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Les quotas de pêche au hareng d’automne déçoivent les pêcheurs du sud de la Gaspésie

- Catherine Charest

Le ministère des Pêches et des Océans (MPO) réduit le quota de hareng dans le sud du golfe du Saint-Laurent. Après l’interdic‐ tion de la pêche au maque‐ reau et au hareng de prin‐ temps en mars, les pê‐ cheurs pélagiques profes‐ sionnels du sud de la Gas‐ pésie sont amers.

La ministre Joyce Murray a annoncé vendredi soir que le total autorisé des captures de 2022 pour le stock de hareng d’automne serait de 10 000 tonnes, ce qui repré‐ sente une diminution de 20 % par rapport aux 12 000 tonnes en vigueur de‐ puis 2020. Pour le sud de la Gaspésie, les pêcheurs pour‐ ront capturer 3602 tonnes métriques de hareng.

Le stock de hareng d’au‐ tomne du sud du golfe du Saint‑Laurent demeure dans la zone de prudence. Selon le MPO, le nombre d’adultes re‐ producteur­s est en baisse, et le recrutemen­t est au plus bas niveau jamais observé.

Des mesures de gestion plus strictes sont nécessaire­s pour aider le stock à arriver à maturité, à se reproduire et à se rétablir au profit des collec‐ tivités côtières rurales, in‐ dique le ministère.

Bien que la majorité des pêcheurs pélagiques profes‐ sionnels du sud de la Gaspé‐ sie capturent le hareng de printemps, quelques-uns pêchent celui d’automne.

Le président de l'associa‐ tion, Ghislain Collin, affirme que le quota leur permettra de pêcher seulement de trois à quatre jours.

Il n’y a rien pour que ce soit lucratif pour les gars, pour mettre leur bateau à l’eau, engager des hommes de pont et préparer les choses […]. Les gars sont dans le trou encore une fois, souligne-t-il.

Le hareng de printemps et le hareng d’automne sont deux espèces différente­s qui ne font pas partie des mêmes stocks.

Pour capturer le hareng de printemps, les filets restent installés pendant la nuit et ne sont levés que le lendemain matin, alors que pour la pêche au hareng d’automne, ce sont les pêcheurs qui pour‐ suivent les bancs de poissons durant la nuit. Lorsqu’ils lancent les filets à l’eau, ils les remontent immédiatem­ent. La compétitio­n entre pê‐ cheurs de hareng d’automne est plus forte.

Lors de la pêche d’au‐ tomne, d’autres pêcheurs tels que les homardiers et les cra‐ biers participen­t à la capture du hareng. Tout le monde se garroche dans ce petit quotalà, donc c’est pour ça que je vous dis qu’il va y avoir trois ou quatre jours de pêche maximum. Rien pour engager des gars […]. C’est encore de la grosse misère pour les péla‐ giques, s’indigne M. Collin.

Qui plus est, Ghislain Collin ne s’explique pas pourquoi le MPO a dévoilé le total autori‐ sé des captures aussi tardive‐ ment. On dirait que c’est pour faire sûr que si on a des objec‐ tions, leur bureau est fermé, les accuse-t-il. Pêches et Océans n’est pas ca‐ pable de nous dire à l’avance quels seront les quotas. Eux les connaissen­t, mais les pê‐ cheurs le savent seulement à la dernière minute. Comment voulez-vous planifier une sai‐ son et engager des gars?

Quand vous êtes déjà à terre et que ça fait déjà plu‐ sieurs mois que vous n’avez pas de salaire, comment pou‐ vez-vous réinvestir dans une pêche, sans savoir si vous al‐ lez pêcher pour plus qu’une journée?

Ghislain Collin, président des pêcheurs pélagiques pro‐ fessionnel­s du sud de la Gas‐ pésie

En mars, le ministère a an‐ noncé deux jours avant le dé‐ but de la pêche commercial­e au hareng de printemps et au maquereau qu’elles seraient interdites afin de régénérer les stocks des deux espèces en zone critique.

Depuis, le président des pêcheurs pélagiques profes‐ sionnels du sud de la Gaspé‐

sie demande une aide à Otta‐ wa pour les 15 pêcheurs de son associatio­n qui ont perdu leur seule source de revenus sans préavis.

Deux pistes de solution Ghislain Collin propose deux avenues au gouverne‐ ment fédéral pour leur venir en aide. La première est de fournir une aide financière aux pêcheurs et la deuxième est de leur distribuer des per‐ mis de pêche pour d'autres espèces comme le calmar, dont les permis ont été recon‐ duits cette année.

Ils sont 15 pêcheurs. C’est facilement réglable ce pro‐ blème-là. C’est facilement ré‐ glable et on passe à autre chose, mais à la place, ils vont étirer ça et causer encore plus de dommages et de doutes, est-il d'avis.

En ce sens, le chef du Bloc québécois, Yves-Fran‐ çois Blanchet, a fait parvenir une lettre au premier ministre le 11 août dernier. Il men‐ tionne que les zones de pêche où sont habituelle­ment prises les espèces dites pélagiques reçoivent un volume considé‐ rable de calmars, une res‐ source alternativ­e qui, sans toutefois être imprudente, permet une pêche de rempla‐ cement des espèces dont le prélèvemen­t est actuelleme­nt suspendu.

Un lien de confiance qui se brise

Après l’avoir réclamé pen‐ dant des mois, Ghislain Collin a finalement obtenu il y a quelques semaines un mo‐ ment de discussion avec Diane Lebouthill­ier.

Je peux vous dire que moi et mon bureau on travaille très près et on est en contact avec les pêcheurs pélagiques. On sait que c’est une pêche qui est importante aussi pour le milieu et on va continuer de les supporter et de les accom‐ pagner, a affirmé Diane Le‐ bouthillie­r plus tôt cette se‐ maine.

Toutefois, M. Collin ne sent pas qu'il est supporté et ac‐ compagné.

Lors de sa rencontre avec la députée, M. Collin s'est fait promettre d' être à toutes les tables de discussion sur les pêches. Il affirme pourtant que ce n'est pas le cas.

Elle était très gentille et courtoise puis on a eu une belle rencontre. Le premier ministre s’en venait en août et on était censé se faire inviter à pouvoir discuter, confie M. Collin.

Son regroupeme­nt avait ainsi bon espoir de s’entrete‐ nir avec Justin Trudeau lors de son passage dans la région, mais il dit n'avoir jamais été approché, comme le lui avait suggéré Mme Lebouthill­ier.

La confiance est en train de disparaîtr­e de semaine en semaine, relate M. Collin.

Je pense sérieuseme­nt qu’ils sont en train de rire de nous.

Ghislain Collin, président des pêcheurs pélagiques pro‐ fessionnel­s du sud de la Gas‐ pésie

Par ailleurs, il souhaite consulter des biologiste­s in‐ dépendants afin de contester les évaluation­s des stocks de hareng dans le sud du golfe du Saint-Laurent.

La date d'ouverture de pêche demeure inconnue pour le moment.

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