Taxes foncières en forte hausse : des industriels et commerçants des Îles résignés
Aux Îles-de-la-Madeleine, industriels et commer‐ çants se résignent à la forte augmentation de leur taux de taxe foncière, imposée par la Municipali‐ té étouffée par l’inflation.
Dans son budget pour l'année 2023 adopté mercredi soir, la Municipalité a dû aug‐ menter de 30 % le taux de taxe foncière des commerces et de 45 % celui des indus‐ tries.
La Chambre de commerce des Îles déplore une telle aug‐ mentation, car plusieurs en‐ treprises auront du mal à l’as‐ sumer, selon son directeur gé‐ néral Antonin Valiquette.
C’est très soudain et, histo‐ riquement, on n’a pas vu ça depuis longtemps, de telles augmentations. Déjà des aug‐ mentations des immeubles résidentiels, c’est assez rare, mais celle-là est quand même assez salée, raconte-t-il.
Le dirigeant comprend toutefois les impératifs finan‐ ciers qui obligent la Municipa‐ lité à agir ainsi, dans un contexte économique infla‐ tionniste.
La solution, c’est que tout le monde y mette du sien. On n’a pas le choix de voir des augmentations de taxes et des dépenses. N'oublions pas qu’une hausse de taxe fon‐ cière pour les commerces sera inévitablement refilée en grande partie à la clientèle, prévient-il.
Tout le monde fait sa part.
Antonin Valiquette, direc‐ teur général de la Chambre de commerce des Îles
C'est pourquoi Antonin Va‐ liquette se porte à la défense de la Municipalité des Îles et demande à Québec d'interve‐ nir.
La Municipalité des Îles nous l’a démontré : ils ont fait des efforts, ils sont allés cher‐ cher dans des surplus accu‐ mulés. Ils sont allés chercher des redevances de l’éolien dans le budget pour minimi‐ ser l’augmentation de la taxe foncière, prend-il comme exemple.
Il rappelle que les revenus de l’État québécois ont aug‐ menté avec l’inflation, contrai‐ rement à ceux des municipali‐ tés.
Selon lui, le gouvernement québécois doit donc interve‐ nir, pour que ça ne soit pas seulement les citoyens, les commerces et les industries qui assument la facture avec leur compte de taxes, pour que ça ne soit pas seulement les Municipalités qui l’as‐ sument, mais aussi le gouver‐ nement du Québec.
Limiter la hausse pour les clients
Jean-Philippe Déraspe, pro‐ priétaire du Marché Bonichoix Boni D., trouve aussi cette augmentation élevée.
Son entreprise reçoit une quote-part des taxes fon‐ cières que paye le propriétaire de son local, le Centre com‐ mercial Place des Îles. L’entre‐ preneur anticipe aussi une hausse de son loyer et assure qu'il fera tout pour éviter de transmettre la facture à ses clients.
Ça n’aura pas un impact si‐ gnificatif sur notre capacité à fonctionner, mais c’est certain que ça nous enlève beaucoup de flexibilité, surtout avec la hausse de salaires qu’on a oc‐ troyée dans les dernières an‐ nées, rappelle-t-il.
L'entrepreneur demande aussi au gouvernement d'ai‐ der directement les municipa‐ lités et les entreprises à faire face à l'inflation.
On comprend la situation politique autour de cet enjeu. Les Municipalités ont montré qu’il y avait un besoin d’ou‐ verture du pacte fiscal. J’ai l’impression que la balle est dans le camp du provincial pour alléger les entreprises et les municipalités.
Il y a une responsabilité du gouvernement à intervenir.
Jean-Philippe Déraspe, pro‐ priétaire de Marché Bonichoix Boni D.
Frein à l’investissement
Pour le président de l'en‐ treprise Fruits de mer Made‐ leine, Eudore Aucoin, cette hausse représente des di‐ zaines de milliers de dollars de taxes supplémentaires, ce qui risque de mettre en péril ses projets de modernisation de l'usine.
On a l’usine, le terrain, un entrepôt, la poissonnerie. On a été obligés d’acheter des maisons pour pouvoir loger nos travailleurs étrangers temporaires. On peut s’imagi‐ ner ce que ça peut représen‐ ter comme montant, ex‐ plique-t-il, dépité.
Eudore Aucoin se range par ailleurs derrière la posi‐ tion de la Chambre de com‐ merce des Îles et demande au gouvernement de mettre en place une aide ponctuelle pour les municipalités.
Une aide nécessaire, se‐ lon le PLQ
Le Parti libéral du Québec demande au gouvernement de mettre en place rapide‐ ment une aide financière afin d'aider les municipalités à tra‐ verser l'inflation.
La porte-parole de l'oppo‐
sition officielle en matière d'affaires municipales, Virgi‐ nie Dufour, croit que l'exemple de la Municipalité des Îles-de-la-Madeleine dé‐ montre à quel point la fiscali‐ té municipale doit être revue.
Alors que l'inflation a de facto augmenté les revenus du gouvernement par la TVQ, les municipalités n'ont pas vu du tout cette augmentation là. Ils ont juste vu leurs dé‐ penses augmenter, mais pas leurs revenus.
L'opposition officielle de‐ mande aussi à Québec de bri‐ ser la dépendance des munici‐ palités à l'égard de la taxe fon‐ cière lors de la révision du pacte fiscal, qui aura lieu en 2024.