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L’histoire d’un vétéran ontarien au coeur d’un film tourné en Normandie

- Julien Sahuquillo

Après avoir écrit un livre racontant comment Jim Parks et son régiment des Winnipeg Rifles ont libéré le village de Putot-en-Bes‐ sin, près de Caen en Nor‐ mandie, à la suite du dé‐ barquement, l’auteur et historien français Frede‐ rick Jeanne prépare un film sur l’histoire de ces soldats.

Le projet est l’oeuvre de passionnés qui veulent faire vivre et durer l’histoire cana‐ dienne du débarqueme­nt du 6 juin 1944.

J’ai rencontré Jim quand j’avais 21 ans lors de mon voyage à Winnipeg en 2008 pour les 125 ans des Royal Winnipeg Rifles. Il était venu de Mount Albert en Ontario. Nous avons passé beaucoup de temps ensemble dans les archives. Il est venu ensuite en Normandie et nous avons été sur le champ de bataille, explique Frederick Jeanne.

Lui et son associatio­n de passionnés d’histoire cana‐ dienne viennent de finir de tourner la première partie d’un film racontant les ex‐ ploits et les moments difficiles de jeunes Canadiens envoyés au front à des milliers de kilo‐ mètres de chez eux en 1944.

C’était une discussion entre copains dans un bar. On s’est dit qu’on pourrait en faire un film, ce serait extraordi‐ naire. On a commencé avec rien et aucune connaissan­ce de tout ce qu’il fallait pour faire un film, raconte-t-il.

C’est une adaptation d’un premier travail qui a vu le jour sous la forme d’un livre, Hold the Oak Line, le fruit de son voyage en 2008 à Winnipeg puis d’un second en 2011 où il a amassé de nombreux té‐ moignages et documents.

C’est un film de 52 minutes [le standard français de film documentai­re pour la télévi‐ sion, NDLR]. C’est un film avec des gens en costumes qui re‐ jouent les scènes, mais avec des voix hors champ, ex‐ plique-t-il.

Un livre, ça attire des gens qui sont déjà intéressés par l’histoire. Un film a plus de chances d’intéresser plus de monde, dit-il.

Jim Parks vit maintenant une vie paisible de retraité en Ontario. Lorsqu’il ne porte pas ses insignes, rien ne laisse deviner qu’il a participé à un des événements majeurs du XXe siècle.

Pourtant, comme c'est le cas pour beaucoup de vété‐ rans, la mémoire du débar‐ quement et des semaines qui ont suivi restent gravées dans sa mémoire.

Notre bateau a été touché et on a dû aller à l’eau. Je m’en souviens encore. On devait arriver deux minutes avant l’infanterie. On avait deux bulldozers qui devaient dé‐ blayer les obstacles. Je ne me souviens même plus si l’eau était froide. On n'a pas dû penser à ça sur le moment. C’était huit jours avant que je fête mes 16 ans , raconte-t-il comme si c’était hier.

Je m’en souviens bien parce que ça m’est arrivé à l’adolescenc­e. C’est un âge où on est très impression­nable et les choses nous marquent, ajoute-t-il. Il avait réussi à se faire enrôler avec son frère à peine plus âgé, alors qu’ils n’avaient pas l’âge requis. Des deux, seul Jim rentrera vivant au pays.

Entre Frederick Jeanne et Jim Parks, c’est un lien fort qui s’est bâti au fil des ans. L’au‐ teur qui a été piqué par le goût de l’histoire voit le Cana‐ dien comme un grand-père un peu spécial.

Jim a été l’un de ceux qui ont pu s’en sortir. Il a été bles‐ sé, mais il a pu s’en sortir. Le jour du débarqueme­nt, il était parmi les premiers et il a sau‐ vé de nombreux partenaire­s, précise l’historien qui travaille aujourd’hui pour un musée sur le débarqueme­nt.

Depuis son jeune âge, il est passionné par cette histoire. Il a grandi à Rots à 5 km de Pu‐ tot-en-Bessin où tous les combats des Winnipeg Rifles se sont déroulés.

Les Winnipeg Rifles, on a eu notre Q.G. pour quelques jours dans le village. Je pense que c’est fantastiqu­e qu’on en fasse un film. Avec toutes les technologi­es qu’on a au‐ jourd’hui c’est bien qu’il n’en‐ terre pas l’histoire, mais qu’il la diffuse. Quand ils verront ça, ils pourront se dire, '' si ça ne s’était pas passé, je ne se‐ rais pas là aujourd’hui.'' [Fre‐ derick] vit sur place. Il va faire des images magnifique­s, s’en‐ thousiasme Jim Parks.

L’équipe française a déjà tourné la première partie du film. Les parties trois et quatre doivent être tournées en mai. Quant à la deuxième partie, cela est prévu en sep‐ tembre ou octobre de l’année prochaine.

Et l’équipe de bénévoles a réuni déjà plus de 70 per‐ sonnes et compte augmenter ce nombre pour les pro‐ chaines scènes. Ces dernières sont faites dans le souci du moindre détail.

On a refait faire des chaus‐ sures au Pakistan comme celles de l’époque, on les a fait ferrer comme à l’époque. Les Canadiens avaient des chaus‐ sures particuliè­res. Personne n’a touché d’argent. Ce ne sont que des amis, des gens qu’on connaît, qui ont acheté leur casque, leur veste, les in‐ signes. Ils font déjà de la re‐ constituti­on historique , pré‐ cise l’initiateur du projet.

Le but de ces passionnés est de sortir le film en mai 2024 avant le 80e anniver‐ saire du débarqueme­nt en Normandie.

On recherche encore de l’argent pour faire ce film, mais on ne cherche pas à en tirer profit. Le film sera mis à dispositio­n gratuiteme­nt pour les écoles. On essaye de le vendre à Netflix ou autre, mais l’argent servira à des évé‐ nements de commémorat­ion ou des musées. On ne veut pas faire de l’argent avec l’his‐ toire canadienne, conclut Fre‐ derick Jeanne.

Avec des informatio­ns de Farrah Merali de CBC

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