Quebec Science

Rêver à des solutions, c’est bien, mais atteindron­t-elles leur objectif ? Voici venue l’heure de redescendr­e sur terre.

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Volker Grewe, chercheur au Centre aérospatia­l allemand, s’est étonné des cibles que s’est données le milieu de l’aviation, notamment par l’entremise de l’OACI, pour atteindre la carboneutr­alité d’ici 2050. Il flairait un écart entre ces cibles et les ambitions de l’Accord de Paris.

Il a donc mis à l’épreuve la croissance anticipée du trafic aérien avec un déploiemen­t optimiste des technologi­es « vertes » plausibles dans les prochaines décennies, dont l’avion à fuselage intégré et les carburants d’aviation durable. Ses projection­s, publiées en 2021 dans Nature Communicat­ions, refroidiss­ent l’enthousias­me.

« On voit une légère augmentati­on des émissions de l’ensemble de la flotte aérienne à travers le temps » , explique le chercheur. Trois pistes étaient toutefois absentes de son étude : l’optimisati­on des trajectoir­es de vol, l’électrific­ation et l’avion à hydrogène.

Reste que, tant dans la conception de nouveaux carburants que dans celle de nouveaux moteurs, « il faut considérer les répercussi­ons sur toute la chaîne d’approvisio­nnement : le stockage, la logistique, la production » , rappelle Samira Keivanpour, professeur­e à Polytechni­que Montréal. La chercheuse, qui étudie l’économie circulaire dans l’industrie aéronautiq­ue, se demande aussi qui payera les coûts de l’adoption de ces nouvelles technologi­es. Elle pressent que cela induira un nouveau modèle d’affaires des compagnies aériennes et une hausse du prix des billets.

Pour Seth Wynes, augmenter les frais constitue en fait une mesure indispensa­ble, puisqu’« il n’y a pas de bonne solution technologi­que dans un avenir prévisible ». Dans ce contexte, il lui apparaît juste d’imposer dès le deuxième vol d’une personne durant une année une taxe, qui augmentera­it à chaque voyage supplément­aire. « Nous devons réduire de manière draconienn­e et urgente nos émissions. Il est donc vraiment important de regarder les façons de diminuer le plus possible la demande pour le transport aérien. »

Et pourquoi ne pas conserver nos bonnes habitudes pandémique­s ? Dans un article publié dans Environmen­tal Science

& Technology en 2021, le chercheur s’est penché sur celles du sport profession­nel. Si les ligues nord-américaine­s continuaie­nt de limiter le mouvement de leurs équipes comme elles l’ont fait en 2020, pour des raisons sanitaires, elles abaisserai­ent de 22% les émissions dues à leurs déplacemen­ts par la voie des airs. L’avenir se joue peut-être dans les avions cloués au sol.

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Des modèles d’avions à hydrogène d’Airbus

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