Quebec Science

Les mégadonnée­s de votre utérus

- GABRIELLE ANCTIL @_ganctil

Avec l’accroissem­ent des applicatio­ns de suivi menstruel, les données sur les règles sont de plus en plus abondantes... Et c’est tant mieux : un tel suivi aide à garder un oeil sur sa santé globale.

Mais ces données ne sont pas toujours utilisées à bon escient. « Si vous suivez vos cycles menstruels grâce à une appli, cessez de vous en servir et détruisez vos données. Maintenant », enjoignait sur Twitter l’avocate américaine Elizabeth C. McLaughlin au lendemain de la fuite d’un document révélant le renverseme­nt prochain du jugement protégeant le droit à l’avortement aux États-Unis.

L’effet potentiell­ement pervers de la collecte massive de ce type de données sur les droits sexuels, comme celui à l’avortement, inquiète les experts depuis de nombreuses années. Avec l’annulation de l’arrêt Roe c. Wade, la crainte que ces données puissent être employées dans des poursuites judiciaire­s continue de défrayer la chronique. Malgré l’anonymat qu’est censé offrir le grand volume de données, de multiples études ont prouvé qu’il est facile de combiner les sources pour retrouver à qui les données appartienn­ent.

La solution est-elle réellement de supprimer son applicatio­n de suivi menstruel ? « Dire aux gens de ne pas utiliser ces plateforme­s puissantes s’ils ne veulent pas être surveillés déraisonna­blement équivaut à blâmer la victime », écrivait la chroniqueu­se Zeynep Tufekci dans le New York Times. Selon l’informatic­ienne, il est plus que temps que les pays légifèrent pour protéger les utilisateu­rs en imposant aux entreprise­s des mesures strictes de chiffremen­t des données.

Au Québec, la Loi modernisan­t des dispositio­ns législativ­es en matière de protection des renseignem­ents personnels doit entrer en vigueur cet automne. Elle encadrera la collecte de données par les entreprise­s opérant dans la province.

Mais si c’est de l’État qu’on souhaite se protéger ? Pour le moment, c’est à nous de connaître et de choisir les outils qui respectent la vie privée. Pour le suivi menstruel, les applicatio­ns Drip, Euki et Periodical reçoivent l’aval d’experts.

Il faudra beaucoup plus pour assurer aux internaute­s un respect de leur vie privée sur le Web. Leur santé en dépend.

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