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Tempête Fiona : des ostréicult­eurs non assurés doivent absorber des pertes

- Frédéric Cammarano

Poches d'huîtres dépla‐ cées, bouées perdues et câbles arrachés, les ostréi‐ culteurs ne peuvent pas ignorer le passage de la tempête Fiona en fin de se‐ maine. Qu’ils aient perdu peu ou beaucoup, ils doivent assumer les pertes dans leur entièreté, inca‐ pable de faire assurer leur équipement tout en main‐ tenant leur entreprise à flot.

Ce lundi matin grisâtre sur la rivière Saint-Charles à Al‐ douane au Nouveau-Bruns‐ wick, des employés vêtus d’une salopette orange à bord de bateaux remettent en place les poches d'huîtres. Les poches sont normalemen­t bien alignées, mais la tempête Fiona les a déplacées et entre‐ mêlées.

Ensuite, il faudra rapide‐ ment essayer de retrouver les poches qui ont disparu et qui se trouvent peut-être dans la forêt. Au bout de quelques jours à l’extérieur de l’eau, les huîtres risquent de mourir.

Selon un bilan provisoire, les pertes de l’entreprise Huîtres Aquador se chiffrent déjà en milliers de dollars. Une poche, huîtres et flotteurs compris, vaut environ 100 dollars.

Mais, ça ne décourage pas son propriétai­re, Serge Gau‐ det.

C'est une partie du métier. C'est pas la première fois que ça arrive. Ça arrive à toutes les quelques années. On a des tempêtes moins graves, mais c'est quelque chose qu'il faut prévoir comme industrie, dit celui qui est à la tête de son entreprise depuis 22 ans.

S’assurer cher coûte trop

L’entreprise Huîtres Aqua‐ dor devra assumer l'entièreté des pertes. Selon M. Gaudet, les compagnies d’assurance exigent des primes trop im‐ portantes pour les payer et maintenir son entreprise à flot.

Selon plusieurs ostréicul‐ teurs, il est abordable d’assu‐ rer de l’équipement tant qu’il se trouve sur la terre. Mais, dès qu’il est mis à l’eau, s’assu‐ rer coûte trop cher. Ils évoquent tous un risque trop important aux yeux des com‐ pagnies d'assurance, un avis partagé par l’Associatio­n des mollusques du NouveauBru­nswick.

Michèle Pelletier, la défen‐ seure du consommate­ur en matière d’assurances croit que le nombre d’assurés po‐ tentiels est aussi en cause.

L'assurance est basée sur le risque et comme on le dit ce sont les primes de plu‐ sieurs qui paient pour les pertes de peu d'assurés. Or, dans ce domaine, il [...] y au‐ rait peu d'assurés. C'est donc pourquoi les primes seraient élevées, explique-t-elle par courriel.

Plus de peur que de mal

La tempête Fiona a inquié‐ té Jean-Marc Poirier, un ostréi‐ culteur notamment établi à Cocagne, qui ne peut pas non plus se permettre d'assurer l’équipement sans mettre en péril son entreprise.

Ça dormait pas trop pareil. C'est inquiétant. Puis même au temps de la tempête, puis le lendemain matin surtout, tu essayes de voir de la côte avec des longues-vues c'est quoi les dégâts , résume le propriétai­re d’Aquacultur­e Sud-Est qui a investi des mil‐ lions de dollars pour agrandir son entreprise et s’offrir de l’équipement de qualité.

L’une de ses cages, y com‐ pris les six poches qu’elle contient, les flotteurs et les huîtres, peut valoir environ 1000 dollars.

Si la tempête avait dû dé‐ truire de manière importante ses installati­ons d'aquacul‐ ture, il reconnaît que c'est la survie de son entreprise qui aurait été en jeu et il aurait dû assumer les pertes avec, au moins un peu d’aide. En plus de la difficulté de s’assurer, les ostréicult­eurs ne possèdent pas de fond commun en cas d’urgence.

Il y aurait peut-être de l'aide du gouverneme­nt si quelque chose comme ça arri‐ verait , dit-il.

Les ostréicult­eurs JeanMarc Poirier et Serge Gaudet espèrent surtout qu’ils n’au‐ ront pas à faire face à d’autres tempêtes avant la fin de la saison, à laquelle il reste plus ou moins un mois.

C'était pas un bon timing. Nous, c’est notre période la plus achalandée. Alors, c’est certain que ça va avoir un ef‐ fet sur les chiffres finaux, ex‐ plique M. Gaudet.

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