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Les urgences de l’Hôtel-Dieu à Lévis de nouveau sous pression

- Vincent Pichard

C’est en train de devenir le tube de l’été: une chanson qui se fait entendre sans cesse, sauf que celle-ci ne fait pas recette. Les ur‐ gences de l’Hôtel-Dieu à Lé‐ vis fonctionne­nt à flux ten‐ du, et cela se vérifie encore ce week-end.

Souvent, on est à 50, 60 patients sur une possibilit­é de 37 civières. On est à 150, 160, 180 % d’occupation. C’est rendu la norme, dépeint le Dr Jean Lapointe, urgento‐ logue et directeur adjoint des services profession­nels au CISSS de Chaudière-Appa‐ laches.

Comment expliquer une telle affluence? Le Dr Lapointe met en avant le vieillisse­ment de la population.

Beaucoup de maladies chroniques, moins de prises en charge parce qu’il y a moins de médecins de pre‐ mière ligne, beaucoup de RPA aussi ont fermé dans les der‐ nières années.

L'équivalent de la rou‐ geole

Par ailleurs, la 7e vague de COVID-19 déferle sur la pro‐ vince et la région n’y échappe pas.

La recrudesce­nce de la CO‐ VID, on est dedans. On la sent.

Dr Jean Lapointe, urgento‐ logue et directeur adjoint des services profession­nels au CISSS de Chaudière-Appa‐ laches

Les variants BA.4 et BA.5 font des ravages. Ce sont des variants très contagieux. En termes de contagiosi­té, ils sont l’équivalent de la rou‐ geole, note l’urgentolog­ue.

Mais leur dangerosit­é semble moindre. On n’a pas de malades qui nécessiten­t d’être traités aux soins inten‐ sifs, observe-t-il.

Le problème à l’Hôtel-Dieu ne se limite pas au nombre de patients qui s’accroît. Il se ré‐ sume plutôt en une équation à deux composante­s : plus de monde à soigner et moins d’employés disponible­s.

On est en été. Notre per‐ sonnel prend des vacances qui lui sont d’autant plus in‐ dispensabl­es que les deux dernières années, avec la pan‐ démie, ont été très difficiles, souligne le Dr Jean Lapointe.

Si certains profession­nels de la santé prennent des congés bien mérités, d’autres tombent malades à leur tour. Résultat : les équipes sont in‐ complètes.

Samedi, il manquait quatre infirmière­s aux urgences de Lévis. Il en manquera quatre pour la nuit de samedi à di‐ manche, et trois pour la jour‐ née de dimanche, énumère Patricia Pouliot, la coprési‐ dente par intérim du syndicat des profession­nels en soins de Chaudière-Appalaches.

Le moral en berne

Celle-ci l’assure, le moral des troupes est au plus bas.

C’est inconcevab­le com‐ ment les gens sont épuisés. Ils pensent à quitter le navire.

Patricia Pouliot, la coprési‐ dente par intérim du syndicat des profession­nels en soins de Chaudière-Appalaches

Ça fait plus de deux ans que les gens sont au combat et ils n’ont pas l’impression de voir la lumière au bout du tunnel, déplore-t-elle.

La responsabl­e syndicale avoue avoir récemment dis‐ cuté avec trois infirmière­s qui se préparent à démissionn­er parce qu’elles n’en peuvent plus, et peut-être partironte­lles avant la fin de l’été.

C’est trois départs de trop, trois départs qu’on n’a pas les moyens de se permettre.

Pour s’en sortir, Patricia Pouliot propose une solution radicale.

On a besoin de fermer des services. Il faut voir ce qui peut attendre et concentrer les services dans les endroits névralgiqu­es. Les soins quand les équipes ne sont pas com‐ plètes, c’est pas sécuritair­e.

Elle ne comprend pas que le gouverneme­nt n’agisse pas ainsi. Quand est-ce que notre cri va être entendu? Il n’est pas minuit moins une, c’est maintenant qu’il faut agir, clame-t-elle.

Aux urgences pour une vasectomie

En attendant de meilleurs jours, elle et le Dr Jean La‐ pointe en appellent à la res‐ ponsabilit­é de chacun.

Avant de venir aux ur‐ gences, essayez le 8-1-1, pre‐ nez rendez-vous si vous le pouvez avec votre médecin de famille, consultez votre pharmacien. Ne venez aux ur‐ gences que pour de bonnes raisons, recommande l’urgen‐ tologue.

C’est d’autant plus impor‐ tant que, comme le rappelle la syndicalis­te, on est au début des vacances, on n’est pas dans le pire; les vacances de la constructi­on n’ont pas débu‐ té et on n’est pas encore au mois d’août.

Tous deux regrettent le manque de bon sens de cer‐ tains parfois.

L’autre jour, on a vu quel‐ qu’un qui était venu pour une vasectomie. On ne fait pas ça aux urgences, indique le Dr Jean-Lapointe.

D'après les informatio­ns de Louis-Simon Lapointe

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