Promesses rompues et grands remous pour Doug Ford à Queen’s Park
Le gouvernement Ford vient de boucler six se‐ maines de travaux parle‐ mentaires qui ont donné lieu à une série de projets de loi controversés. Les progressistes-conserva‐ teurs quittent maintenant Queen's Park pour la pause hivernale, mais plusieurs dossiers chauds pourraient revenir les hanter au re‐ tour des Fêtes.
Doug Ford et son équipe n'ont certainement pas chô‐ mé cet automne : nouveaux pouvoirs octroyés à certains maires, changements aux re‐ devances d'aménagement pour accélérer les projets im‐ mobiliers. Les progressistesconservateurs ont adopté plusieurs lois controversées, dont la plupart portent sur le logement.
Les débats se sont dérou‐ lés à une vitesse fulgurante, parfois sans consultation. Mais l’ampleur de la crise le justifie, selon Doug Ford. Tout l’automne, il a répété ad nau‐ seam qu’il faut bâtir des mai‐ sons afin d'atténuer la crise du logement. Pour ce faire, il a même proposé d'empiéter sur la ceinture de verdure. Le premier ministre avait pour‐ tant promis qu’il ne touche‐ rait pas à cette précieuse zone protégée après y avoir briève‐ ment songé en 2018.
Doug Ford veut atteindre ses objectifs, coûte que coûte, quitte à déplaire à cer‐ tains.
Geneviève Tellier, polito‐ logue, Université d'Ottawa
La politologue Geneviève Tellier a été frappée par la ra‐ pidité avec laquelle le gouver‐ nement Ford a fait progresser ses dossiers prioritaires. On peut se demander s'il n'y a pas des décisions trop précipi‐ tées qu'il faudra réparer plus tard, souligne-t-elle.
Le premier ministre a en effet sorti plusieurs lapins de son chapeau dans les derniers mois. Les progressistesconservateurs n’ont jamais mentionné en campagne élec‐ torale qu’aussitôt élus, ils chambouleraient les règles de la majorité aux conseils muni‐ cipaux de Toronto et d’Otta‐ wa.
La pilule aurait peut-être été plus facile à avaler si les nouveaux pouvoirs confiés aux maires avaient fait partie de la plateforme électorale de Doug Ford.
Bras de fer avec le mi‐ lieu scolaire
Geneviève Tellier parle spontanément du conflit avec les travailleurs de l’éducation lorsqu’on lui demande de choisir le moment marquant de l’automne en politique on‐ tarienne. L’imposition d’un contrat de travail grâce à la disposition de dérogation a créé une commotion, et ce, bien au-delà des frontières provinciales.
Le mauvais calcul politique du gouvernement Ford dans ce dossier est assurément un constat d’échec, selon la poli‐ tologue. Doug Ford espérait éviter toute perturbation en classe en jouant dur avec les syndiqués. Au final, des mil‐ liers d’élèves ont perdu des journées d’école.
J’ai pas l’impression qu’on est dans la leçon apprise, on est encore dans la confronta‐ tion, prévient Geneviève Tel‐ lier. Doug Ford saura-t-il contrôler son côté belliqueux pour la suite de son mandat? Son premier test sera face aux enseignants de la province, qui sont toujours en train de renégocier leur convention collective. Pour l’heure, le pre‐ mier ministre et son ministre de l’Éducation semblent déjà adopter un ton plus conci‐ liant, mais l’escalade des ten‐ sions n’est pas impossible.
Son revers en justice sur la constitutionnalité du projet de loi 124 qui plafonne les sa‐ laires dans le secteur public pourrait aussi donner lieu à des prises de bec. Dans ce dossier, Doug Ford semble déterminé à poursuivre la ba‐ taille.
Une nouvelle cheffe pour la nouvelle année
Les néo-démocrates re‐ viendront à l'Assemblée légis‐ lative avec un nouveau visage pour les diriger. Tout indique que la députée torontoise Marit Stiles –seule candidate dans la course à la chefferie du parti– prendra les rênes du caucus. Elle succédera à l'an‐ cienne cheffe Andrea Hor‐ wath une fois que les membres du parti auront confirmé son couronnement. Une formalité.
La vraie course, c’est celle pour défaire Doug Ford en 2026.
Marit Stiles, cheffe dési‐ gnée du Nouveau Parti démo‐ cratique
Son arrivée à la tête du parti s'inscrit dans la continui‐ té. Son leadership ne devrait pas offrir un grand contraste avec celui de sa prédéces‐ seure.
Reste à savoir si Marit Stiles tentera un rapproche‐ ment avec le milieu ouvrier, une frange du parti qui s'est sentie délaissée par le NPD dans les dernières années. A priori, la nouvelle cheffe n’a pas de liens naturels avec les cols bleus; elle représente une circonscription du centre-ville de Toronto et non une zone industrielle. Elle a certaine‐ ment plus d’affinités avec le milieu scolaire qu’avec les tra‐ vailleurs d’usine.
Chose certaine, les pro‐ gressistes-conservateurs n’ont pas perdu de temps avant de passer en mode at‐
taque. De toute évidence, per‐ sonne ne s'intéresse à la course à la chefferie du NPD ou à ses politiques. L'acclama‐ tion de Marit Stiles est une approbation des mêmes poli‐ tiques que les Ontariens ont fermement rejetées le 2 juin , peut-on lire dans le communi‐ qué envoyé par le Parti pro‐ gressiste-conservateur.
La route demeure longue pour Marit Stiles et les oranges. D’ici le scrutin de 2026, elle devra se faire connaître du grand public, mobiliser ses sympathisants et rallier de nouveaux élec‐ teurs à sa cause. Des tâches qui auraient toutes été plus faciles si une course au leader‐ ship plus relevée avait eu lieu.