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La police japonaise reconnaît des failles dans la sécurité de Shinzo Abe

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Au lendemain de l'assassi‐ nat en pleine foule de l'an‐ cien premier ministre japo‐ nais Shinzo Abe, un haut responsabl­e de la police a reconnu que des failles de sécurité ont permis à un tel événement de survenir.

Nous ne pouvons nier qu'il y a eu des problèmes avec la sécurité étant donné la façon dont les choses se sont termi‐ nées, a déclaré Tomoaki Oni‐ zuka, chef de la police de Na‐ ra, lors d'une conférence de presse.

En plus de 27 ans de car‐ rière, je n'ai pas de plus grand remords, pas de plus grand regret que celui-ci, a-t-il ajou‐ té, la voix tremblante d'émo‐ tion, au sujet de la mort de

Shinzo Abe, abattu alors qu'il prononçait un discours dans un rassemblem­ent politique.

Des responsabl­es locaux du Parti libéral-démocrate (PLD, droite nationalis­te) ont précisé n'avoir reçu aucune menace avant l'attaque, dont les images ont tourné en boucle sur les chaînes de télé‐ vision.

On y voit l'ex-chef du gou‐ vernement debout sur un po‐ dium, quand une forte déto‐ nation retentit, suivie d'un dé‐ gagement de fumée. Les spec‐ tateurs, surpris, se baissent, et on aperçoit plusieurs per‐ sonnes en plaquer une autre à terre.

Les mesures de sécurité sont parfois peu strictes dans les rassemblem­ents électo‐ raux locaux au Japon, où les crimes violents sont rares et où les lois sur les armes à feu sont très sévères. Certains es‐ timent toutefois que les me‐ sures, même permissive­s, étaient insuffisan­tes à Nara, compte tenu du profil de M. Abe.

La police a indiqué qu'elle allait analyser ce qui, précisé‐ ment, a fait défaut vendredi et mettre en oeuvre les chan‐ gements nécessaire­s.

L'auteur présumé de l'at‐ taque, arrêté sur les lieux, a avoué avoir délibéréme­nt visé M. Abe, expliquant à la police en vouloir à une organisati­on à laquelle il croyait que celui-ci était affilié. Certains médias japonais ont évoqué un groupe religieux.

Cet homme âgé de 41 ans, Tetsuya Yagami, serait un an‐ cien membre de la marine ja‐ ponaise, selon les médias lo‐ caux. Il a utilisé une arme d'apparence artisanale, sur la‐ quelle des analyses complé‐ mentaires étaient en cours.

Plus récemment, il a tra‐ vaillé dans une usine de l'ouest du Japon pendant en‐ viron un an et demi, mais a démissionn­é en mai dernier,

toujours selon des médias lo‐ caux. Son attitude au travail n'avait pas posé de problème. Je suis surpris et choqué, a dé‐ claré son ancien supérieur au quotidien Mainichi.

Selon la police, M. Yamaga‐ mi a parlé aux enquêteurs de manière détachée après l'at‐ taque.

D'anciens camarades de collège interrogés par la chaîne de télévision publique NHK l'ont décrit comme calme, mais pas solitaire, doué pour le sport comme pour les études.

Bricolage accessible en ligne

Il y a eu quelques cas au Ja‐ pon, ces dernières années, où des personnes ont fabriqué elles-mêmes des armes de fa‐ çon illicite, mais les crimes commis avec des armes à feu y restent très rares. En 2021, le pays a compté dix fusillades, dont huit impliquant des groupes criminels, selon les données de la police.

La fabricatio­n d'armes à feu avec une imprimante 3D et la fabricatio­n de bombes peuvent aujourd'hui être ap‐ prises sur Internet n'importe où dans le monde, explique Mitsuru Fukuda, un profes‐ seur de l'Université Nihon spécialisé dans la gestion de crise et le terrorisme, à Tokyo. Cela peut être fait en deux ou trois jours après avoir obtenu des pièces telles que des tuyaux, complète M. Fukuda, qui a analysé les images de l'arme utilisée lors de l'assassi‐ nat de Shinzo Abe.

Les images vidéo montrent que l'assaillant a ti‐ ré avec un dispositif muni d'une poignée de pistolet et de ce qui semblait être deux tuyaux recouverts de ruban électrique noir.

Toute personne ayant une compréhens­ion de base du fonctionne­ment des armes à feu aurait pu le fabriquer avec un minimum de connais‐ sances, soutient Tetsuya Tsu‐ da, spécialist­e de la question des armes à feu, ajoutant qu'il n'a peut-être même pas fallu une demi-journée pour fabri‐ quer l'arme utilisée dans l'at‐ taque.

Les médias japonais ont indiqué, samedi, que le sus‐ pect avait déclaré aux enquê‐ teurs qu'il avait cherché en ligne des instructio­ns pour fa‐ briquer des armes à feu et qu'il avait également com‐ mandé des pièces et de la poudre à canon sur Internet.

Ce tragique événement n'a pas empêché la campagne sé‐ natoriale de se poursuivre. L'actuel premier ministre Ki‐ shida, membre comme Shin‐ zo Abe du PLD, a participé sa‐ medi matin à un rassemble‐ ment de campagne à Yama‐ nashi (ouest de Tokyo) de‐ vant 600 personnes, décla‐ rant, selon le quotidien Maini‐ chi, que la violence ne saurait l'emporter sur la parole.

On ne va pas laisser se re‐ produire ce qui s'est passé hier, a lancé un membre de la sécurité cité par le quotidien, qui décrivait un dispositif de protection renforcé, avec ins‐ tallation de détecteurs de mé‐ taux et fouille des sacs des spectateur­s.

Le corps de Shinzo Abe est arrivé samedi en début d'après-midi à son domicile de Tokyo, à bord d'un cor‐ billard dans lequel avait pris place sa femme.

Au Canada, des registres de condoléanc­es seront dis‐ ponibles dans les consulats généraux du Japon à Mont‐ réal et à Ottawa, les 11 et 12 juillet.

L'assassinat d'un des hommes politiques les plus connus de l'archipel, qu'il a gouverné pendant plus de huit ans, a profondéme­nt meurtri et ému au Japon comme à l'étranger. De nom‐ breux dirigeants n'ont pas tar‐ dé à exprimer leur sidération et leur peine quant à ce décès soudain.

Selon des médias japonais, une veillée funèbre est prévue lundi soir et les funéraille­s au‐ ront lieu mardi, en présence uniquement de la famille et de proches de M. Abe.

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