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Recours à l’aide médicale à mourir : le Québec au premier rang dans le monde

- Davide Gentile, Daniel Boily

Le Québec répond désor‐ mais à plus de demandes d’aide médicale à mourir (AMM) que la Belgique et les Pays-Bas. Entre avril 2021 et mars 2022, 5,1 % des décès dans la pro‐ vince ont découlé de la pro‐ cédure légalisée en 2015. Une tendance à la hausse qui se poursuit toujours.

Le nombre de personnes ayant eu recours à l’aide mé‐ dicale à mourir explose de‐ puis le début de la pandémie : il est passé de 1774 en 20192020 à 3663 en 2021-2022.

Le président de la Com‐ mission des soins de fin de vie, le Dr Michel Bureau, ex‐ plique que ces données placent le Québec au premier rang dans le monde à ce cha‐ pitre.

Au Québec, c'est 5,1 % des décès qui [résultent de] l'aide médicale à mourir. Aux PaysBas,

c'est 4,8 % des décès, et en Belgique, c'est 2,3 %.

Dr Michel Bureau, pré‐ sident de la Commission des soins de fin de vie

Le Dr Bureau se dit étonné par l’augmentati­on rapide du nombre de demandes d’AMM au Québec. Selon lui, cette croissance pourrait s’expli‐ quer par le fait que l'aide mé‐ dicale à mourir est présentée aux patients comme un soin, et non comme une euthana‐ sie.

Cette hausse pourrait-elle témoigner de dérapages dans l’applicatio­n des normes éta‐ blies?

Pas du tout. Les Québé‐ cois qui reçoivent l'aide médi‐ cale à mourir sont en fin de vie. Ils ont des souffrance­s qui ne peuvent être apaisées et répondent à tous les critères, répond le Dr Bureau. La Com‐ mission des soins de fin de vie analyse toutes les demandes d’aide médicale à mourir pour s'assurer qu'elles soient conformes à la loi.

Et les médecins sont aussi de plus en plus nombreux à l’administre­r. La RAMQ a vu bondir de 28 % le nombre de médecins qui lui ont facturé au moins un acte en lien avec une demande d'aide médicale à mourir en 2021-2022. La ma‐ jorité d'entre eux ont adminis‐ tré l'AMM plus d'une fois au cours de cette période.

Des disparités régio‐ nales importante­s

La proportion de décès suivant une demande d'aide médicale à mourir varie gran‐ dement d’une région à l’autre au Québec. Dans Lanaudière et dans le Bas-Saint-Laurent, près de 9 % des personnes décédées en 2021-2022 ont reçu l'AMM. À Montréal, c’est moins de 4 %.

Le taux d'acceptatio­n des demandes d’aide médicale à mourir varie aussi énormé‐ ment d’une région à l’autre. Par exemple, dans Chaudière-Appalaches, 98 % des patients qui formulent une demande d'AMM y accèdent. À Québec, cette proportion baisse à 75 % et, à Montréal, elle glisse à 54 %.

Une différence qui n’a pas de lien avec la langue mater‐ nelle des patients ou des mé‐ decins, puisque les données sont sensibleme­nt les mêmes d’est en ouest dans la métro‐ pole.

Est-ce que le fait qu'il y ait plus de spécialist­es sur l’île de Montréal fait en sorte qu'on poursuit les traitement­s plus longtemps? Je n'en sais rien, dit le Dr Michel Bureau.

Avant la pandémie, le Col‐ lège des médecins craignait que le manque de soins pallia‐ tifs amène des patients à op‐ ter pour l’aide médicale à mourir.

Mais la Commission des soins de fin de vie estime que cette crainte n’est pas fondée. Selon son président, la pro‐ portion de décès découlant de l’aide médicale à mourir continuera possibleme­nt à augmenter.

Il faut se préparer à ce que la croissance de l'aide médi‐ cale à mourir se poursuive, af‐ firme le Dr Bureau. Parce que l'année [2022-2023] est déjà très engagée, et la tendance se maintient.

Une évolution surpre‐ nante pour bien des méde‐ cins. En 2016, l’ancien ministre de la Santé Gaétan Barrette ne pensait pas qu’on se diri‐ geait vers une croissance ef‐ frénée.

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