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Rencontre avec Emma Mackey, l’héroïne du film Emily au TIFF

- Première

Présenté en mondiale au Festival inter‐ national du film de Toronto

(TIFF) dans la section Plate‐ forme, le film Emily de Frances O’Connor s’inté‐ resse à la romancière bri‐ tannique Emily Brontë et à son existence tourmentée.

Décédée à l’âge de 30 ans, l’écrivaine n’aura laissé pour la postérité qu’une seule oeuvre majeure, Les Hauts de Hurle‐ vents.

L’actrice franco-britan‐ nique Emma Mackey lui prête ses traits dans ce film qui, souligne-t-elle, n’est pas une biographie classique, mais l’in‐ terprétati­on d’une cinéaste et une exploratio­n de la condi‐ tion féminine dans l’Angle‐ terre du 19e siècle.

La comédienne, surtout connue pour son rôle dans la série Sex Education de Netflix (dont elle prépare d’ailleurs la saison 4), était de passage à Toronto où nous l’avons ren‐ contrée. Elle nous présente Emily.

Emily, c'est l'histoire d'une jeune femme qui apprend à se connaître à travers les rela‐ tions avec sa famille, son père, son frère et ses soeurs. Et en fait, on va partir en voyage avec elle. Partir dans son uni‐ vers. Il y a une dualité assez forte dans le film, entre son monde très réel, très viscéral dans le Yorkshire – c'est un peu un huis clos – et son ima‐ gination, son monde interne.

J'étais très heureuse, parce que ça représenta­it beaucoup pour moi de faire ce genre de film et de jouer ce genre de rôle, de personnage qui est quand même assez mythique. Mais étant donné que ce n'est pas un biopic strict ni un do‐ cumentaire sur Emily Brontë, on avait beaucoup de liberté.

Et j’ai adoré faire toutes les re‐ cherches, lire toutes les bio‐ graphies, voir tous les films sur Les Hauts de Hurlevent ou sur les soeurs Brontë. Mais en fait, le scénario est une pièce à part entière.

Q : Justement, comment avez-vous abordé et préparé ce rôle?

J’ai découvert tellement de choses en lisant. Après, c'était une personne très privée. Les choses qu'on sait, c'est un peu des anecdotes de sa soeur Charlotte Brontë, qui a écrit Jane Eyre, donc ce n'est pas très objectif si vous vou‐ lez. Mais au fur et à mesure des lectures, on commence à avoir au moins une esquisse de qui elle était.

Q : Sa soeur Charlotte dit, dans le film, que tout le monde voit Emily comme la bizarre, l’étrange. Qu’avaitelle de particulie­r, pourquoi est-ce qu’on la classait un peu à part selon vous?

Je ne sais pas si on la clas‐ sait vraiment comme ça à l'époque, mais en tout cas oui, je pense qu'elle est dessi‐ née comme étant une per‐ sonne à part. Je pense qu'elle était très solitaire. Mais en fait, elle mettait ses angoisses et ses peurs au service de son intelligen­ce.

Cette famille était très in‐ telligente, ils avaient accès à beaucoup de livres et ils avaient une culture hors du commun. Ils parlaient trois langues, jouaient du piano. C’étaient des érudits tous, grâce à leur père qui leur a vraiment inculqué une éduca‐ tion assez stricte. Mais voilà je pense que toutes les choses qu'elle a pu absorber et toutes les conversati­ons qu'elle a pu avoir ont "infor‐ mé" son cerveau, c’est un muscle qu’elle utilisait tout le temps.

Q : C'est un destin tra‐ gique parce qu’elle n’a pu produire qu'une seule oeuvre et elle est morte très jeune. Dans le film, elle demande même à sa soeur de brûler tous ses autres écrits.

Oui, enfin il reste des poèmes, les poèmes qu'on entend dans le film ce sont des poèmes qu'elle a écrits, mais c'est des versions qui ont été éditées après la mort d'Emily. Donc Charlotte a "cor‐ rigé" les poèmes d'Emily (...) Mais je pense que c'est pour ça que cette famille est si fas‐ cinante pour tant de gens en‐ core aujourd'hui. C'est un peu comme la porte secrète où il y a écrit "défense d'entrer, dan‐ ger". On a un peu envie d'aller voir ce qui se passe et je pense qu'elle représente ça. Elle représente le mystère et en même temps elle repré‐ sente l'authentici­té. Ce que c'est d’être quelqu'un d'au‐ thentique et de féroce et de complexe.

Q- Et c’est une histoire ra‐ contée aujourd’hui en 2022. Quels liens pensez-vous qu’on peut faire entre ces époques, son destin de femme?

Je pense que les films d'époque ont leur place au‐ jourd'hui. Je ne pense pas que c'est obligé d'être des films lourds ou ennuyeux. Moi, ce qui m'intéresse, ce qui m'a in‐ terpellé, c'est que ce n’est pas un film précieux, coincé dans des carcans des codes. Tout est un peu chaotique.

Q- Comment le film a-t-il été reçu lors de la première à Toronto?

Je ne voulais pas rester dans la salle à la base parce que j'avais trop peur. Et en fait je suis restée et j'ai été étonnée par les rires, je trouve qu'il y avait beaucoup de rires et les éléments un peu comiques ont très bien atterri – ce n'était pas forcé‐ ment tout le temps voulu, mais j'étais contente qu'il y ait un peu de légèreté. J’ai aussi entendu quelques renifle‐ ments, donc c'était bon signe, ça veut dire que l'émotion avait sa place.

C’est la première fois que je fête un film que je fais parce qu’on a eu la COVID, plein de choses. Donc là c'est le pre‐ mier film que je peux fêter vé‐ ritablemen­t et je suis contente de le faire ici, parce que ce festival a quelque chose de particulie­r, je pense. C’est des vrais fans de cinéma. Il n’y a pas vraiment de prix, ce n'est pas un truc un peu "chichi", je trouve ça très au‐ thentique.

J’espère que ça va plaire et que les gens vont être au moins transporté­s, vont se laisser porter par le film. Emma Mackey

Propos recueillis et condensés par Camille Gris Roy

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