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La dissolutio­n du C. A. du réseau de santé Vitalité laisse ses membres incrédules

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Les anciens membres du conseil d'administra­tion du réseau de santé Vitalité s’interrogen­t sur la perti‐ nence du remaniemen­t or‐ chestré vendredi par le premier ministre du Nou‐ veau-Brunswick, sur fond de crise dans les urgences.

Blaine Higgs a changé son ministre de la Santé, rempla‐ çant Dorothy Shephard par Bruce Fitch.

Il a du même souffle rem‐ placé le pdg du réseau de san‐ té Horizon, et révoqués les conseils d’administra­tion (C. A.) des deux réseaux de santé de la province.

Les conseils d'administra‐ tion des réseaux Vitalité et Horizon sont remplacés par deux personnes nommées par le gouverneme­nt : Gérald Richard et Suzanne Johnston, respective­ment. Ces dissolu‐ tions ne sont pas destinées à être permanente­s, a affirmé Blaine Higgs.

Ces changement­s abrupts sont incompréhe­nsibles pour Janice Goguen, Norma Mc‐ graw et Terry Richardson, qui étaient membres du conseil d’administra­tion de Vitalité.

C'est désolant, principale‐ ment pour deux raisons, a dit Mme Goguen dans une entre‐ vue, samedi. D'abord, c'est un manque d'égards pour le pro‐ cessus démocratiq­ue. Il y a la moitié du conseil qui sont des membres élus, c'est le choix du peuple.

Elle fait ensuite valoir la ri‐ chesse dont le gouverneme­nt provincial se prive.

Je suis venu à apprécier les talents, les expertises et les perspectiv­es qu'il y avait au‐ tour de la table, par mes col‐ lègues, dit Janice Goguen. En mettant le conseil en veilleuse, on coupe l'accès à un bassin de talents.

Placer la régie sous la tu‐ telle et sous la gouverne des fiduciaire­s, c'est une approche pansement. C'est vraiment mettre le doigt dans la plaie pour essayer d'empêcher le saignement. Mais c'est vrai‐ ment beaucoup plus com‐ plexe.

Janice Goguen, membre du C. A. de Vitalité

Selon elle, le système de santé néo-brunswicko­is souffre de sous-financemen­t chronique qui remonte à des années, qui remonte [à] plus loin que le gouverneme­nt ac‐ tuel, puis on a le résultat qu'on a.

Il faut réinstaure­r l'opti‐ miste au sein des profession­s, car les travailleu­rs sont démo‐ ralisés et épuisés, dit-elle, en particulie­r les infirmière­s et in‐ firmiers. Elle ajoute que les in‐ frastructu­res technologi­ques sont désuetes. D’après Mme Goguen, ça a un impact aussi sur le recrutemen­t des profession­nels qui veulent travailler avec une technolo‐ gie de pointe.

Selon Norma McGraw, élue au conseil d'administra‐ tion en 2021, le gouverne‐ ment Higgs est réactif et s'ef‐ force de rectifier le tir en pleine crise.

Elle estime qu'il faut don‐ ner plus de pouvoirs au conseil d'administra­tion, pas le réduire au silence. Si on ne nous permet pas de nommer notre président du conseil d'administra­tion et d'embau‐ cher notre pdg, à ce moment ici, il n'y a pas grande-chose qui va changer, a-t-elle men‐ tionné lors d’un entretien, sa‐ medi.

Ça va rester le statu quo, le pouvoir est centralisé à Frede‐ ricton, la pdg travaille au gré du ministre.

Norma McGraw, membre du C. A. de Vitalité

On peut virer le problème de tous les côtés, de tous les bords, poursuit-elle, si le conseil n'obtient pas les pleins pouvoirs et responsabi‐ lités, à ce moment ici ça ne changera pas grand-chose.

En guise d’exemple, Norma McGraw affirme qu'on n'a ja‐ mais présenté au conseil, mal‐ gré de multiples demandes, un récent examen d'Ernst & Young sur la perfor‐ mance organisati­onnelle et les services cliniques. Si on ne peut connaître les manques et faiblesses identifiés dans le réseau, il devient difficile de s'améliorer, dit-elle.

Terry Richardson est chef de la Première Nation de Pa‐ bineau. Il a été invité par le gouverneme­nt provincial à re‐ joindre le conseil d'adminis‐ tration de Vitalité.

Il croit que la province blâme les mauvaises per‐ sonnes et ne prend pas ses responsabi­lités dans la crise persistant­e du recrutemen­t et de la rétention des profes‐ sionnels de la santé, crise dont le gouverneme­nt est bien au fait, ajoute-t-il.

On a toujours dit, depuis qu'on est là, qu'il y avait un problème avec les ressources. On manque de ressources hu‐ maines dans le système de santé. C'est jamais allé nulle part. C'était toujours : oui, oui, bien faites ce que vous être capables de faire avec les res‐ sources que vous avez. On ne peut pas continuer comme ça, a déclaré M. Richardson lors d’une entrevue, samedi.

Le problème est encore là. Le système est encore brisé. Il faut réparer le système.

Terry Richardson, membre du C. A. de Vitalité

On a un premier qui dit, ah bien c'est la faute de tout le reste du monde. Prends la responsabi­lité, martèle Terry Richardson. La faute, ça reste avec le gouverneme­nt provin‐ cial, point final.

Perte d’influence des francophon­es?

Même si le conseil d’admi‐ nistration du réseau de santé anglophone Horizon a connu le même sort que celui de Vi‐ talité, Norma McGraw craint que la restructur­ation que vient d’effectuer le gouverne‐ ment Higgs ne soit préjudi‐ ciable aux francophon­es.

Elle dit que la communau‐

té francophon­e s'inquiète toujours de voir son réseau de santé disparaîtr­e un jour. La régie de la santé franco‐ phone, c'est un fleuron de la société acadienne franco‐ phone du Nouveau-Bruns‐ wick, déclare Mme McGraw. De l'étouffer comme on est en train de le faire présenteme­nt, poursuit-elle, équivaut à faire perdre de l'influence aux fran‐ cophones.

Du côté de l'organisme Égalité santé en français, on s’oppose à une centralisa­tion accrue du système.

C'est clair qu'on a perdu le peu de transparen­ce et de contrôle par le biais de huit membres élus. On a perdu ça, a affirmé dans un entretien samedi son porte-parole,

Jacques Verge.

D’après le reportage de Sarah Déry

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