des récepteurs de goût spécifiques à l’umami qui, quelques années plus tard, a enfin décroché le titre de goût primaire.
Cela dit, le goût humain est peut-être plus complexe qu’on le croit. D’autres saveurs sont évoquées, notamment l’oleogustus, un nom chic pour parler d’une saveur de gras. En 2015, des chercheurs de l’université Purdue, aux États-Unis, ont démontré, grâce à deux expériences, que des participants au nez bouché détectent la saveur des acides gras de la même façon qu’ils perçoivent les autres goûts primaires. Étonnamment, ce goût, lorsque isolé, serait désagréable.
Des chercheurs de l’université de l’État d’Oregon ont jeté un nouveau pavé dans la mare, en 2016, en suggérant l’existence d’un goût lié aux féculents, une espèce de goût de riz ou de pâtes.
En existe-t-il d’autres ? Les chercheurs derrière l’oleogustus ont cerné le problème. « Malgré plus de deux millénaires de réflexion, il n’y a pas de consensus au sujet de ce qui constitue les caractéristiques d’un goût de base, et à savoir si le goût est limité à un petit échantillon de saveurs primaires », affirmaient-ils dans l’introduction de leur article paru dans Chemical Senses.