Les banques alimentaires de l’Est-duQuébec en ont plein les bras
Avec l’inflation et la hausse des prix des aliments, les banques alimentaires de l’Est-du-Québec se re‐ trouvent actuellement avec un achalandage sans précédent. Plusieurs nou‐ velles familles sont venues cogner à leurs portes dans les derniers mois, peinant à joindre les deux bouts en raison de cette augmenta‐ tion du coût de la vie.
Le Comptoir alimen‐ taire L'Escale de Baie-Comeau comptabilise 118 nouvelles demandes pour recevoir des denrées alimentaires.
Fondé en 1994, cet orga‐ nisme, qui est né de la volon‐ té d'un groupe de femmes de préparer des repas bénévole‐ ment, n'a jamais connu une hausse de clientèle aussi im‐ portante que celle des der‐ niers mois.
La demande a vraiment augmenté. Le mois de juin, cette année, a été le plus gros mois de juin depuis plusieurs années.
Josée Gagnon, présidente du Comptoir alimentaire L’Es‐ cale de Baie-Comeau
On a été surpris de cet achalandage. C’est des gens qu’on n’avait jamais vus et qui ont des emplois, mais qui ar‐ rivent un peu serrés. Avec la hausse du prix de l’essence, du coût de l’alimentation et du coût de la vie, ils n’ont pas le choix, à la place d’acheter leur épicerie à crédit, ils viennent nous voir, explique Josée Gagnon.
Cette augmentation des demandes de dépannage ali‐ mentaire s'élève à 29 % , un nombre considérable, selon elle. La seule fois qu’on a vu de si grandes hausses, c’était au tout début de la pandémie en 2020, mentionne Mme Ga‐ gnon.
Situation semblable au Bas-Saint-Laurent et en Gaspésie
Dans La Mitis, la banque alimentaire Moisson Mitis, qui a vu le jour en 1990, signale une hausse de 100 à 150 fa‐ milles qui utilisent mainte‐ nant leurs services chaque mois.
Depuis deux ans, on a une hausse de 100 % de la clien‐ tèle des 65 ans et plus. Ce qu’on voit aussi c’est une hausse de la clientèle des tra‐ vailleurs au salaire minimum, indique le directeur de l'orga‐ nisme, Gilles Dufour.
La situation est sensible‐ ment la même au Collec‐ tion Aliment-Terre de Paspé‐ biac, en Gaspésie.
Depuis le mois d'octobre, l'organisme en sécurité ali‐ mentaire, qui a été fondé en 2004, a noté une augmen‐ tation de 10 % à 20 % de la clientèle.
Avant, on avait des de‐ mandes pour des gens en at‐ tente de chômage; c’est en‐ core le cas, mais il y aussi des gens qui font des demandes en recevant déjà leur presta‐ tion d’assurance-emploi. Et on a de plus en plus de gens qui travaillent temps plein, mais qui n’arrivent pas dans le mo‐ ment avec toutes les augmen‐ tations de prix partout, ob‐ serve le coordonnateur du Collectif Aliment-Terre, Syl‐ vain Badran.
L'organisme réalise près de 45 dépannages alimentaires par mois à travers 10 munici‐ palités de la Baie-des-Cha‐ leurs.
Aider coûte de plus en plus cher
Les banques alimentaires aussi font face à cette aug‐ mentation des prix des ali‐ ments.
Des boîtes de céréales à 10 $, on ne peut plus se per‐ mettre ça.
Josée Gagnon, présidente du Comptoir alimentaire L’Es‐ cale de Baie-Comeau
Notre défi chaque se‐ maine est de trouver le meilleur prix pour les denrées les plus saines possibles pour nos bénéficiaires. La portion que l’on doit acheter nous coûte cher, donc on jongle avec les budgets, mais on s’or‐ ganise toujours pour que per‐ sonne ne manque de nourri‐ ture au quotidien, soutientelle.
Sylvain Badran, du Collec‐ tif Aliment-Terre, abonde dans le même sens.
Puisqu’il y a des baisses d’aliments récupérés et une hausse de la demande, c’est sûr qu’on fait face aux hausses de coût nous aussi. Ça nous coûte cher, mais on réussit à se sortir la tête de l’eau en ce moment. Par contre, à moyen et long terme, c’est une tendance qui va être là pour durer, parce qu’on ne prévoit pas que ça s’estompe. On va devoir se mettre en mode solution, poursuit-il.
Bénévoles recherchés
Étant donné que la faim ne prend jamais de vacances, les bénévoles travaillent constamment à garnir les pa‐ niers et les tablettes des comptoirs alimentaires.
Ça nous coûte excessive‐ ment cher en fatigue et en épuisement actuellement. On n’est pas différent des autres, on fait face à la pénurie de main-d'oeuvre.
Gilles Dufour, directeur de Moisson Mitis
Selon lui, avec les res‐ sources en place, l'organisme bas-laurentien manquera de bras cet automne. La rentrée scolaire demeure la période où les demandes culminent.
Cet automne, ça va cra‐ quer. À l’entrée des classes, il y a toujours une hausse de clientèle, mais j’ai l’impression que cette année ça va être pire en raison de l’inflation, estime M. Dufour.
Il lance donc un cri du coeur aux résidents de La Mi‐ tis pour qu'ils puissent prêter main-forte à l'organisme.
On va tout faire pour qu'il n'y ait aucun impact pour les gens qui utilisent nos services. La clientèle n’a pas à s’inquié‐ ter, mais en même temps on n’est pas des ''supermen'' et des ''superwomen'', avoue-til.
S'affilier pour mieux ré‐ pondre à la demande
À titre de solution, le Comptoir alimentaire L'Escale et Moisson Mitis se sont tous deux affiliés au Réseau des banques alimentaires du Qué‐ bec.
Cette alliance leur permet d'assurer un approvisionne‐ ment suffisant, tout en ré‐ pondant à la demande crois‐ sante des usagers.
Depuis quelques années, le comptoir a bien changé. On a pris une avenue vers la récu‐ pération en supermarché, qui a été très avantageuse pour notre organisme. En s'affiliant aux banques alimentaires du Québec, ça a facilité notre intégration. Le Provigo, le Maxi et le IGA participent donc activement toutes les semaines pour nous redon‐ ner des denrées périssables et non périssables, raconte Mme Gagnon.
Son organisme amasse en moyenne 80 000 kilos de den‐
rées chaque année. Ces ali‐ ments auraient pris le chemin des sites d'enfouissement s'ils n'avaient pas été récupérés.
Moisson Mitis s'est, pour sa part, affilié au Réseau des banques alimentaires du Qué‐ bec en 2015.
On est devenu la 19e Mois‐ son au Québec pour bonifier notre garde-manger en raison d'une hausse de clientèle.
Gilles Dufour, directeur de Moisson Mitis
Desservant 16 municipali‐ tés dans La Mitis, les béné‐ voles de l'organisme récoltent tous les jours des denrées chez IGA et au Super C MontJoli, en plus d’aller chercher des aliments chez des produc‐ teurs maraîchers de la région.
Une fois par mois, ils re‐ çoivent également des dons de la part du Réseau des banques alimentaires du Qué‐ bec.