Radio-Canada Info

Le blues des snowbirds

- Olivier Bourque

Aux États-Unis, l’inflation frappe fort, plus qu’ici. En septembre, elle a atteint 8,2 % chez nos voisins du Sud contre 7 % au Canada au mois d’août. Pour le sud de la Floride, dans la région de Miami et de Fort Lauder‐ dale, la hausse a même été de 10,7 % sur un an.

Tout a augmenté. Le der‐ nier ouragan a aussi eu un im‐ pact, les gens ont vidé les bouteilles d’eau et le papier toilette. Même pour l’électrici‐ té, la facture a augmenté, ex‐ plique Denise Dumont, rédac‐ trice en chef du Soleil de la Floride, lors d’une entrevue avec Radio-Canada.

En moyenne, les Floridiens payent 125 $ US par mois en électricit­é, ce qui est 13 % plus élevé que la moyenne natio‐ nale. Et le prix devrait encore augmenter l’année prochaine.

On ne se chauffe pas comme au Québec, mais on se climatise. Donc, on ressent aussi la hausse des prix, rap‐ pelle Mme Dumont.

Malgré le contexte finan‐ cier plus serré, les touristes qui fuient l'hiver devraient ar‐ river en masse lors des pro‐ chaines semaines. Ils sont 250 000 provenant du Qué‐ bec, 900 000 du Canada.

Ceux qui possèdent une propriété auront moins d’im‐ pact que ceux qui louent pour quelques mois. Mais j’ai l’im‐ pression que les gens vont faire attention à leur argent. Ils feront des activités qui ne coûtent rien, comme aller à la plage, dans les parcs; les gens vont changer leurs habitudes, dit-elle.

C’est d’ailleurs ce que pré‐ voit faire Danielle Nolin et son conjoint Serge Bouchard, qui demeurent à Naples, sur la côte ouest de la Floride.

Ça fait deux ans et demi que nous ne sommes pas al‐ lés à notre condo. Donc, on ne sait pas trop à quoi s’at‐ tendre. On a des appréhen‐ sions. Mais ce qu’on se dit, c’est que les restaurant­s sont moins chers qu’au Québec. On va trouver des aubaines. On a beaucoup d’amis, on se fait des soupers communau‐ taires. On va faire plus de BBQ sur le bord de la piscine!, ra‐ conte-t-elle, en riant.

Un huard déplumé

Comme beaucoup de voyageurs migrateurs, Mme Nolin surveille les mou‐ vements du dollar canadien et achète du billet vert lorsque le taux de change est favorable. Actuelleme­nt, le huard est à son plus bas, aux environs de 72 cents US. Il y a un an, il était à 81 cents US.

À la fin de l’été, on a chan‐ gé du dollar canadien, il était à 79 cents. Faut toujours pré‐ voir cela, dit-elle.

C’est également le cas de son ami Claude Lévesque qui demeure lui aussi à Naples. Il possède des comptes améri‐ cains et a anticipé les mouve‐ ments du huard. Je regarde le dollar canadien tous les jours! C’est devenu une habitude, explique-t-il.

Mais il y a toutefois des choses qui ne peuvent se contrôler, comme les oura‐ gans qui ont frappé la Floride lors des dernières années.

Depuis Irma, nos frais d’as‐ surance ont doublé. On peut s’attendre à une nouvelle hausse l’an prochain, c’est à voir, explique M. Lévesque.

Selon lui, le prix demeure toutefois acceptable. Pour une copropriét­é à 300 000 $, il en coûte entre 700 $ à 1000 $ annuelleme­nt. On fait plus at‐ tention à notre argent. On va moins au restaurant au Qué‐ bec, on va faire la même chose aux États-Unis, dit-il.

Prix à la location en forte hausse

Les embûches seront tou‐ tefois plus importante­s pour les nouveaux touristes hiver‐ nants ou ceux qui veulent vi‐ siter la Floride quelques se‐ maines et louer une proprié‐ té.

Tout le monde veut venir ici. Pendant la pandémie, on a eu ceux qu’on a appelé les ré‐ fugiés COVID, des gens qui fai‐ saient du télétravai­l de la Flo‐ ride. C’est sûr que ces gens re‐ tournent au bureau, mais l’at‐ trait de la région demeure im‐ portant, explique Guylaine Fontaine, une agente immobi‐ lière établie dans la région de Fort Lauderdale.

L’an passé, la Floride a d’ailleurs connu le flux migra‐ toire le plus important des

États-Unis avec un ajout de tout près de 260 000 per‐ sonnes, selon le Bureau du re‐ censement des États-Unis. Ré‐ sultat, le marché immobilier a surchauffé. En juin dernier, le prix des propriétés avait grim‐ pé de près de 30 % sur un an, un sommet aux États-Unis.

Nous travaillon­s seule‐ ment sur des locations de 12 mois. Mais ceux qui veulent venir un mois, deux mois, ils doivent trouver sur des sites comme Kijiji. Et le prix est très élevé. Avant, on pouvait en trouver pour 3000 $ par mois. Maintenant, c’est 4500 $. Et des choses qu’on pouvait avoir sur le bord de la mer, maintenant tu vas payer plus cher à côté du Turnpike, explique Mme Fon‐ taine.

Nuitées plus chères

Pour ceux qui sont à la re‐ cherche de nuitées dans les hôtels, la situation n’est guère plus reluisante. En raison de l’ouragan Ian qui a détruit la région de Fort Myers, dans le golfe du Mexique, beaucoup ont réservé sur la côte est.

Ceux qui n’ont pas trouvé d’appartemen­ts ou de loyers jusqu’à maintenant, ça risque d’être très dispendieu­x et dif‐ ficile à trouver, prévoit Denise Dumont.

Cette dernière constate aussi que certains snowbirds qui repartiron­t au Québec du‐ rant le temps des Fêtes veulent louer leur maison ou leur condo sur Airbnb.

On ne voyait pas cela avant, c’est quelque chose de complèteme­nt nouveau. Les gens veulent avoir plus de re‐ venus, explique-t-elle.

Malgré tout, Claude Lé‐ vesque ne changerait pour rien au monde sa routine afin d’échapper à l’hiver québé‐ cois. On a une belle qualité de vie. Je marche mon 10 kilo‐ mètres trois fois par semaine, je vais nager tous les matins une heure, assure-t-il, la voix souriante.

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