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La culture du pourboire au Canada est viciée, selon des experts

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Les Canadiens sont sou‐ vent appelés à donner du pourboire dans les restau‐ rants, mais pour certains experts cette pratique qui invite les clients à payer en toutes circonstan­ces peut avoir un effet pernicieux dans le secteur du com‐ merce.

Selon l'économiste en ali‐ mentation Mike von Massow, le pourboire est devenu une norme sociétale bien établie au Canada, surtout avec les machines de paiement.

Les terminaux de paie‐ ment ont fait en sorte qu’il soit facile pour les entreprise­s de proposer une option de pourboire, même dans les in‐ dustries où la gratificat­ion ne faisait pas partie de leurs pra‐ tiques commercial­es.

La situation est d'autant plus préoccupan­te, selon M. von Massow, que les don‐ nées des associatio­ns com‐ merciales canadienne­s ont constaté que le pourcentag­e moyen de pourboire pour les restaurant­s a augmenté de‐ puis le début de la pandémie, en 2020.

M. von Massow, qui est également professeur à l’Uni‐ versité de Guelph, a affirmé que les Canadiens s’attendent à une hausse incontrôlé­e des pourboires.

Je suis allé à la brasserie de mon quartier l’autre jour pour chercher quelques bouteilles. Et au moment de payer, j'ai été obligé de donner un pour‐ boire, a soutenu M. von Mas‐ sow.

Pour M. von Massow, c'est un double coup dur pour les consommate­urs, parce que de plus en plus d'entreprise­s qui demandent des pour‐ boires augmentent en même temps les prix de leurs pro‐ duits.

Vous savez, j’ai commencé à me demander si je donne un excellent cours, je devais mettre un bocal à l'entrée de la salle. Et peut-être à la fin, pendant qu'ils [les étudiants] sortent, ils pourraient dépo‐ ser quelques billets pour moi aussi. Je veux dire [tout sim‐ plement], où va-t-on avec cette situation? s'est-il interro‐ gé.

Clients indignés, choc culturel

Oonagh Butterfiel­d, qui est copropriét­aire d'un res‐ taurant à Toronto, a constaté que, depuis qu'ils ont ajouté une option de pourboire à leurs machines de paiement, celui-ci [le pourboire] a connu une augmentati­on significa‐ tive.

Mais, selon Mme Butter‐ field, certains clients, malgré l'affichage sur l'écran tel que pour contourner l'option de pourboire, veuillez appuyer sur le vert, remettent tou‐ jours en question l'option de pourboire électroniq­ue.

Parfois, il y a un peu, je di‐ rais, d'indignatio­n autour du fait qu'on leur pose même la question : "voudriez-vous donner un pourboire?" Sur‐ tout s'ils achètent juste du pain, ce qui, encore une fois, est la raison pour laquelle j'es‐ saie de faire comprendre aux gens que ce n'est pas une né‐ cessité, a-t-elle expliqué.

Bien qu'elle ait actuelle‐ ment l'option de pourboire pour les clients, Mme Butter‐ field affirme qu'elle est pour l'abandon de la culture ac‐ tuelle du pourboire au Cana‐ da, afin que chacun puisse se voir garantir un salaire dé‐ cent.

Kate Malcolm a déménagé à Port Perry, en Ontario, en 2017 en provenance du Royaume-Uni, où les pour‐ boires ne sont pas une pra‐ tique courante. Cinq ans plus tard, elle dit qu'elle a encore du mal à comprendre la culture du pourboire au Cana‐ da.

Il n'y a aucun moyen qu'en Angleterre vous donniez 10 $, 20 $, 30 $ à un coiffeur, a-t-elle déclaré. C'est tellement cher de se faire coiffer comme ça, et puis il faut leur donner un pourboire aussi?

Mme Malcolm, qui dirige un balado destiné aux nou‐ veaux arrivants, a inclus sa ré‐ action aux règles non écrites du Canada en matière de pourboires dans une vidéo TikTok décrivant son choc culturel.

Supprimer boires les pour‐

Carl Heinrich est copro‐ priétaire du restaurant Rich‐ mond Station de Toronto. Ils ont supprimé en juillet 2020 les pourboires, choisissan­t plutôt d'augmenter les prix pour payer davantage le per‐ sonnel.

La culture du pourboire au

Canada est très inéquitabl­e pour payer le personnel, a-t-il fait savoir.

Mais, cette pratique est peu fructueuse, à en croire Marc Mentzer, professeur de commerce à l'Université de la Saskatchew­an.

Mis à part les restaurant­s très haut de gamme, où les clients ne sont peut-être pas aussi sensibles au montant qu'ils dépensent, de nom‐ breuses entreprise­s qui rem‐ placent les pourboires par des frais de service ne réussissen­t pas, a-t-il expliqué.

Les clients aiment l'illusion d'avoir le pouvoir sur le ser‐ veur et le serveur aime l'illu‐ sion de contrôler le montant de ses propres revenus, a-t-il ajouté.

Dans un monde idéal, il n'y aurait pas de pourboire. C'est une catastroph­e pour les droits de la personne. Mais c'est tellement profondéme­nt enraciné. Je pense que nous sommes coincés avec ça.

Marc Mentzer, professeur de commerce à l'Université de la Saskatchew­an.

De lourdes options de pourcentag­e de pourboire préprogram­mées sur les ma‐ chines à cartes à puce peuvent effrayer les gens en leur faisant donner un pour‐ centage plus élevé qu'ils n'au‐ raient jamais envisagé aupa‐ ravant, a ajouté M. Mentzer.

Tout le monde se plaint des pourboires, mais étant donné le choix entre un res‐ taurant avec pourboire et un restaurant avec frais de ser‐ vice, je ne sais pas comment les clients feraient ce choix. Je pense que les clients pour‐ raient en fait préférer l'ap‐ proche du pourboire s'ils avaient le choix, a-t-il estimé.

Avec les informatio­ns de Bob Becken de CBC News

dévastateu­r.

Elle ajoute que des plans sont en cours d'élaboratio­n pour rénover le quartier de rue Bank avec des espaces verts et davantage d'activités culturelle­s.

Nous devons ajouter de la vie et de l'intérêt au centrevill­e, ce qui n'existait pas au‐ paravant. Il faut que ça res‐ semble davantage à un vil‐ lage.

Elle souligne l'importance de garder le centre-ville vivant et prospère.

C’est le coeur de notre ville, et si notre coeur ne va pas bien, notre ville ne va pas bien, a-t-elle imagé.

Elle conclut en disant que tout cela reviendra, mais sous une forme différente.

Avec les informatio­ns d’Alexander Behne, de CBC News

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