Roberta Timothy
LA COULEUR DE LA SANTÉ
Au début de l’entrevue, Roberta Timothy nous prévient qu’elle n’est pas au mieux de sa forme. Elle est en deuil d’un proche, emporté par la COVID-19. « Tous ceux que je connais [dans la communauté noire] ont perdu quelqu’un à cause de la COVID-19. Ce n’est pas le cas de mes collègues blancs », laisse tomber la professeure affiliée au nouvel Institut des pandémies de l’Université de Toronto. La pandémie touche en effet de façon disproportionnée les populations racisées. Dans la Ville reine par exemple, 22 % des malades de la COVID-19 étaient des personnes noires, alors que ces dernières représentent 9 % de la population, selon les dernières données disponibles. C’est pourquoi la professeure Timothy a lancé une vaste étude nationale et internationale. « Dans le contexte canadien, on va regarder comment la crise a affecté la santé de personnes noires, tant chez les travailleurs essentiels que chez les autres. On s’intéresse à la sécurité alimentaire, au logement, à l’emploi, à l’éducation et à la santé maternelle. On espère que ce sera le début d’une étude [à plus long terme] sur ces enjeux. » Le tout sera fait à l’aide de questionnaires dans les deux langues et de groupes de discussion. L’étude tentera aussi de recueillir des témoignages en Europe, en Afrique et en Amérique latine. « On veut savoir comment les personnes noires sont touchées, mais aussi comment elles résistent. Quelles interventions ont été mises en place ? » Un second volet permettra aux participants de discuter des résultats. Car pour Roberta Timothy, les études noires appartiennent aux communautés. « Je ne fais pas de dichotomie entre l’universitaire et le communautaire. »