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Pourquoi l’addition au restaurant estelle plus salée qu’avant?

- Axel Tardieu

Depuis le début de la guerre en Ukraine, la vie coûte plus cher. Les prix des aliments augmentent aussi pour des milliers de restaurate­urs. La note fini‐ ra par être plus salée pour les clients. Les restaura‐ teurs ont-ils d’autres choix?

Carolina De La Torre prend la commande de ses premiers clients de l’après-midi, tandis que son mari, Phanor Viera, épaule leur fille, Karen Viera, dans la cuisine. Chacun connaît sa place dans ce petit camion de cuisine de rue.

La famille francophon­e a lancé son entreprise, Arepas Ranch, il y a six ans, après avoir passé un quart de siècle au Québec. Avec cette aven‐ ture, elle fait découvrir aux Al‐ bertains les arepas, un plat traditionn­el du Venezuela et de la Colombie à base de fa‐ rine de maïs.

Depuis cet hiver, leur pro‐ jet familial doit s'adapter pour continuer à survivre, dit Caro‐ lina De La Torre. Tous leurs coûts ont flambé. Celui de l'huile de canola, essentiell­e pour cuisiner, a doublé.

Ils ont dû augmenter les prix affichés sur leur menu. On a essayé de ne pas aller trop loin. On a augmenté d’environ un dollar pour équi‐ librer un petit peu, explique-telle.

Remplacer certains in‐ grédients

Les recettes ont aussi dû changer. Le manioc, dont le prix a doublé, a été remplacé par des bananes plantains, moins chères. Les avocats sont rationnés et transformé­s en guacamole.

Ils se fournissen­t mainte‐ nant chez des grossistes et des fermiers locaux plutôt qu'à l'épicerie. Pour déplacer leur camion de marché en fes‐ tival et cuisiner dedans, les Viera De La Torre dépensent aussi deux fois plus en es‐ sence et en propane. Leurs profits ont baissé en six mois, mais ils restent optimistes.

Même si c'est difficile, si on a passé deux années de pan‐ démie, je pense qu'on est ca‐ pable de survivre à ça, dit Ca‐ rolina De La Torre.

Daniel Paez, un client, ne compte pas changer ses habi‐ tudes malgré le contexte éco‐ nomique. On doit aider les pe‐ tits commerces même s'il faut payer un peu plus, dit-il, un arepa dans la main droite. Le camion d'Arepas Ranch n'a, pour l'instant, pas connu de baisse de fréquentat­ion.

Plus de légumes de sai‐ son

Dans le dernier sondage réalisé auprès de ses 30 000 membres, Restaurant­s Canada rappelle que les prix des denrées alimentair­es dans les épiceries ont grimpé de 10,1 % entre juin 2021 et juin 2022.

Selon ces restaurate­urs, les prix des menus devraient augmenter de 7,8 % d'ici la fin de 2022, par rapport à 2021, soit la plus forte hausse du secteur depuis l'introducti­on de la taxe sur les produits et services (TPS), en 1991.

Ernie Tsu, président de l'As‐ sociation des services d'ac‐ cueil de l'Alberta, assure que les restaurant­s n'ont pas d'autres choix que d'augmen‐ ter leurs prix, car leurs marges sont déjà très faibles, entre 5 % et 7 %. Beaucoup font donc preuve de créativité.

Les restaurant­s travaillen­t de plus en plus avec des four‐ nisseurs locaux pour cuisiner avec des produits locaux et de saison, dit-il. Ils pourraient aussi augmenter leurs choix de plats plus sains, avec plus de légumes et moins de pro‐ téines animales.

Moins d'heures de tra‐ vail

Les restaurant­s Red’s Di‐ ner, à Calgary, eux aussi, ont augmenté leurs prix, mais il est hors de question, pour la direction, de changer les me‐ nus favoris des clients, de ré‐ duire les portions ou la quali‐ té des ingrédient­s.

Le plat le plus populaire coûte 4 $ de plus qu'il y a cinq mois. Les menus sont même réimprimés régulièrem­ent pour mettre à jour les tarifs. Le directeur général, Logan Campbell, a trouvé d'autres moyens pour faire des écono‐ mies.

Chaque jour, je scrute nos chiffres heure par heure. J'es‐ saie de libérer du personnel quand il y a peu de clients. Un quart d'heure de moins ici et là changera vraiment la donne à long terme pour nous, puisque nous avons trois adresses en ville, ex‐ plique-t-il. Chaque sou compte, maintenant.

La période est stressante pour Logan Campbell, qui n’a vu d'inflation aussi forte. Il compte sur ses clients les plus fidèles, comme Roberta Lip‐ pitt, pour passer au travers de cette tempête. Nous conti‐ nuerons d'aller au restaurant, mais cela risque d'être plus compliqué pour les jeunes, dit cette dernière qui est retrai‐ tée.

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