Le fondateur: en plein dans le rêve américain
Un homme, des hambur‐ gers et beaucoup d'ar‐ gent...
Comment devenir un Américain? C’est presque le sous-titre que pourrait por‐ ter Le fondateur, biographie filmée de Ray Kroc, qui a eu le talent bien retors de savoir s’emparer d’une petite marque familiale californienne de restaurants de burgers, McDonalds, pour en faire ce qu’on sait. Car le film se double aussi d’un regard sati‐ rique assez atypique (puisque gentiment cruel) sur ce qui fonde l’esprit même du mythe américain : l’idée de réussite.
Un self-made-man, ce Ray Kroc? Oui, assurément. Et du genre à écouter des motiva‐ teurs lui répéter inlassable‐ ment que sa persévérance le fera bien gagner, quand lui n’y croit plus.
Un représentant du rêve américain? Oui, encore plus. Parti de rien (il vendait des machines à milkshake sur la route), il est arrivé à tout en ayant l’éclair de génie de pro‐ poser aux deux frères McDo‐ nalds de franchiser leur idée.
Un digne héritier du for‐ disme et un emblème du capi‐ talisme triomphant? Oui en‐ core, car c’est lui qui réinven‐ tera l’organisation de ces pe‐ tits restaurants pour en aug‐ menter l’efficacité, et surtout, la rentabilité.
Ça, c’est pour le côté offi‐ ciel. Car ce que montre aus‐ si Le fondateur, c’est que la fin, en matière de commerce américain, semble bel et bien justifier les moyens. Ray Kroc, homme d’affaires arriviste, n’a rien inventé, rien créé, rien porté à bout de bras. Ce sont plutôt deux frères qui ont eu, après moult autres idées, celle de mettre un snack sur rou‐ lotte et de voyager vers les consommateurs.
Et ce que filme alors Le fondateur, ce n’est pas seule‐ ment comment un homme a pu usurper cette réussite et la faire sienne, mais aussi com‐ ment l’Amérique a navigué, au cours de ces rutilantes années 50, d’une idée de l’entrepre‐ neuriat dopé aux valeurs fa‐ miliales et à l’envie de bien faire vers une autre, basée sur l’enrichissement personnel et la libre entreprise, quitte à laisser sur le bas-côté la bonne tenue de sa vie fami‐ liale, les conditions de travail des salariés et la qualité de la nourriture servie.
Oui, Le fondateur, avan‐ çant sur les rails d’une biogra‐ phie tout ce qu’il y a de clas‐ sique (acteur charismatique – Michael Keaton –, montage rapide, musique soulignant l’émotion, recherche factuelle wikipédienne), est surtout un film qui dévoile les dessous pas forcément brillants d’une success-story.
Car, si vouloir gagner de l’argent reste une motivation plus que normale, ce désir, marié à la pression du mythe américain de la réussite, n’est pas forcément ce qui nous rend plus humains. Même au contraire.
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La bande-annonce (source : YouTube).