En C.-B., des patients publient des petites annonces pour trouver un médecin de famille
Michael Mort, âgé de 82 ans et résident de Victoria, en Colombie-Britannique, a trouvé un médecin de fa‐ mille après que sa femme, Janet, a fait paraître une annonce dans le journal Times Colonist à la fin juillet. Si la méthode peut sembler désespérée, elle met bien en lumière la pé‐ nurie de médecins de fa‐ mille au Canada, selon une professionnelle du milieu.
Janet et Michael Mort étaient sans médecin de fa‐ mille depuis que le leur a pris sa retraite en décembre 2021.
Comme Michael Mort souffre de problèmes car‐ diaques et neurologiques et, depuis récemment de pro‐ blèmes de prostate, sa femme a décidé de publier une an‐ nonce dans le journal, pour que ses soins médicaux puissent se poursuivre sans interruption.
C'était ma dernière option, explique Janet Mort. J'ai dit à [Michael] que si je mettais [une annonce] dans le journal, tous nos amis et nos connais‐ sances connaîtraient [son] état. Il m'a simplement dit : "Janet, je suis dans une situa‐ tion désespérée et je ferai tout ce que tu penses qu'il faut faire pour obtenir des soins médicaux."
À écouter :
La pénurie de médecins, un casse-tête mondial
Janet Mort affirme avoir même envisagé d'envoyer son mari dans une clinique privée de Seattle, dans l'État de Washington, mais cette so‐ lution aurait engendré des coûts trop importants, selon elle.
Le couple se dit ravi d’avoir finalement trouvé un méde‐ cin de famille pour que Mi‐ chael Mort puisse obtenir l’examen physique qu’il espé‐ rait ainsi que des soins plus spécialisés.
Le système de santé en
Janet et Michael Mort ne sont pas les seuls à avoir fait appel au public pour trouver un médecin de famille. Leur démarche a incité le Vancou‐ vérois Gary Shuster à faire de même au mois d’août, en of‐ frant une récompense de 5000 $ à la personne qui lui viendrait en aide.
La Dre Margaret Fraser, médecin de famille et urgen‐ tiste au Cap-Breton, en Nou‐ velle-Écosse, estime qu’il est terrible de devoir employer ce moyen pour obtenir des soins.
Elle n’en est toutefois pas surprise, car selon elle, le sys‐ tème de santé est dans son pire état depuis qu’elle a com‐ mencé à travailler il y a 12 ans, surtout lorsqu’il s’agit de trou‐ ver un médecin de famille.
D'ailleurs, selon un son‐ dage de l'Institut Angus Reid publié cette semaine, 17 % des Canadiens consultés n'ont pas de médecin de fa‐ mille et 33 % ont de la difficul‐ té à obtenir un rendez-vous avec celui qu'ils ont.
C'est aussi en ColombieBritannique et au Québec (23 % dans les deux pro‐ vinces) que les personnes n'ayant pas de médecin sont les plus nombreuses, selon les données du sondage.
Dans une déclaration en‐ voyée par courriel, le minis‐ tère de la Santé de la Colom‐ bie-Britannique affirme être au courant de la situation de Michael Mort. Il dit également se rendre compte que de nombreuses autres per‐ sonnes dans la province res‐ sentent les effets des défis de capacité.
Nous savons que l'épuise‐ ment professionnel dû à la pandémie est réel et que de nombreux professionnels de la santé, y compris ceux de notre système de soins pri‐ maires, ne travaillent pas ou travaillent moins pour s'occu‐ per d'eux-mêmes, indique la
déclaration.
Le gouvernement de la Co‐ lombie-Britannique a récem‐ ment annoncé un investisse‐ ment de 118 millions de dol‐ lars afin de soutenir à court terme les médecins de famille, le temps de créer un nouveau modèle d’indemnisation, qui devrait être annoncé cet au‐ tomne.
Se faire entendre
Selon la Dre Fraser, il n'y a pas de solution à court terme à la pénurie de médecins.
Réparer le système de san‐ té n'est pas quelque chose que l'on peut faire dans un mandat de quatre ans, d’après elle. Les écoles de mé‐ decine doivent augmenter le nombre d'inscriptions et il doit y avoir plus de [possibili‐ tés] de formation pour les personnes qui viennent de l'extérieur du Canada.
Quant au couple résidant à Victoria, Janet Mort espère que leur histoire servira de motivation aux autres Cana‐ diens sans médecin.
Si vous avez un médecin de famille, regardez-vous dans le miroir et dites-vous [que vous êtes] chanceux. [...] Si votre médecin prend sa re‐ traite ou décide de déména‐ ger, vous vous retrouverez [comme nous], impuissants et seuls.
Commencez à vous faire entendre, conseille-t-elle.
Avec des informations de Bob Becken et de l'émission Cross Country Checkup