Les questions de Rémi Quirion
SCIENTIFIQUE EN CHEF DU QUÉBEC *
Quel parcours ! Qui a été votre mentor pendant votre cheminement dans l’univers de la recherche ?
J’en ai eu plusieurs, mais, si je dois n’en nommer qu’un, ce sera Sylvain Moineau, qui a sans aucun doute été l’un des plus importants pendant mon cheminement. J’ai fait ma maîtrise et mon doctorat dans son laboratoire. Sylvain est officier de l’Ordre du Canada, en plus d’être l’un des chercheurs les plus influents au monde dans le domaine des phages. Malgré tous les honneurs qu’il a reçus, il reste simple, modeste, à l’écoute. C’est un leader modèle. Il m’a accordé la liberté et la confiance dont j’avais besoin pour m’accomplir en tant que jeune scientifique.
Dans quels autres secteurs industriels les phages pourraient-ils être mis à contribution ?
Dans tous les secteurs où il y a des bactéries. Ils recèlent en effet un potentiel économique et environnemental important pour les industries agroalimentaires, pharmaceutiques, biotechnologiques et des ressources naturelles.
De votre point de vue, quelles sont les différences entre l’univers universitaire et celui de la recherche dans le secteur privé ?
D’après mon expérience, il y a plus de place pour la recherche fondamentale dans le monde universitaire, alors que, dans le secteur privé, la recherche appliquée est priorisée. Une autre différence importante réside dans le fait que les occasions d’emploi sont beaucoup plus nombreuses dans le secteur privé. Cela dit, que ce soit dans les universités ou dans les industries, les scientifiques ont tous les mêmes objectifs, soit apprendre et créer de nouvelles connaissances.
Quel est l’impact économique de ces recherches pour le secteur de la santé ?
Il est énorme pour le secteur de la santé, quoique difficilement évaluable. Par exemple, l’industrie des biotechnologies, qui se chiffre à des milliards de dollars, n’aurait pas vu le jour sans l’étude des interactions phages-bactéries. La découverte des systèmes de restriction-modification dans les années 1950, la purification des enzymes de restriction près de deux décennies plus tard ainsi que la caractérisation des systèmes CRISPR-Cas dans les années 2000 ont été possibles grâce à l’étude de la réponse bactérienne à l’infection aux phages. Aujourd’hui, ces technologies sont indispensables en recherche et pour certaines applications en santé.
* Le scientifique en chef du Québec conseille le gouvernement en matière de science et de recherche, et dirige les Fonds de recherche.