L’INNOVATION AU SERVICE DU BIEN COMMUN
On associe l’innovation aux avancées technologiques. Mais si elle était plutôt sociale ?
On associe l’innovation aux avancées technologiques. Si elle était plutôt sociale ?
Les aînés en milieu rural souffrent parfois d’isolement. Les enfants ont migré en ville, les maisons sont dispersées sur un vaste territoire et les services d’aide à domicile sont méconnus. Lorsque les personnes âgées ne peuvent plus se débrouiller seules, plusieurs quittent à regret leur maison pour aller en résidence dans une autre municipalité. Le Centre d’initiation à la recherche et d’aide au développement durable (CIRADD) s’est attaqué à cet enjeu.
« Nous nous sommes inspirés entre autres des travailleurs de rue en milieu urbain pour développer une pratique d’intervention de proximité auprès des aînés », explique David Bourdages, directeur général du CIRADD.
C’est Bruce Wafer, maire d’Escuminac, en Gaspésie, qui a d’abord sonné l’alarme. Trois municipalités voisines ont aussi joint le projet du CIRADD démarré en 2015. Des chercheurs et intervenants ont évalué les besoins des aînés et trouvé des ressources en mettant à profit le milieu communautaire. Il peut s’agir d’orienter un aîné vers des soins de santé, d’organiser du covoiturage pour qu’il puisse aller à la messe, ou de trouver un bon samaritain pour rentrer son bois de chauffage.
« Ça peut sembler banal, mais, à un certain âge, tout devient une montagne, rappelle Bruce Wafer. Notre approche est douce, créative, ouverte, sans jugement, basée sur la confiance et on ne demande pas à la personne d’entrer dans la case d’un programme. On module les services selon ses besoins. »
Le projet a été si concluant qu’il est maintenant en phase de transition pour être pérennisé à la grandeur de la MRC.
Voilà la preuve, s’il en faut une, que l’innovation n’est pas le propre de la technologie; elle s’incarne aussi dans des idées soutenant le bien commun. Le CIRADD s’en fait une spécialité, lui qui oeuvre dans la recherche appliquée au développement durable du territoire rural. Il a été créé en 2006 par deux enseignants du Cégep de la Gaspésie et des Îles, pour permettre aux étudiants d’offrir des services de recherche aux collectivités dans un contexte où les usines de la région fermaient leurs portes. En 2010, le CIRADD est entré dans le réseau des 49 centres collégiaux de transfert de technologie (CCTT). Il est l’un des six centres en pratiques sociales innovantes (PSN) – la majorité des CCTT offrent plutôt un soutien technique et technologique.
Le CIRADD compte à son actif plusieurs réalisations, notamment dans le développement du transport collectif en milieu rural. « La culture du pick-up [NDLR: l’attachement des gens à leur camionnette] est profondément ancrée, indique David Bourdages. Nous avons travaillé sur les meilleures pratiques pour susciter un changement de culture avec la création du réseau régional de transport collectif. »
Maintenant, l’équipe du CIRADD s’attaque entre autres à l’emploi. « Le préjugé qu’il n’y a pas d’emplois en région est tenace, affirme M. Bourdages. Le haut taux de chômage est dû aux emplois saisonniers en Gaspésie, mais l’économie s’est diversifiée et il y a pénurie de main-d’oeuvre, présentement. »
Avec ses partenaires, le CIRADD cherche ainsi à développer les meilleures pratiques pour attirer des travailleurs en région et faciliter leur intégration, entre autres des immigrants. Une innovation sociale qui rayonnerait jusqu’à Montréal où les nouveaux arrivants vivent aussi des difficultés à trouver un emploi.
La production de ce reportage a été rendue possible grâce au soutien du Centre d’initiation à la recherche et d’aide au développement durable (CIRADD) et du Réseau Trans-tech.