QUAND LES PROMOTEURS PRENNENT LA CLÉ DES CHAMPS
En janvier 2020, la Communauté métropolitaine de Montréal (CMM) a sonné l’alarme : l’étalement urbain s’intensifie au pourtour du Grand Montréal, menaçant au passage des milieux naturels et des terres agricoles. Depuis 2015, la CMM évalue que 7 000 personnes quittent chaque année la métropole pour s’installer dans cette périphérie.
Selon Marie-Claude Prémont, professeure à l’École nationale d’administration publique (ENAP), tant le problème que la solution résident dans les politiques publiques. « Un promoteur qui dispose d’une terre agricole, qui espère la lotir, la développer et faire des gains financiers importants ne pourra y arriver sans que les investissements publics le permettent », soulève-t-elle. En effet, ces nouveaux quartiers ne peuvent fleurir sans le prolongement du réseau d’aqueduc, le pavage de rues, l’agrandissement d’usines de traitement des eaux usées, la construction de sorties d’autoroute, etc. Autant de travaux dont les contribuables finissent par payer la facture, alors que celle-ci pourrait être refilée aux promoteurs.
De fait, il existe des pouvoirs pour intégrer ces coûts au prix des maisons. Ainsi, les promoteurs, et non la collectivité, assumeraient les dépenses publiques générées par leurs projets. Inspirés du principe du « pollueur-payeur », ces mécanismes dissuaderaient les acquéreurs de s’installer toujours plus loin en les confrontant au prix réel de ce choix. Néanmoins, les municipalités n’utilisent presque pas ces pouvoirs, a constaté Marie- Claude Prémont dans un rapport rédigé avec sa collègue Fanny Tremblay-Racicot et remis en avril 2020 à Transition énergétique Québec. Or, sans exiger de telles redevances, « on crée l’illusion que ça coûte moins cher une nouvelle maison unifamiliale en banlieue qu’en ville », souligne-t-elle. « À l’exception des régions éloignées ou en difficultés financières, il ne devrait y avoir aucun nouveau développement qui soit autorisé sans que les coûts soient internalisés. » E.P.E