Daniel Lavoie au Panthéon : le riche parcours d’un artiste au coeur francophone
L’auteur-compositeur-in‐ terprète franco-manito‐ bain Daniel Lavoie sera in‐ tronisé samedi au Pan‐ théon des auteurs et com‐ positeurs canadiens. Du haut de ses 73 ans, l’artiste revient sur quelques mo‐ ments phares de sa car‐ rière, parsemant le tout d’anecdotes comme la fois où il a dû interpréter Le devant Ice-T.
pape du rap
Avec 50 ans de carrière et 24 albums au compteur, il est difficile d’isoler un momentclé du parcours artistique de Daniel Lavoie. Mais ce dernier admet sans ambages qu’il ne serait pas la même personne sans le succès de son opus Tension attention (1983) et de son grand succès Ils s’aiment.
J’en ai deux en fait : Ils s’aiment et Belle, qui ont complètement transformé ma vie de fond en comble. Je n’étais plus la même per‐ sonne six mois plus tard, ex‐ plique-t-il.
Ils s’aiment a été créée en 1981 dans un garage à Saint-Lambert, sur un piano électrique Fender Rhodes. Les paroles lui ont été inspirées par les nouvelles internatio‐ nales de l’époque, qui mon‐ traient des jeunes se tenant la main en plein Beyrouth, dans un Liban ravagé par la guerre civile.
Je me suis assis au piano et tout est arrivé d’un seul coup. C’est assez étonnant. Tu te de‐ mandes si c’est vraiment toi qui a écrit la chanson ou si c’est une petite porte qui s’est ouverte quelque part sur un secret qu’on ne connaît pas, se souvient-il.
Si la chanson a souvent été interprétée comme une ode au romantisme et à l’inti‐ mité, Daniel Lavoie l’a plutôt imaginée comme une invita‐ tion à vivre l’amour pendant qu’il est encore temps. Devant cette catastrophe mondiale qui se pointe, quelle meilleure chose à faire que l’amour?, ré‐ sume-t-il.
La langue de mon coeur, c’est le français
À la base, Ils s’aiment a été écrite en anglais et s’appelait Ridiculous Love. C’est sous la pression des producteurs de Tension attention, convaincus que le titre serait un succès dans la langue de Molière, que Daniel Lavoie a réécrit les paroles et changé le titre avec son collègue Daniel De‐ Shaime. C’est une approche qu’il finira par adopter pour la plupart de ses albums, mis à part quelques exercices de style en anglais.
Pour écouter l'intégrale de l'entrevue de Stéphane Leclair avec Daniel Lavoie, rendezvous sur la page de l'émission Les grands entretiens.
Très tôt dans son enfance, Daniel Lavoie a été conscient de sa double identité fran‐ çaise et anglaise. Né en 1949 à Dunrea, au Manitoba, l’essen‐ tiel de sa vie se déroulait en anglais, même si le français était privilégié à la maison.
Le chanteur affirme d’ailleurs avoir été bouleversé par l'oeuvre de Gabrielle Roy, romancière franco-manito‐ baine née à Saint-Boniface. Il cite en particulier son livre au‐ tobiographique La détresse et l’enchantement, qui traite justement de cette quête d’identité propre aux per‐ sonnes franco-canadiennes.
Je lisais Gabrielle Roy avec des larmes dans les yeux. Elle touchait la cible à peu près à chaque deux lignes.
Daniel Lavoie
Je sentais ce dilemme, cette lutte d’identité cultu‐ relle, le fait d’être un franco‐ phone sans racine dans un pays qui n’a pas vraiment de place pour toi, qui veut en fait se débarrasser de toi, se rap‐ pelle-t-il.
Il s’est ainsi rendu compte que son âme était plutôt fran‐ çaise qu’anglaise, et que d’écrire en français lui permet‐ tait de livrer plus fidèlement ce qu’il était. L’anglais fait tou‐ jours partie de ma vie parce que c’est une langue que je maîtrise beaucoup, mais la langue de mon coeur c’est le français.
Une histoire de talent, mais aussi de destin
Lorsqu’il regarde son par‐ cours, avec ses hauts et ses bas, Daniel Lavoie se conforte dans son idée qu’on contrôle en fin de compte peu de