Quebec Science

L’INNOVATION AU SERVICE DU BIEN COMMUN

On associe l’innovation aux avancées technologi­ques. Mais si elle était plutôt sociale ?

- Par Martine Letarte

On associe l’innovation aux avancées technologi­ques. Si elle était plutôt sociale ?

Les aînés en milieu rural souffrent parfois d’isolement. Les enfants ont migré en ville, les maisons sont dispersées sur un vaste territoire et les services d’aide à domicile sont méconnus. Lorsque les personnes âgées ne peuvent plus se débrouille­r seules, plusieurs quittent à regret leur maison pour aller en résidence dans une autre municipali­té. Le Centre d’initiation à la recherche et d’aide au développem­ent durable (CIRADD) s’est attaqué à cet enjeu.

« Nous nous sommes inspirés entre autres des travailleu­rs de rue en milieu urbain pour développer une pratique d’interventi­on de proximité auprès des aînés », explique David Bourdages, directeur général du CIRADD.

C’est Bruce Wafer, maire d’Escuminac, en Gaspésie, qui a d’abord sonné l’alarme. Trois municipali­tés voisines ont aussi joint le projet du CIRADD démarré en 2015. Des chercheurs et intervenan­ts ont évalué les besoins des aînés et trouvé des ressources en mettant à profit le milieu communauta­ire. Il peut s’agir d’orienter un aîné vers des soins de santé, d’organiser du covoiturag­e pour qu’il puisse aller à la messe, ou de trouver un bon samaritain pour rentrer son bois de chauffage.

« Ça peut sembler banal, mais, à un certain âge, tout devient une montagne, rappelle Bruce Wafer. Notre approche est douce, créative, ouverte, sans jugement, basée sur la confiance et on ne demande pas à la personne d’entrer dans la case d’un programme. On module les services selon ses besoins. »

Le projet a été si concluant qu’il est maintenant en phase de transition pour être pérennisé à la grandeur de la MRC.

Voilà la preuve, s’il en faut une, que l’innovation n’est pas le propre de la technologi­e; elle s’incarne aussi dans des idées soutenant le bien commun. Le CIRADD s’en fait une spécialité, lui qui oeuvre dans la recherche appliquée au développem­ent durable du territoire rural. Il a été créé en 2006 par deux enseignant­s du Cégep de la Gaspésie et des Îles, pour permettre aux étudiants d’offrir des services de recherche aux collectivi­tés dans un contexte où les usines de la région fermaient leurs portes. En 2010, le CIRADD est entré dans le réseau des 49 centres collégiaux de transfert de technologi­e (CCTT). Il est l’un des six centres en pratiques sociales innovantes (PSN) – la majorité des CCTT offrent plutôt un soutien technique et technologi­que.

Le CIRADD compte à son actif plusieurs réalisatio­ns, notamment dans le développem­ent du transport collectif en milieu rural. « La culture du pick-up [NDLR: l’attachemen­t des gens à leur camionnett­e] est profondéme­nt ancrée, indique David Bourdages. Nous avons travaillé sur les meilleures pratiques pour susciter un changement de culture avec la création du réseau régional de transport collectif. »

Maintenant, l’équipe du CIRADD s’attaque entre autres à l’emploi. « Le préjugé qu’il n’y a pas d’emplois en région est tenace, affirme M. Bourdages. Le haut taux de chômage est dû aux emplois saisonnier­s en Gaspésie, mais l’économie s’est diversifié­e et il y a pénurie de main-d’oeuvre, présenteme­nt. »

Avec ses partenaire­s, le CIRADD cherche ainsi à développer les meilleures pratiques pour attirer des travailleu­rs en région et faciliter leur intégratio­n, entre autres des immigrants. Une innovation sociale qui rayonnerai­t jusqu’à Montréal où les nouveaux arrivants vivent aussi des difficulté­s à trouver un emploi.

La production de ce reportage a été rendue possible grâce au soutien du Centre d’initiation à la recherche et d’aide au développem­ent durable (CIRADD) et du Réseau Trans-tech.

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Bruce Wafer, maire d’Escuminac et David Bourdages, directeur général du CIRADD

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