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Six personnes allèguent avoir été agressées sexuelleme­nt par un ancien agent de la GRC

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Quatre hommes et deux femmes allèguent qu’un ancien agent de la Gendar‐ merie royale du Canada (GRC), Don Cooke, les a agressés sexuelleme­nt lorsqu’ils étaient adoles‐ cents, en Colombie-Britan‐ nique et à Terre-Neuve. Don Cooke, aujourd’hui âgé de 64 ans, nie ces allé‐ gations. Il a fait l’objet d’une enquête criminelle concernant certaines d’entre elles, mais n’a fait face à aucune accusation. Trois poursuites civiles sont toujours en cours contre Don Cooke et la

GRC.

Avertissem­ent : Des détails et témoignage­s contenus dans ce texte peuvent être éprouvants pour certains lec‐ teurs.

Les allégation­s s’éche‐ lonnent sur plusieurs années. Sur une période d'environ 15 ans, plusieurs victimes allé‐ guées se sont manifestée­s au‐ près de CBC/Radio-Canada pour s’exprimer à ce sujet.

Graeme Willson a été le premier à raconter son his‐ toire en 2007. Même si cer‐ taines de ses pensées étaient alors confuses, son souvenir central semblait net : il a affir‐ mé avoir été agressé sexuelle‐ ment à plusieurs reprises par un agent de la GRC en service alors qu'il était adolescent à Abbotsford, en Colombie-Bri‐ tannique, en 1982.

J'ai été agressé, victimisé et harcelé à plusieurs reprises par l’agent Don Cooke, avait-il alors déclaré.

Il décrivait l’agent de la GRC comme un policier qui utilise son autorité pour ma‐ nipuler [...] et détruire les gens.

Graeme Willson avait souli‐ gné que sa famille et lui avaient signalé les agressions alléguées à la GRC en 1982, mais qu'ils avaient eu l'im‐ pression de ne pas avoir été crus. Depuis lors, sa vie était un véritable gâchis, avait-il dé‐ noncé.

Lors de son entrevue avec CBC, Graeme Willson a aussi rapporté que le service de po‐ lice d'Abbotsford lui avait confié qu'il enquêtait sur des allégation­s similaires faites contre Don Cooke par plu‐ sieurs autres hommes.

Quand j'ai entendu [qu'il pouvait y en avoir d'autres], ça m'a fait pleurer, avait révélé Graeme Willson.

Selon lui, ce service de po‐ lice lui a indiqué que les autres victimes présumées étaient des adolescent­s qui faisaient partie d'une équipe de hockey mineur locale dont Don Cooke était l'entraîneur, à peu près à la même époque que lors de ses propres alléga‐ tions.

Les allégation­s de Graeme Willson n’ont jamais été prou‐ vées.

Ni la police d’Abbotsford ni la GRC n'ont répondu aux de‐ mandes de commentair­es de CBC/Radio-Canada au sujet de ces allégation­s.

Don Cooke a poursuivi la GRC

Don Cooke, à présent à la retraite, a fait l'objet d'une en‐ quête criminelle sur les alléga‐ tions d'agression sexuelle des membres de l’équipe de ho‐ ckey qu’il entraînait. En 2009, le procureur de la Couronne de la Colombie-Britanniqu­e a toutefois décidé de ne pas porter d’accusation­s. Les rai‐ sons qui ont motivé sa déci‐ sion n'ont pas été rendues publiques.

La police d'Abbotsford n'a pas, non plus, rendu publics les détails de son enquête.

Don Cooke a décliné la de‐ mande d'entrevue de CBC/Ra‐ dio-Canada.

Dans un courriel, son avo‐ cat avance qu'une enquête approfondi­e des allégation­s a été menée par la police et que le procureur de la Couronne a confirmé par écrit qu'aucune accusation ne serait portée et que la police et le procureur de la Couronne fermaient leur dossier.

En 2010, Don Cooke a in‐ tenté une poursuite contre la GRC au sujet de l'enquête sur les plaintes déposées contre lui. Il y attestait que les alléga‐ tions n'étaient pas fondées et que l'enquête elle-même avait révélé son homosexual­ité au sein de la GRC, qu'il a qualifiée d' homophobe. Par consé‐ quent, il ne pouvait plus tra‐ vailler en tant qu’agent de la GRC, avait-il déclaré. Don Co‐ oke avait affirmé qu’il avait souffert de dépression et de crises de panique, à la suite de cet épisode.

Dans sa déclaratio­n, il a également maintenu que l'un des joueurs de hockey était amer et en colère parce qu’il l'avait suspendu de l'équipe.

Quant à Graeme Willson, il était peu fiable, selon Don Co‐ oke, parce qu’il avait déjà échoué à un test au détecteur de mensonges.

La poursuite a été réglée de façon privée.

Par ailleurs, la police d'Ab‐ botsford a déclaré qu'elle n'avait aucune trace de la plainte déposée par la famille de Graeme Willson en 1982.

En 2005, Graeme Willson a même intenté une poursuite contre Don Cooke, mais l'a abandonnée lorsque ce der‐ nier n'a pas été inculpé. Aigri par le fait que ses allégation­s ne semblaient pas être crues, Graeme Willson s'est éloigné de ses amis et de sa famille et a rompu le contact avec son avocat.

Il a été retrouvé mort en 2017 dans un campement de sans-abri de la Colombie-Bri‐ tannique. Il a été déterminé qu'il avait fait une surdose au fentanyl.

Trois poursuites civiles contre Don Cooke et la GRC toujours en cours

En 2012, l'un des anciens joueurs de hockey, Bob Cal‐ lan, a intenté une poursuite au civil contre Don Cooke et la GRC.

Bob Callan, aujourd’hui âgé de 53 ans, allègue que des agressions sexuelles se sont produites à l’aréna d’Abbots‐ ford, dans les douches de l'équipe, dans le véhicule pri‐ vé de Don Cooke et dans le sous-sol de la maison qu’il partageait avec un autre membre de la GRC.

C'est un prédateur, il pro‐ fite des gens, il utilise son pouvoir en tant que roi de la montagne, selon Bob Callan.

Il raconte qu’il ne s'est ja‐ mais plaint à l'époque parce que Don Cooke l'a menacé. On m'a dit qu'en raison de sa position, de ses connais‐ sances des méthodes de la police, je serais tué, je dispa‐ raîtrais, a-t-il expliqué.

Peu après le dépôt de la poursuite de Bob Callan, un autre homme d'Abbotsford, Tom Thiessen, a déposé sa propre plainte au civil contre Don Cooke et la GRC.

Maintenant âgé de 55 ans, Tom Thiessen allègue qu'à l'âge de 14 ans, il a été mainte‐ nu au sol et essentiell­ement violé.

C'est très écoeurant, a-t-il lancé.

Tom Thiessen raconte qu’il a rencontré l’agent Don Cooke lors d'un contrôle routier, alors qu'il se promenait avec son nouveau vélo.

J'en étais si fier, et il m'a dit la même chose, qu'il venait d'avoir un nouveau vélo et que peut-être, un jour, nous pourrions faire une prome‐ nade, a-t-il affirmé.

De multiples balades dans la voiture de patrouille de la GRC de Don Cooke et des vi‐ sites au domicile de ce dernier ont suivi, selon Tom Thiessen. Ensuite, les visites ont débou‐ ché sur des combats de lutte impromptus, puis sur des at‐ touchement­s occasionne­ls et enfin, sur une agression sexuelle, d’après lui.

J'étais juste effrayé par tout ce qui se passait , a-t-il déclaré.

Tom Thiessen allègue que Don Cooke l'a agressé à plu‐ sieurs reprises alors qu'il était en service, notamment dans le champ d'un fermier près de la maison familiale, toujours dans sa voiture de police.

En 2019, dans la foulée des poursuites intentées par Bob Callan et Tom Thiessen, un autre ancien joueur de ho‐ ckey, coéquipier de Bob Cal‐ lan, s'est joint à eux.

Travis Piers a déposé une poursuite distincte contre Don Cooke et la GRC, allé‐ guant que de 1982 à 1985, il a été agressé sexuelleme­nt à de nombreuses occasions par Donald Cooke.

La GRC est en pourpar‐ lers avec les parties civiles

Cette année, deux femmes de Terre-Neuve allèguent que Don Cooke a entretenu des relations sexuelles mal‐ veillantes avec chacune d'entre elles lorsqu'elles étaient adolescent­es, à partir de 1986. Ce dernier y avait été transféré après son séjour en Colombie-Britanniqu­e.

CBC/Radio-Canada a ac‐ cepté de ne pas identifier les deux femmes, car elles crai‐ gnaient d'être stigmatisé­es dans la petite communauté où elles ont vécu.

L'une d'entre elles a affir‐ mé avoir été terrifiée par Don Cooke, qui l’aurait, selon elle, enfermée dans une cellule de détention de la GRC.

Les deux femmes ont ap‐ pris l'existence des poursuites civiles en cours contre Don Cooke et la GRC en ColombieBr­itannique par hasard, lors d'une recherche sur le Web, et ont communiqué avec les hommes qui les ont inten‐ tées. Elles ont, depuis, fourni des déclaratio­ns destinées à appuyer les allégation­s des hommes.

Toutes deux ont affirmé qu'elles avaient gardé le si‐ lence pendant des décennies parce qu'elles avaient honte de ce qui s'était passé et parce qu'elles pensaient être les seules.

La GRC et les trois hommes responsabl­es des poursuites ont entamé des pourparler­s qui pourraient mener à un règlement. S'ils parviennen­t à un accord, les détails seront probableme­nt gardés privés en vertu d'une entente de non-divulgatio­n, une pratique courante dans de tels cas.

Tom Thiessen se dit enragé de la façon dont tout s'est dé‐ roulé.

Ça me met très en colère que personne n'ait écouté, qu'il soit toujours [libre]. [...] Tout le monde doit payer et le système ne l'a pas arrêté quand il aurait dû le faire, dé‐ plore-t-il.

Bob Callan est également en colère, mais il est aussi dé‐ terminé à poursuivre le pro‐ cessus civil. Il admet cepen‐ dant avoir de la difficulté, par‐ fois, à se détacher de ces sou‐ venirs.

On pense tellement à la fa‐ çon dont on aurait dû s'en sortir, ou à ce qu'on aurait pu faire différemme­nt. Pourquoi on s'est retrouvé dans cette position, vous savez, pour être si vulnérable, témoigne-til.

Il s'exprime maintenant pour que d'autres puissent connaître cette histoire et, es‐ père-t-il, en tirer des leçons.

D'après un reportage de Paul Hunter

Pour obtenir de l'aide : Colombie-Britanniqu­e -

VictimLink­BC : 1-800-5630808 (service disponible en français) Québec - Info-aide violence sexuelle : 1-888933‑9007 Terre-Neuve-et-La‐ brador - NL Sexual Assault Crisis and Prevention Centre : 1-800-726-2743

credi dernier l’annulation de milliers de vols cet été. L’annu‐ lation du vol vers Whitehorse toutefois n'en faisait pas par‐

tie.

D’après les informatio­ns

de Catherine Dib

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