Radio-Canada Info

Ces sirènes d’alerte qui ne font plus vraiment peur en Ukraine

- Frédéric Arnould

KIEV, Ukraine – Presque chaque jour, selon l’endroit où on se trouve, on les en‐ tend résonner dans de nombreuses villes en Ukraine. Pourtant, après plusieurs mois de guerre, les sirènes annonciatr­ices de possibles frappes aé‐ riennes sont souvent igno‐ rées par la population.

Le contraste avec le début de la guerre est flagrant. Dans les premières semaines, les ci‐ toyens se réfugiaien­t en grand nombre dans les abris antibombes qui, bien sou‐ vent, étaient des stationne‐ ments, des sous-sols ou en‐ core des stations de métro.

Aujourd’hui, à moins de se trouver dans la région du Donbass assiégée par les forces russes, il règne au sein de la population ukrainienn­e un sentiment de sécurité, même si, ça et là, des bombar‐ dements ont lieu, souvent hors des grands centres ur‐ bains.

Afin de pallier le manque d'efficacité des haut-parleurs qui diffusent les fameuses si‐ rènes – qui, il faut bien le dire, ont l’air de dater de l’époque soviétique et ne sont pas très audibles dans certaines villes –, plusieurs applicatio­ns et sites Internet ont pour mis‐ sion d'alerter les citoyens.

Par exemple, l’applicatio­n Air Alert a été conçue en un jour par Ajax Systems et St Falcon, des entreprise­s lo‐ cales, en collaborat­ion avec le ministère ukrainien de la Transforma­tion numérique. Elle donne des informatio­ns sur le début et la fin des ur‐ gences aériennes, chimiques ou d'autres types associées au système de protection ci‐ vile, en fournissan­t les alarmes les plus fortes pos‐ sible (le même son de sirène), et ce, même lorsque le télé‐ phone est en mode silencieux ou en veille.

Valentine Hrytsenko, res‐ ponsable du marketing chez Ajax Systems, explique que son entreprise a créé l’inter‐ face numérique pour l’activa‐ tion de ces alertes dans les villes et les régions. Le succès est au rendez-vous : pas moins de 7 millions et demi de télécharge­ments de l'appli‐ cation pour une population de 44 millions de personnes.

Les alertes sont aussi re‐ layées sur les réseaux sociaux par d’autres bons samaritain­s qui ont mis sur pied des mes‐ sageries d’urgence. C’est le cas de Bernard Moerdler, un jeune Américain basé en Israël qui a créé Ukraine Siren Alerts sur Twitter. Son système re‐ cense et relaie en temps réel les alertes sur tout le territoire ukrainien. Chaque alerte peut être visualisée sur une carte avec des renseignem­ents sur le lieu, la date et l'heure.

Sa source d'inspiratio­n? Sa petite amie restée en Ukraine. J'ai créé ces alertes sirènes pour elle et pour les étrangers afin qu’ils puissent suivre ce qui se passe avec leurs fa‐ milles restées au pays.

Bernard Moerdler s’in‐ quiète aussi du relâchemen­t des citoyens quant aux alertes.

C’est un peu l’inverse de l’histoire du garçon qui criait tout le temps au loup. Il y a un risque qu’une véritable alerte ne soit pas prise au sé‐ rieux et cause des ravages.

Bernard Moerdler, créa‐ teur d'un système d'alerte sur Twitter

Dans les prochains jours, il lancera une applicatio­n et un site web qui permettra de lo‐ caliser les 24 000 abris anti‐ bombes répartis sur le terri‐ toire. Histoire d’inciter les Ukrainiens à prendre ces alarmes au sérieux, il va d’ailleurs ajouter une fonc‐ tionnalité importante : Un fil d'actualité qui indique pour‐ quoi l'alerte s'est déclenchée, explique-t-il.

Valentine Hrytsenko, res‐ ponsable du marketing chez Ajax Systems, croit plutôt que les gens ont envie de retrou‐ ver une vie normale, d’autant plus que bon nombre de ces attaques échouent.

À moins d’un dénouement rapide de la guerre (plus qu’improbable si l’on se fie à la situation qui perdure), les si‐ rènes vont continuer de re‐ tentir en Ukraine, que les ci‐ toyens les respectent ou pas.

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