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Un ex-infirmier plus heureux à vendre des planchers

- Frédéric Cammarano

Aider les autres : c’est ce qui a poussé Jean-Michel Mallais à devenir infirmier. Mais, exténué, il a quitté son emploi au CHU Du‐ mont à Moncton, il y a quelques mois, pour deve‐ nir vendeur de planchers. Selon lui, il s’agit d’une autre manière d’aider les autres et ça le rend plus heureux.

Jean-Michel Mallais a tro‐ qué l'administra­tion de pilules aux patients et des conditions écrasantes pour la présenta‐ tion d'échantillo­n de plancher aux clients dans un environ‐ nement détendu.

Après six ans comme infir‐ mier auxiliaire, il travaille au‐ jourd'hui chez Ritchies à Moncton, un emploi qu’il pourrait occuper longtemps.

Je n’ai jamais été autant va‐ lorisé comme personne. J’ai ja‐ mais eu autant de compli‐ ments dans les deux mois et demi que je travaille là que des six ans de nursing que j’ai fait.

Jean-Michel Mallais L'ex-infirmier de 28 ans dit qu'il n'a jamais reçu autant de merci et de s’il-vous-plaît lors‐ qu’il travaillai­t à l’hôpital.

Des années difficiles comme infirmier

Dès qu'il a obtenu son pre‐ mier emploi dans un foyer de soins à Shédiac, l'homme de Paquetvill­e a constaté que les conditions de travail étaient radicaleme­nt différente­s de celles qu'il avait vues pendant son stage.

Il était parfois responsabl­e de 45 patients. Selon lui, c’était en partie dû à un manque d’employés.

Je me suis déjà vu dans une chambre en train de cru‐ sher les pilules de patient X, puis d'aider avec les soins en même temps, raconte-t-il.

En 2018, il n’en peut plus.

Un épuisement profession­nel et une mononucléo­se le forcent à prendre un congé de maladie prolongé, accom‐ pagné d’une interrogat­ion sur son avenir.

Ok, ça va tu être ça ma vie pour les prochains 30, 40 ans?

Quitter le foyer de soins pour l'hôpital

Décidé à quitter ce foyer de soins, mais pas la profes‐ sion d’infirmier, il obtient un poste en 2018 au CHU Du‐ mont à Moncton.

C’est vraiment le jour et la nuit, dit celui qui était ravi de troquer ses quarts de travail de huit heures pour ceux de 12 heures et ainsi travailler moins de jours dans la se‐ maine.

Mais, petit à petit, on lui demande de faire du temps supplément­aire. Ces de‐ mandes se multiplien­t et se transforme­nt en obligation­s.

Et, le nombre de patients dont il doit s’occuper ne cesse d’augmenter, à un point tel qu’il compare ses tâches au travail à la chaîne.

Tu deal avec quelqu’un qui est en soins [palliatifs]. Puis, tu as pas le temps de te re‐ mettre dedans. Tu viens juste de prendre soin de quelqu’un qui est sur le seuil de mourir. Puis, tu as encore toute la journée qui te tape dedans à 100 miles à l’heure, parce que tu peux pas te permettre de prendre un souffle.

Jean-Michel Mallais, ex-in‐ firmier

Ces conditions de travail le poussent donc à remettre sa démission au début de l’été.

Il n’est pas le seul à avoir posé un tel geste dans la der‐ nière année. Pendant l’exer‐ cice financier 2021-2022, 500 employés du Réseau de santé Vitalité, dont 152 infir‐ mières, ont remis leur démis‐ sion.

Avec un peu de recul, JeanMichel Mallais dit que les pa‐ tients ne comprenaie­nt pas que les infirmiers ne puissent s’occuper d’eux immédiate‐ ment. Une situation qu’il trouve lui-même incorrecte, mais qui est malheureus­e‐ ment la réalité.

À la fin de la journée, je suis plus content de vendre du plancher que d’avoir aidé des gens, lance-t-il en préci‐ sant que cette phrase, bien que vraie, lui paraît toujours étrange.

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