Une « nouvelle » liste d’attente pour les places en garderie au Québec
Sainte-Julie a longtemps été surnommée la « ville de la famille », rappelle fiè‐ rement son ancienne mai‐ resse, Suzanne Roy. Elle a fait le saut en politique municipale alors qu'elle était mère de jeunes en‐ fants, il y a plus de 20 ans.
Aujourd’hui « mamie », la ministre Roy est convaincue d’avoir l’expérience profes‐ sionnelle et personnelle pour son ultime défi : trouver une place en garderie aux 37 000 enfants toujours sur la liste d’attente au Québec.
Il faut avoir complété le ré‐ seau d’ici la fin du mandat, dans quatre ans, explique Su‐ zanne Roy dans sa première entrevue à Radio-Canada.
Bien qu’elle salue le travail de son prédécesseur Mathieu Lacombe, la nouvelle ministre reconnaît qu'il reste encore beaucoup à faire. Depuis que le « Grand chantier pour les familles » a été lancé, il y a un an, beaucoup de données ont circulé concernant la création de places. Difficile, donc, de s’y retrouver dans ce plan d’ac‐ tion.
Suzanne Roy affirme que 8940 nouvelles places ont été créées en une année, mais on est encore loin du compte. Il faut continuer la construc‐ tion. On parle de 30 000 places dans les CPE et de 52 000 à 55 000 conversions de places non subvention‐ nées en places subvention‐ nées.
Objectif : une politique nationale
Suzanne Roy veut notam‐ ment se concentrer sur une politique nationale pour mettre fin au far west dans l’attribution des places, un irri‐ tant majeur pour de nom‐ breux parents.
Selon une enquête menée par l’Institut de la statistique du Québec, près de la moitié d'entre eux, soit 47 %, af‐ firment que leurs recherches pour trouver une garderie a été « assez » ou « très » diffi‐ cile. Une situation également décriée par la vérificatrice gé‐ nérale du Québec, Guylaine Leclerc.
Le site La Place 0-5 a fait l’objet de toutes les critiques ces dernières années. Comme il s’agit du seul guichet d’accès aux services de garde au Qué‐ bec, les prestataires ont l’obli‐ gation légale d’y recourir ex‐ clusivement pour combler leurs places, mais plusieurs d’entre eux ont contourné l'obstacle en donnant des places à des enfants non ins‐ crits. Pendant ce temps, de nombreux parents attendent, dans l’absence de suivi.
Il y avait des politiques d’admission différentes d’un centre de la petite enfance à un autre et d’un bureau coor‐ donnateur à un autre, ex‐ plique la ministre Roy. Nous, on veut avoir une politique nationale d’admission avec les mêmes règles pour tout le monde.
Il faut savoir où on se trouve dans la liste d’attente; on saura alors quand ça va être possible d’avoir une place. Les parents vont savoir où ils sont rendus dans la file pour tel service de garde, par exemple. Ça va être extrê‐ mement sécurisant pour eux.
Suzanne Roy, ministre de la Famille du Québec
Deux ans pour créer la « nouvelle » liste d’attente
La nouvelle ministre se donne deux ans pour mettre en place la nouvelle liste d’at‐ tente. Déjà, le guichet unique Place 0-5 a été rapatrié au mi‐ nistère de la Famille, il y a en‐ viron un mois. Une nouvelle équipe comprenant 27 per‐ sonnes-ressources a ainsi été constituée, notamment pour le service à la clientèle.
Les comités coordonna‐ teurs dans les régions vont étudier de façon plus détaillée où sont réellement les be‐ soins, où il y a une mouvance et où il faut prévoir, précise Suzanne Roy.
Par exemple, si on a une grande entreprise qui ouvre dans une municipalité avec 2000 emplois, on peut s’at‐ tendre à ce qu’il y ait une de‐ mande de services de garde supplémentaires dans cette région-là. On peut mieux pla‐ nifier nos choses. La liste va nous le permettre.
Suzanne Roy, ministre de la Famille du Québec
Le ministère compte sur l’afflux de données pour lui permettre d’étudier la mobili‐ té des familles et de mieux dé‐ finir leurs besoins. La date de naissance de l’enfant sera utili‐ sée comme référence pour l’inscription. En ce moment, des femmes enceintes s’ins‐ crivent avec une date ap‐ proximative d’accouchement, par crainte de ne pas obtenir de place à temps.
Avec une véritable liste d’attente, ça va nous per‐ mettre aussi d’avoir une pon‐ dération pour que les enfants plus vulnérables y aient accès eux aussi. Ça va être plus transparent, ajoute Mme Roy. Radio-Canada rapportait ré‐ cemment que le ministère de la Famille élabore actuelle‐ ment une grille de points afin de définir un ordre de priorité pour les enfants. Ceux qui sont handicapés ou défavori‐ sés seraient privilégiés à l’ins‐ cription.
Des solutions en atten‐ dant
En attendant la construc‐ tion parallèle de nouveaux CPE, la ministre compte sur deux avenues : la création de places temporaires et la conversion de places non subventionnées en places subventionnées à contribu‐ tion réduite.
Plus de 2000 enfants ont pu trouver une place dans la dernière année grâce à des lo‐ caux temporaires aménagés par une municipalité, par exemple. Il s’agit de locaux gé‐ néralement plus petits, mais conformes en matière de san‐ té et de sécurité. Les enfants y sont accueillis plus tôt que prévu par des éducatrices pendant que leur CPE est en construction.
La ministre Suzanne Roy mise aussi beaucoup sur la conversion des places. Ce sont des parents qui payaient jusqu’à 70 $ par jour et là ils vont payer une contribution réduite, affirme-t-elle. On gagne de 12 à 24 % de places qui n’étaient pas occupées parce que c’était trop coûteux pour les parents.
Pour arriver à ses objectifs, Suzanne Roy se dit consciente d’un défi majeur : la pénurie