Des candidats républicains à l’assaut du système électoral américain
Depuis presque deux ans maintenant, nombreux sont les républicains qui croient encore que l’élec‐ tion présidentielle de 2020 qui a porté Joe Biden au pouvoir était truquée et qu’il y a eu une fraude élec‐ torale massive.
Même après des dizaines et des dizaines de décisions de tribunaux – certains même présidés par des juges répu‐ blicains qui ont rejeté toutes ces allégations –, ils conti‐ nuent de nier les résultats.
En Arizona, les postes de gouverneur, de secrétaire d’État mais aussi de sénateur et de procureur général sont convoités par ces négation‐ nistes de l’élection de 2020.
À l’extérieur du centre sportif d'un quartier de ban‐ lieue de Phoenix, en Arizona, on peut entendre une mu‐ sique qui ressemble étrange‐ ment à celle des rassemble‐ ments de Donald Trump. Mais ce soir, les partisans font la file pour venir écouter non pas l’ex-président, mais bien Kari Lake, la candidate répu‐ blicaine au poste de gouver‐ neure de l’État.
Parmi ses fans, Joel Lang est venu avec ses deux en‐ fants pour qu’ils voient, dit-il, leur future gouverneure. Elle est tellement énergisante et si intelligente, lâche-t-il, enthou‐ siaste.
Kimberly Klaus, qui se défi‐ nit comme une vraie électrice de droite, votera Kari Lake puisqu’elle est soutenue par Donald Trump.
Prenant place au centre du ring de boxe qu’elle a installé au milieu de la salle, cette an‐ cienne lectrice de nouvelles du réseau Fox, en Arizona, discute avec un médaillé olympique et champion de lutte UFC devant cette petite foule conquise d’avance.
Elle connaît toutes les fi‐ celles du métier de la commu‐ nication et aborde tous les thèmes chers au parti de Trump. De Dieu qui l’a pous‐ sée à se lancer en politique, de l’importance de sauver l’Arizona aux prises avec une frontière poreuse et confron‐ tée à une épidémie de dépen‐ dance au fentanyl, de la né‐ cessité de dénoncer les fake news, mais aussi du thème central qui fait partie des dis‐ cours de près de 300 candi‐ dats qui briguent des postes le 8 novembre : le vol de l’élec‐ tion de 2020.
Entendez par là qu’elle fait partie de ceux qui colportent cette théorie d'une fraude massive qui aurait causé la défaite de Trump il y a deux ans. Une théorie fallacieuse, puisque tous les faits et tous les recours devant les tribu‐ naux ont démontré le contraire.
Dans sa dernière publicité contre les candidats proTrump apologistes de l’élec‐ tion volée, le comité d’action politique Republican Accoun‐ tability Project, un groupe de républicains et de conserva‐ teurs outrés des positions des politiciens de la trempe de MAGA, estime que si Kari Lake devient gouverneure, ce sera dangereux pour la démocra‐ tie.
C'est quelqu'un qui a dit que si elle avait été gouver‐ neure à l'époque en 2020, elle n'aurait pas certifié les résul‐ tats des élections, explique Gunner Ramer, directeur poli‐ tique de l’organisation. Di‐ manche, elle a refusé de dire si elle accepterait le résultat des élections si elle ne gagnait pas en novembre. Et je pense que c'est vraiment inquiétant.
Rien pour empêcher les militants de Kari Lake de se retrouver pour faire du porteà-porte pour elle. Bien au contraire. Blake Marnell a fait plus de six heures de route depuis San Diego pour venir lui donner un coup de main. Lui qui vit en Californie, un État qui, selon lui, est déses‐ pérément bleu démocrate, tient à ce que l’État voisin, l’Arizona, redevienne rouge ré‐ publicain.
Croit-il donc fermement que l’élection de 2020 a été volée?
Il y a eu des irrégularités. Est-ce qu’elles étaient assez nombreuses pour dire que l’élection était truquée? C'est difficile à dire. Mais je crois que la fraude qui a eu lieu s'est déroulée d'une manière vraiment indétectable.
Même son de cloche de la part de Charlotte Loetz, une professeure de français à la re‐ traite. Est-ce que vous croyez que l'élection a été volée? je demande. Ah, bien sûr. Oui, bien sûr. Je crois que les vérifi‐ cations ont prouvé qu’il y avait beaucoup d’irrégularités.
Elle arbore fièrement une casquette au nom de Mark Finchem, un républicain qui veut devenir le secrétaire d’État de l’Arizona.
La particularité de ce can‐ didat, c’est qu’il a mené toute sa campagne sur le thème de la fraude électorale.
Les preuves sont là, dit-il, si vous prenez la peine de re‐ garder. Mais les médias re‐ fusent de le voir, martèle-t-il, même si les preuves de tels méfaits sont toujours atten‐ dues.
Son combat n’a rien d’anecdotique pour lui, puisque le 6 janvier 2021, il était aux premières loges de l’assaut contre le Capitole. Il représentait, dit-il, ses com‐ mettants qui étaient inquiets des irrégularités observées lors du scrutin de novembre 2020.
Les irrégularités mention‐ nées par le candidat Finchem sont négligeables, selon Gun‐ ner Ramer, du groupe Repu‐ blican Accountability Project.
Ce candidat au poste de secrétaire d'État dirigeait vrai‐ ment cet effort. Mais en fin de compte, si vous regardez tous les recomptages qu'ils ont faits en Arizona, ils ont trouvé des quantités minimes de fraude électorale.
Ce qui inquiète davantage Anna Massoglia, directrice des enquêtes à Open Secrets, qui retrace les financements dou‐ teux en politique, c’est la pro‐ venance des sources occultes qui financent ces campagnes de négationnistes des résul‐ tats de l’élection de 2020.
Cette vérification des ré‐ sultats, qui a été en partie ef‐ fectuée à l'insistance des ré‐ publicains du Sénat de l’État, a également été financée par des fonds extérieurs et ali‐ mentée par des groupes comme America Project et d'autres négationnistes qui versaient de l'argent de dona‐ teurs anonymes ou connus pour vraiment faire monter ces tensions, semer la zizanie et vraiment créer un doute sur les résultats de ces élec‐ tions.
Sur les presque 300 candi‐ dats qui mettent de l'avant dans leur campagne la théorie erronée de l'élection volée de 2020 et qui sont tous soute‐ nus par Trump se trouvent, en fait, un bon nombre de candidats au poste de secré‐ taire d’État comme Mark Fin‐ chem. Un poste-clé pour la certification des élections.
Les bureaux du secrétaire d'État attirent probablement le plus l'attention à travers le pays, constate Anna Masso‐ glia, en raison de leur capacité à superviser les élections où ils auront ce contrôle sur la vérification du vote, sur une grande partie de ce ministère des élections et sur le dé‐ compte des électeurs. Donc, mettre ces personnes en place avant les élections de 2024 peut avoir un impact si‐ gnificatif.
Si les républicains rem‐ portent les postes-clés de gouverneur, de procureur gé‐ néral, de secrétaire d’État et peut-être même de sénateur le 8 novembre, ils auront ainsi toutes les cartes en main pour décider de la certifica‐ tion des résultats de l’élection présidentielle de 2024.
Face à Kari Lake, il y a bien son opposante démocrate, Kathie Hobbs, qui est l’an‐ cienne secrétaire d'État de
l’Arizona, mais sa campagne est bancale et ses appuis sont en chute dans les sondages.
Elle a même refusé de par‐ ticiper à un débat avec la can‐ didate républicaine, ce qui a donné une autre occasion à Kari Lake de ridiculiser son opposante.
Si vous avez trop peur de vous tenir sur la scène du dé‐ bat avec moi, alors comment allez-vous vous opposer aux narcoterroristes qui intro‐ duisent du fentanyl? Com‐ ment allez-vous lutter contre ces gens qui essaient de faire un lavage de cerveau à nos enfants?
Pour les partisans de Kari Lake comme Kimberley Claus, la victoire semble donc assu‐ rée pour sa candidate préfé‐ rée. Le contraire sentirait évi‐ demment la fraude électorale.
Si elle perd, alors c'est un gros point d'interrogation. Nous savons que Katie n'a même pas fait campagne, elle ne veut même pas ce poste, alors pourquoi quelqu'un vo‐ terait-il pour quelqu'un qui ne veut même pas travailler? Il n'y a donc pas vraiment de possibilité que Katie Hobbs gagne.