SYLVICULTURE TACTIQUE
On associe plus souvent la science des réseaux complexes à l’informatique qu’à la foresterie. Pourtant, les forêts sont des systèmes qui, loin d’être simples, sont régis par des processus écologiques aussi hasardeux qu’incertains. En effet, cette théorie ouvre la voie à de meilleurs aménagements forestiers, car elle est plus globale que les approches sylvicoles actuelles basées sur l’ordre et la prédictibilité, lesquelles tendent à perdre de leur efficacité avec les changements climatiques.
« Les forêts les mieux connectées entre elles sont celles où la biodiversité — un facteur de résilience et de productivité
— est la plus élevée. Nous nous rendons compte qu’un peuplement doté de plusieurs espèces aux traits multiples favorise la bonne santé des forêts environnantes par une plus grande connectivité ; il agit comme source centrale de graines pour les peuplements voisins qui subissent des perturbations, par exemple des maladies exotiques », illustre Élise Filotas, professeure au Département Science et Technologie de l’Université TÉLUQ.
Intervenir auprès de peuplements spécifiques aurait donc comme effet de bénéficier à l’ensemble d’un territoire. Afin de valider cette hypothèse, Élise Filotas et ses collaborateurs mènent des projets de modélisation numérique sur un site expérimental de 300 000 hectares de forêt tempérée et fragmentée qui se trouve dans les Bois-Francs.
« Nous y simulons différents scénarios de perturbations climatiques, aussi bien optimistes que pessimistes, puis nous en évaluons les conséquences, indique-t-elle. Nous espérons tirer de ces travaux des recommandations très ciblées d’aménagements sylvicoles du territoire, de manière à rendre celui-ci moins sensible aux effets des changements climatiques. » ●