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La contracept­ion orale d’urgence refusée à une femme en raison de conviction­s religieuse­s

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Alors que le droit à l'avorte‐ ment fait la manchette aux États-Unis, une Sague‐ néenne a récemment vécu une situation particuliè­re dans une pharmacie de Chicoutimi. Le pharmacien lui a refusé l'accès à la contracept­ion orale d'ur‐ gence, mieux connue sous le nom de pilule du lende‐ main, parce que cela allait à l'encontre de ses convic‐ tions religieuse­s.

Elle a finalement eu accès à la pilule en se rendant dans une autre pharmacie, mais non sans avoir vécu une ex‐ périence angoissant­e.

Je me sentais mal, je me sentais vraiment jugée, a ra‐ conté la femme en entrevue à Radio-Canada.

Cette femme de 24 ans de Saguenay se remet encore de ses émotions deux jours après sa visite à la pharmacie Jean Coutu du boulevard Tal‐ bot, à Chicoutimi, située près de la rue des Saguenéens.

Lui, ce n'était pas dans ses valeurs, ce n'était pas dans son éthique de me prescrire ce médicament-là. Je me suis retrouvée un peu ébahie, je ne savais pas quoi dire, puis là il m’a dit: "Écoute, soit tu te présentes dans un autre éta‐ blissement ou bien peut-être, à un moment donné, il y a une autre pharmacien­ne va arriver et qui va pouvoir, elle, te la prescrire", a-t-elle pour‐ suivi.

Le pharmacien en ques‐ tion a décliné la demande d'entrevue de Radio-Canada, mais il a reconnu que ce n'était pas la première fois qu'il agissait ainsi.

Pour une efficacité maxi‐ male, la pilule du lendemain doit être prise entre 12 et 24 heures après la relation sexuelle.

Je lui ai même dit que j'étais prise par le temps, que c'était vraiment important que je prenne ce médica‐ ment-là aujourd'hui. Il n'a comme rien voulu faire pour moi [...]. Il a fallu que je me dé‐ place dans une autre succur‐ sale assez proche. Mais avec le temps d'attente que j'avais déjà eu, je n'avais plus le temps. J'ai été très chanceuse que mon employeur me per‐ mette de faire ça, a-t-elle ajou‐ té.

Un droit protégé, dit l'Ordre des pharmacien­s

L'Ordre des pharmacien­s du Québec (OPQ) ne veut pas commenter ce cas spécifique, mais rappelle qu'un de ses membres peut refuser de prescrire un traitement à un patient en raison de ses conviction­s morales ou reli‐ gieuses, tel que le prévoient la Charte canadienne des droits et libertés et la Charte québé‐ coise des droits et libertés de la personne. Il a cependant l'obligation de diriger le pa‐ tient vers un autre pharma‐ cien.

Ces textes de loi ont pré‐ séance sur tout autre loi ou règlement qui pourrait éma‐ ner des ordres profession­nels, dont l’Ordre des pharmacien­s du Québec, a fait savoir l'OPQ par courriel, en transmetta­nt un extrait d'un texte déjà pu‐ blié sur le blogue de l'orga‐ nisme.

Récif 02 dénonce

Pour sa part, Récif 02 – Table de concertati­on des groupes de femmes au Sague‐ nay-Lac-Saint-Jean, condamne la position du pharmacien. L'organisme craint que cette attitude ait des conséquenc­es chez certaines femmes.

Ce n'est pas une décision qui est prise à la légère, c'est une décision importante dans la vie d'une femme. Puis là, tu fais face à un refus, donc tu dois répéter l'exercice. Tu vas te dire: "Est-ce que l'autre pharmacien va me faire le même refus?” Tu ne le sais pas.

Gisèle Dallaire, coordonna‐ trice de Récif 02

La cliente partage la même opinion.

Je ne pense pas que c'est au pharmacien de nous faire sentir comme ça, c'est nos dé‐ cisions. C'est à moi de prendre cette décision-là, ce n'est pas à lui. C’est mon corps à moi, at-elle estimé.

La femme songe à porter plainte à l'OPQ. En attendant, elle a dénoncé la situation au‐ près du service à la clientèle de Jean Coutu.

D’après un reportage de Roby St-Gelais

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