Parl er d’astronomie en langue des signes
Comment rendre le cosmos accessible aux personnes sourdes ou malentendantes?
En langue des signes québécoise ( LSQ), les mots « comète » , « astéroïde », « exoplanète » et « big bang » n’existent pas. Du moins, pas encore. Car une équipe de l’Université du Québec à Montréal (UQAM) construit présentement un lexique en astronomie pour les personnes sourdes ou malentendantes.
« Nous voulons créer des signes pour une cinquantaine de termes afin de rendre l’astronomie accessible à ces personnes », explique Pierre Chastenay, professeur de didactique des sciences à l’UQAM et animateur de l’émission Les électrons libres à Télé-Québec. Il fait équipe avec Anne-Marie Parisot, professeure de linguistique et experte de la LSQ, ainsi qu’avec trois « signeurs ». Ensemble, ils imaginent les meilleurs signes pour illustrer le vocabulaire astronomique. Ils les soumettront par la suite à des groupes de signeurs qui évalueront leur acceptabilité.
La tâche est plus ardue qu’il n’y paraît. Par exemple, pour traduire correctement le concept de « planète naine », il ne suffit pas d’utiliser la combinaison des signes « planète » et « naine ». « Dans un monde idéal, on inventerait un nouveau signe qui expliquerait l’essence même d’une planète naine », indique Pierre Chastenay, aussi membre de l’Union astronomique internationale qui chapeaute le projet. Mais encore faut-il s’entendre sur ce qu’est une planète naine, un terme qui ne fait toujours pas consensus chez les astronomes depuis la rétrogradation de Pluton. « Alors, s’interroge-t-il, comment créer un signe qui a du sens, sans le contaminer par ce débat ? Voilà tout un défi ! »
Heureusement, « la langue des signes recèle un fort potentiel visuel qui peut nous aider à décrire la réalité, mieux que ne le fait parfois le français qui est très linéaire, très arbitraire », affirme Anne-Marie Parisot. Prenons la Voie lactée. En français, l’expression désigne à la fois notre galaxie en entier et sa portion qui nous est parfois visible la nuit sous forme de bande blanchâtre. « Avec la LSQ, nous pouvons mettre au point deux signes différents : le premier qui mime la forme de la galaxie avec ses bras spiraux et le second, la bande dont la lumière diffuse provient des étoiles », dit-elle en joignant le geste à la parole. Pour évoquer la bande, elle lève la main droite, laisse ses doigts pianoter dans l’air (les étoiles) en balayant l’espace (la bande) vers la droite. « C’est une proposition parmi d’autres », prévient-elle.
La langue des signes peut même éviter certaines méprises. « Chez les personnes entendantes, plusieurs croient à tort que le mot “année-lumière” fait référence au temps, alors que c’est une unité de distance, donne en exemple Pierre Chastenay. Nous avons l’occasion de créer un signe qui évitera cette confusion. »
Comme quoi une image vaut vraiment mille mots.