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Le nombre de surdoses mortelles demeure élevé dans le Nord ontarien

- Miguelle-Éloïse Lachance

Malgré une tendance à la baisse dans certaines com‐ munautés du Nord de l’On‐ tario à l’image du reste de la province, le taux de sur‐ doses mortelles causées par la consommati­on d’opioïdes demeure relati‐ vement élevé dans la ré‐ gion, surtout à Thunder Bay et dans le Grand Sud‐ bury.

Par exemple, à Thunder Bay, il y a eu 127 surdoses mortelles, confirmées ou pré‐ sumées, entre juillet 2021 et juin 2022.

Cela représente un taux d'environ 80 surdoses mor‐ telles par 100 000 habitants, soit quatre fois la moyenne ontarienne.

Les autorités sanitaires avaient recensé 94 décès par surdoses d'opioïdes dans le district de Thunder Bay pour la période entre juillet 2020 et juin 2021.

La tendance récente dans le district de Thunder Bay a été plutôt à la baisse entre oc‐ tobre 2021 et juin 2022, après un sommet de 22 surdoses mortelles en septembre 2021.

En 2018 et 2019, il y avait en moyenne moins de quatre surdoses mortelles par mois dans la région de Thunder Bay.

Dans le Grand Sudbury, le printemps 2022 a vu une di‐ minution marquée compara‐ tivement à l’hiver qui a précé‐ dé.

Il y a eu 35 surdoses mor‐ telles sur le territoire de Santé publique Sudbury et districts entre janvier et mars et 21 entre avril et juin.

Des pas dans la bonne direction

Roland Dutrisac, infirmier hygiéniste en santé mentale et dépendance pour Santé publique Sudbury et district, espère que la tendance obser‐ vée au printemps se poursui‐ vra.

Il croit que la levée des res‐ trictions sanitaires et l’aug‐ mentation de l’accès aux ser‐ vices pour les toxicomane­s a contribué à faire diminuer le nombre de décès.

Cynthia Olsen, la directrice de la stratégie antidrogue de Thunder Bay, croit aussi que l’assoupliss­ement des me‐ sures sanitaires a pu avoir un

effet positif sur les habitudes de consommati­on. Les orga‐ nismes qui offrent des ser‐ vices de proximité sont com‐ plètement de retour.

Elle ajoute que la distancia‐ tion sociale, pour prévenir la transmissi­on de la COVID-19, a eu un effet négatif sur les personnes qui consomment des drogues, car ils courent plus de risque en étant seuls.

M. Dutrisac souligne l’ou‐ verture récente du centre temporaire de consommati­on supervisée de Sudbury.

C’est un service que nous avons ici et qui peut aider à faire baisser le nombre de dé‐ cès reliés à l'empoisonne­ment par opioïdes.

Karla Ghartey est étu‐ diante au doctorat en santé publique à l’Université de To‐ ronto et cofondatri­ce de la Société temporaire de préven‐ tion des surdoses de Sudbu‐ ry.

Elle note que plusieurs autres initiative­s ont été lan‐ cées dernièreme­nt ou sont en développem­ent, dont l’ajout de lits à North Bay pour le traitement des dépendance­s.

Ce sont des pas dans la bonne direction. Mais nous sommes toujours dans une crise sanitaire.

Karla Ghartey, étudiante au doctorat en santé pu‐ blique à l’Université de Toron‐ to

La question qu’on doit se poser c’est "pourquoi?", af‐ firme-t-elle. Pourquoi les chiffres augmentent ou dimi‐ nuent-ils ? C’est une question centrale pour bien com‐ prendre ce qui se passe.

Mme Ghartey, qui est aus‐ si professeur­e en soins infir‐ miers au Collège Cambrian, af‐ firme qu’il y a toujours une crise concernant la contami‐ nation des drogues qui cir‐ culent dans la province.

Nous continuons de mili‐ ter pour un approvisio­nne‐ ment de drogues plus sûres. Les gens ne savent pas ce que les drogues qu’ils achètent contiennen­t.

Il faut mieux comprendre selon Karla Ghartey ce qui mène les consommate­urs à utiliser des drogues même s’ils sont conscients des risques, et s’attaquer aux pro‐ blèmes sous-jacents à la toxi‐ comanie.

Elle dit que les problèmes d’accessibil­ité au logement et l’inflation peuvent aussi avoir une influence sur la crise des opioïdes.

À Thunder Bay, Cynthia Ol‐ sen abonde dans le même sens, et ajoute que la préven‐ tion est essentiell­e.

Les experts interrogés prônent une approche axée sur la réduction des méfaits des drogues, en collaborat­ion avec les personnes qui les uti‐ lisent, plutôt qu’une attitude répressive.

La guerre contre les drogues ne fonctionne pas, a déclaré Mme Ghartey.

Roland Dutrisac ajoute pour sa part qu'il faut éviter de stigmatise­r les personnes qui consomment des opioïdes. Les mots et les gestes ont un grand impact. [...] C'est important de dé‐ montrer de la compassion.

Avec les informatio­ns de Bienvenu Senga

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