BROUILLARD EN BOUTEILLE
Les scientifiques veulent comprendre comment ces nuages au sol se forment et disparaissent.
S’il y a un évènement météorologique difficile à prévoir, c’est bien le brouillard. Estimer la durée des épisodes est tout aussi complexe, car les scientifiques ne comprennent pas bien comment ces nuages au sol se forment et disparaissent.
Pour éclaircir ce mystère − sortir du brouillard, quoi ! −, des chercheurs américains et canadiens ont travaillé ensemble au large des côtes de TerreNeuve et de la Nouvelle-Écosse l’automne dernier.
La compréhension du phénomène est une question de sécurité : la navigation dans le brouillard est dangereuse, surtout pour les aéronefs et les bateaux. « Des problèmes d’instrumentation peuvent survenir et provoquer des accidents », souligne Harindra Joseph Fernando, chercheur à l’Université de Notre-Dame, en Indiana, et directeur de ce projet nommé C-FOG.
Le brouillard est composé de fines gouttelettes d’eau ou de glace en suspension, c’est bien connu. « Nous tentons d’améliorer nos connaissances en recueillant des données sur la taille, la vitesse, la turbulence et la thermodynamique de ces particules », explique le chercheur américain. Il travaille en collaboration avec des scientifiques notamment d’Environnement Canada et de l’Université Dalhousie, ainsi que les forces armées américaines et la National Science Foundation, qui financent en grande partie cette recherche.
Fait inusité, l’équipe a également embouteillé des échantillons de brouillard à l’aide d’un dispositif qui l’aspire et le condense. « Parfois, le brouillard se forme autour d’une particule de polluant, décrit M. Fernando. Ces bouteilles contiennent donc des particules polluantes susceptibles d’influencer la formation du phénomène. »
Au fait, pourquoi avoir choisi TerreNeuve comme lieu d’observation principal ? Parce qu’il s’agit de l’endroit le plus brumeux du monde ! « La zone est d’intérêt, car les courants du Labrador et le Gulf Stream s’y rencontrent, provoquant ainsi un gradient de température. Cela nous permet de vérifier l’incidence du changement de température sur la formation du brouillard », mentionne-t-il.
Ironiquement, l’équipe de recherche n’a connu que 7 jours de brouillard durant son séjour scientifique de 46 jours. « Nous avons collecté des données pertinentes malgré tout », assure le chercheur.
L’équipe espère, au terme de l’analyse des données, parvenir à de meilleures prévisions météorologiques. « Nous tentons d’élaborer un modèle robuste qui améliorera d’au moins 20 % à 30 % nos prévisions relatives au brouillard » , signale Harindra Joseph Fernando. La recherche sur le brouillard avait été délaissée dans les années 1940 faute d’outils suffisamment perfectionnés, selon M. Fernando. Armé de technologies de pointe, C-FOG réussira assurément à dissiper quelques mystères !