Cabinet de Danielle Smith : des ténors du parti et des opposants à l’ex-chef Jason Kenney
Nassima Way, Bassirou Bâ Le nouveau Cabinet de la première ministre alber‐ taine, Danielle Smith, compte 24 membres, dont plusieurs ténors du Parti conservateur uni, ainsi que des opposants acharnés à l'ex-premier ministre Jason Kenney.
Travis Toews reprend le portefeuille des Finances, qu’il a dû quitter lorsqu’il s’est lan‐ cé dans la course à la chefferie du Parti conservateur uni.
Il n’est pas le seul rival de Danielle Smith dans la course à la direction du parti à obte‐ nir un ministère. Parmi les six aspirants, seule Leela Aheer n'accède pas au Cabinet.
Rebecca Schulz devient mi‐ nistre des Affaires municipales et remplace Ric McIver, qui n'est plus dans le Cabinet.
Rajan Sawhney revient au conseil des ministres albertain comme ministre du Com‐ merce, de l’Immigration et du Multiculturalisme. Le minis‐ tère qu'il dirigeait avant d'en‐ trer dans la course à la cheffe‐ rie du parti est confié à Devin Dreeshen, qui devient mi‐ nistre du Transport et des Corridors économiques. De‐ vin Dreeshen avait quitté le Cabinet de Jason Kenney dans la controverse l’an dernier pour se concentrer sur son bien-être.
Todd Loewen, un autre excandidat à la chefferie et grand critique de Jason Ken‐ ney - au point d'avoir été ex‐ pulsé du parti en 2021 - ob‐ tient le portefeuille de la Fo‐ resterie, des Parcs et le Tou‐ risme.
Retour aussi du grand rival de Jason Kenney lors de la première course à la chefferie du PCU : Brian Jean entre au Cabinet et sera à la tête du ministère du Travail, de l’Éco‐ nomie et du Développement du Nord.
Un certain changement … une certaine stabilité
Danielle Smith a tout de même nommé une vingtaine de ministres qui faisaient ou ont fait partie du Cabinet de Jason Kenney, que ce soit en tant que ministre ou secré‐ taire parlementaire.
Elle a notamment gardé des proches politiques de l’an‐ cien premier ministre, dont Adriana LaGrange à l’Éduca‐ tion, Jason Copping à la Santé et Tyler Shandro à la Justice.
La composition du Cabinet représente un certain change‐ ment, mais quand même une certaine stabilité, estime Fré‐ déric Boily, professeur en sciences politiques au Cam‐ pus Saint-Jean de l'Université de l'Alberta.
Considérant la première semaine et les premiers mo‐ ments qui ont été très diffi‐ ciles, même chaotiques, pour Danielle Smith, la composition de ce Cabinet-là montre un autre visage, un visage un peu plus compétent. [...] La com‐ position du Cabinet est quand même assez habile avec des représentations ré‐ gionales assez équilibrées, conclut Frédéric Boily.
Peter Guthrie, un des dé‐ putés des régions qui avaient demandé la démission de Ja‐ son Kenney, fait son entrée dans le Cabinet en tant que ministre de l’Énergie, un poste occupé par Sonya Savage de‐ puis les élections provinciales en 2019. Cette dernière de‐ meure au Conseil des mi‐ nistres, Danielle Smith lui ayant confié le ministère l’En‐ vironnement et des Zones protégées.
Jason Nixon, qui a été mi‐ nistre de l’Environnement, puis ministre des Finances en remplacement de Travis Toews, n’a aucun portefeuille ministériel. Danielle Smith l'a toutefois nommé à la tête du Comité d’orientation du Cabi‐ net sur l’abordabilité et les services publics.
Son frère, Jeremy Nixon, devient ministre des Aînés, des Communautés et des Ser‐ vices sociaux.
Danielle Smith a aussi créé un ministère de la Sécurité publique, qui sera dirigé par Mike Ellis, un ancien agent de la police de Calgary.
Un pari risqué?
Professeure de sciences politiques à l’Université de Calgary, Lisa Young croit que la présence importante d’an‐ ciens membres du gouverne‐ ment Kenney dans le nou‐ veau Cabinet, dont certains ont été reconduits aux mêmes postes qu’ils occu‐ paient auparavant, peut être une source de problème pour la nouvelle première ministre.
En maintenant de nom‐ breux anciens ministres à leurs postes, la première mi‐ nistre pourrait avoir des diffi‐ cultés à changer significative‐ ment de cap par rapport aux politiques du Cabinet sortant, prévient-elle.
Sa collègue Lori Williams, de l’Université Mount Royal, souligne pour sa part la mo‐ deste représentation des femmes dans le nouveau conseil des ministres, soit 5 sur 25 ministres, en comptant Danielle Smith elle-même. Elle relève également, à cet égard, le retrait du portefeuille de la Condition féminine du nou‐ veau Cabinet.
La politologue interprète par ailleurs la nomination de l’ancienne ministre de l’Éner‐ gie, Sonya Savage, à la tête du ministère de l’Environnement et des Zones protégées, comme une façon pour Da‐ nielle Smith d’envoyer un si‐ gnal sur la priorité qu’elle ac‐ corde à l'énergie au détriment des enjeux environnemen‐ taux.
L’opposition officielle, for‐ mée par le Nouveau parti dé‐ mocratique (NPD), estime pour sa part qu’il n’y a pas grand-chose à attendre du nouveau gouvernement.
Les changements appor‐ tés aujourd'hui au cabinet de
Danielle Smith signifieront très peu [de choses] pour les Albertains, urbains ou ruraux, écrit la cheffe néo-démocrate Rachel Notley dans un com‐ muniqué, en ajoutant que rien, dans ce cabinet, ne sug‐ gère un changement par rap‐ port aux préoccupations des Albertains.
Inquiétudes des franco‐ phones
Il n'y a plus de poste de se‐ crétaire parlementaire de la Francophonie. De ce fait, la Francophonie albertaine relè‐ verait du ministère de la Culture, qui sera désormais dirigé par Jason Luan, un mi‐ nistre qui ne parle pas fran‐ çais.
Réagissant à la suppres‐ sion de ce poste, l’Association canadienne-française de l'Al‐ berta (ACFA) dit s'en inquiéter, puisqu’au fil des ans, il a per‐ mis une avancée significative dans la mise en oeuvre de la Politique en matière de fran‐ cophonie, écrit-elle dans un communiqué.
Pour l’ancienne directrice générale du Secrétariat fran‐ cophone du gouvernement albertain, Cindie Leblanc, bien qu’il soit décevant que le se‐ crétariat parlementaire de la Francophonie n’ait pas été maintenu, il n’y a rien de pré‐ occupant.
Ce n’est pas la première fois qu’on a un ministre [re‐ présentant la Francophonie] qui ne parle pas français, rap‐ pelle-t-elle. Elle ajoute que l’avantage pour la Francopho‐ nie albertaine d'être représen‐ tée par un ministre est que celui-ci siège au conseil, là où les décisions se prennent.
Selon Mme Leblanc, il vaut mieux attendre de connaître les nouvelles directives de la première ministre en matière de Francophonie et de voir si son gouvernement est dispo‐ sé à poursuivre et à bonifier ce qui a déjà été entrepris en la matière par le Cabinet sor‐ tant.
Le nouveau Cabinet de Danielle Smith
vice-premier ministre et ministre des Métiers spéciali‐ sés et des Professions : Kay‐ cee Madu
vice-premier ministre et ministre des Infrastructures : Nathan Neudorf
président du Conseil du Trésor et ministre des Fi‐ nances : Travis Toews
ministre du Travail, de l'Économie et du Développe‐ ment du Nord : Brian Jean
ministre de la Justice : Tyler Shandro
ministre de la Santé : Jason Copping
ministre l’Énergie : Pete Guthrie
ministre de l’Environne‐ ment et des Zones protégées : Sonya Savage
ministre des Technologies et de l’Innovation : Nate Glu‐ bish
ministre de l’Abordabilité et des Services publics : Matt Jones
ministre des Affaires muni‐ cipales : Rebecca Schulz
ministre du Transport et des Corridors économiques : Devin Dreeshen
ministre de la Sécurité pu‐ blique : Mike Ellis
ministre de l’Agriculture et l’Irrigation : Nate Horner
ministre de la Foresterie, des Parcs et du Tourisme : Todd Loewen ministre du Commerce, de l’Immigration et du Multicul‐ turalisme : Rajan Sawhney
ministre de l’Éducation : Adriana LaGrange
ministre de l’Éducation su‐ périeure : Demetrios Nico‐ laides
ministre de Services Alber‐ ta et de la Réduction de la bu‐ reaucratie : Dale Nally
ministre des Relations au‐ tochtones : Rick Wilson
ministre des Aînés, des la Communauté et des Services sociaux : Jeremy Nixon
ministre des Services à l’en‐ fance : Mickey Amery
ministre de la Santé men‐ tale et de la Dépendance : Ni‐ cholas Milliken
ministre de la Culture : Ja‐ son Luan