Radio-Canada Info

Le Dr Boileau « n’a pas joué son rôle » dans le dossier du nickel, déplore le PLQ

- Alexandre Duval

Le directeur national de santé publique « n’envoie pas un message rassurant à la population » concer‐ nant la norme sur le ni‐ ckel, selon le Parti libéral du Québec (PLQ). Dans une lettre dont Radio-Canada a obtenu copie, le Dr Luc Boi‐ leau ne semble pas disposé à formuler de nouvelles re‐ commandati­ons au gouver‐ nement Legault dans ce dossier.

Il attend encore et je ne sais pas pourquoi, déplore le porte-parole du PLQ en ma‐ tière de santé, Monsef Derraji. C’est du temps qu’on perd, ajoute le député, inquiet de la nouvelle norme sur le nickel dans l’air qui est en vigueur depuis le 28 avril et qui est cinq fois plus permissive que l’ancienne.

M. Derraji et sa collègue porte-parole en environne‐ ment, Isabelle Melançon, avaient écrit au Dr Boileau en juin pour lui faire part de leurs inquiétude­s à la lumière de nouvelles informatio­ns qui nous sont révélées, jour après jour, sur l’importance de la qualité de l’air.

Ils réclamaien­t surtout que le Dr Boileau fasse de nou‐ velles recommanda­tions au gouverneme­nt dans le but de mieux protéger la santé des Québécois.

Or, dans sa réponse offi‐ cielle datée du 12 juillet, le Dr Boileau esquive cette de‐ mande précise. Le directeur national de santé publique énumère plutôt une série d'actions entreprise­s, sans ja‐ mais indiquer s’il compte faire de nouvelles recommanda‐ tions.

C’est une réponse incom‐ plète, se désole M. Derraji.

Dans le dossier du nickel, la réponse que j'ai reçue, le di‐ recteur national de santé pu‐ blique n'a pas joué son rôle.

Monsef Derraji, porte-pa‐ role du Parti libéral du Qué‐ bec en matière de santé

Des craintes partagées M. Derraji rappelle que les 18 directeurs régionaux de santé publique au Québec avaient recommandé au gou‐ vernement de ne pas assou‐ plir sa norme sur le nickel, al‐

lant ainsi à contresens de la Direction régionale de santé publique.

L’Associatio­n québécoise des médecins pour l’environ‐ nement (AQME) s’y est aussi opposée, indiquant qu’une er‐ reur scientifiq­ue fondamen‐ tale s’était glissée dans l’éva‐ luation des risques de la nou‐ velle norme sur le nickel pour la santé humaine.

Les craintes sont surtout vives dans le quartier Limoi‐ lou, près du port de Québec, où l’entreprise minière Glen‐ core s’adonne à des activités de transborde­ment de nickel.

Une étude divulguée en avril dernier montrait d’ailleurs que les résidents du secteur étaient exposés à des concentrat­ions de nickel dans l’air quatre fois plus élevées que celles observées dans le quartier Saint-Sacrement, quelques kilomètres plus loin.

Bien qu’il ne s’engage pas à formuler de nouvelles recom‐ mandations, le Dr Boileau tente de se faire rassurant dans sa lettre du 12 juillet.

Il va de soi que la [Direc‐ tion générale de la santé pu‐ blique] étudiera, comme il se doit, les nouveaux éléments du dossier qui nous sont ap‐ portés, et ce, avec l’aide de son réseau d’experts.

Extrait de la lettre du Dr Luc Boileau envoyée aux dé‐ putés Monsef Derraji et Isa‐ belle Melançon le 12 juillet 2022

S’il dit aussi prendre bonne note des commentair­es des directeurs régionaux qui s’op‐ posent à la nouvelle norme, il estime que plusieurs gestes sont déjà posés pour limiter les émissions de nickel et l’ex‐ position des population­s.

En ce moment, la Direction générale de la santé publique (DGSP) propose notamment la mise en place de bonnes pratiques, la surveillan­ce des émissions et de la qualité de l’air ambiant, le partage des données et le suivi des me‐ sures préventive­s, détaille le Dr Boileau.

Qu’il écoute la science! Cette réponse laisse M. Derraji perplexe. Qu'il écoute la science, qu'il écoute l'ensemble de ses directeurs [régionaux] de santé pu‐ blique!

Comme d’autres l’ont fait avant lui, M. Derraji remet en question l’indépendan­ce du directeur national de santé publique, qui porte aussi le chapeau de sous-ministre ad‐ joint au ministère de la Santé et de Services sociaux (MSSS).

Est-ce qu'il y a quelqu'un au gouverneme­nt Legault qui l'empêche d'agir? C'est là le fond du problème : il est à la fois sous-ministre et il est di‐ recteur de la santé publique.

Monsef Derraji, porte-pa‐ role du PArti libéral du Qué‐ bec en matière de santé

Je m'attends de lui [qu'il joue] son rôle, de formuler des recommanda­tions le plus tôt possible, parce que c'est pour cela qu'il est payé et c'est ça son rôle. Je ne lui de‐ mande pas de protéger le gouverneme­nt, ce n'est pas son rôle, tonne le député libé‐ ral.

Interpellé par Radio-Cana‐ da, le MSSS n'a pas indiqué si oui ou non le Dr Boileau compte formuler de nouvelles recommanda­tions sur le ni‐ ckel.

Le rôle de la santé pu‐ blique demeure la sur‐ veillance de l'état de santé et la réduction des impacts à la santé, indique la porte-parole Marie-Claude Lacasse dans un courriel.

Les mécanismes, comme celui des comités sur la sur‐ veillance des contaminan­ts, permettent de suivre la santé de la population et d’évaluer s’il y a des impacts, ajoute-telle.

 ?? ??

Newspapers in French

Newspapers from Canada