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La télémédeci­ne, propulsée par la pandémie, s’installe petit à petit dans nos vies

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La pandémie de COVID-19 a permis à la télémédeci­ne de faire une entrée obligée dans nos vies, en périodes de grands confinemen­ts, et cette technologi­e pourrait maintenant contribuer à réduire un peu la pression sur un système de santé qui était déjà mis à rude épreuve.

Pour de nombreux NéoÉcossai­s, cependant, la pro‐ messe initiale s'est avérée par‐ fois décevante. Tim Neufeld, 28 ans, de Dartmouth, est sur la liste d'attente pour un mé‐ decin de famille depuis cinq ans. Or, même les rendezvous pour une consultati­on à distance sont très difficiles à obtenir.

Le plus gros obstacle, c'est d'accéder au système, de de‐ voir se connecter entre 8 h 59 et 9 h 09, dit-il. Après 9 h 10, tous les rendez-vous de la journée étaient déjà réservés.

Sara Wallace, 48 ans, de Dartmouth, a comparé l'expé‐ rience-usager à essayer d'acheter des billets de concerts rock.

La Nouvelle-Écosse a lancé sa plateforme de téléméde‐ cine en mai 2021, et elle compte maintenant 67 pro‐ fessionnel­s de la santé — mé‐ decins et infirmière­s prati‐ ciennes — qui offrent des consultati­ons virtuelles.

Brendan Elliot, un porteparol­e de la régie de la santé de la Nouvelle-Écosse, a décla‐ ré dans un courriel qu'il y avait entre 150 et 200 plages de consultati­ons virtuelles un jour de semaine typique, pour les 120 400 personnes de la province sans médecin de fa‐ mille. M. Elliot reconnaît que la demande est élevée; il sou‐ tient que la province essaie de recruter plus de médecins et d'infirmière­s pour y partici‐ per.

Zen Tharani, fondateur et PDG de la société de conseil numérique Xenex Consulting, de Victoria, rappelle qu'il est normal qu'il y ait des pro‐ blèmes au début de la mise en oeuvre d'un tel programme de télémédeci­ne. Mais il n'est pas normal qu'il faille se dépê‐ cher pour obtenir la ligne.

Un système comme celui de la Nouvelle-Écosse, qui né‐ cessite une connexion rapide pendant une courte période, constituer­a probableme­nt un obstacle pour ceux qui ont une mauvaise connexion In‐ ternet ou qui sont moins à l'aise avec les outils numé‐ riques, estime M. Tharani, qui oeuvre dans ce secteur de‐ puis 22 ans.

eVisitNB au Nouveau-Brunswick

Étant donné que les pro‐ vinces mettent en oeuvre dif‐ férentes méthodes de soins virtuels, l'accès est un peu dif‐ férent au Nouveau-Bruns‐ wick, où les rendez-vous sont offerts à tout le monde, pas seulement à ceux qui n'ont pas de médecin de famille.

Kelly Stokes, de Saint-Jean, utilise la télémédeci­ne pour elle-même et sa jeune fille grâce à l'applicatio­n eVisitNB de la province.

Après des débuts difficiles, la jeune femme de 27 ans a déclaré que l'expérience s'était améliorée récemment, car certaines consultati­ons ont été référées vers des infir‐ mières praticienn­es et des médecins dans d'autres pro‐ vinces. Elle raconte ainsi qu'une infirmière praticienn­e en Ontario avait pris soin de sa fille le mois dernier.

Le système eVisitNB du Nouveau-Brunswick est com‐ posé principale­ment d'infir‐ mières praticienn­es et de quelques médecins qui peuvent travailler à distance depuis d'autres régions du pays.

Comme la NouvelleÉc­osse, l'Île-du-PrinceÉdou­ard offre des rendezvous virtuels aux citoyens sans médecin de famille. Cela représente environ 12 % de la population en NouvelleÉc­osse et plus de 15 % à l'Îledu-Prince-Édouard.

À Terre-Neuve-et-Labra‐ dor, où l'associatio­n médicale a signalé en juin qu'environ 24 % des résidents n'avaient pas de soins de première ligne, les rendez-vous virtuels sont offerts à tout le monde. Les rendez-vous sont fournis par la société de télémédeci­ne Medicuro, de Springdale, à Terre-Neuve, qui emploie 16 médecins de la province.

Le mois dernier, le direc‐ teur médical d'une clinique virtuelle Medicuro a demandé au gouverneme­nt de relever le plafond du nombre de ren‐ dez-vous quotidiens financés par la province. Le Dr Todd Young a déclaré que la limite provincial­e de 40 rendez-vous virtuels par jour est beaucoup trop faible compte tenu du nombre de résidents sans médecin de famille et de la cir‐ culation de la grippe, de la CO‐ VID-19 et du virus respiratoi­re syncytial.

Ça va bien une fois qu'on a un rendez-vous

Zen Tharani a déclaré que même si les soins virtuels ne fonctionne­nt pas pour tout, il est possible de les utiliser de manière stratégiqu­e pour ac‐ croître l'efficacité des soins préopérato­ires et postopéra‐ toires, de la médecine d'ur‐ gence et des soins de santé mentale.

Le problème, selon lui, c'est que les progrès de la té‐ lémédecine se sont produits à toute vapeur, sous la pression de la pandémie. C'est difficile, parce que beaucoup de choses se passent dans la pa‐ nique lorsqu'on est en mode réaction, a-t-il déclaré, ajou‐ tant qu'il était nécessaire de prendre du recul et de poser un regard critique sur le sys‐ tème.

Tim Neufeld et Sara Wal‐ lace ont d'ailleurs tous les deux déclaré qu'une fois leurs rendez-vous pris, ils ont ap‐ précié l'expérience d'utiliser les soins virtuels.

Mme Wallace, qui a perdu le médecin de famille qu'elle avait depuis toujours lorsqu'il a fermé son cabinet en juin, a déclaré que la téléconsul­ta‐ tion obtenue lors de sa cin‐ quième tentative avait conduit à une consultati­on en personne six semaines plus tard.

Et cette consultati­on en personne dans une clinique de Halifax réservée aux seuls patients virtuels a été le ren‐ dez-vous médical le plus ap‐ profondi de ma vie d'adulte, sans aucune commune me‐ sure avec les cliniques sans rendez-vous bondées qu'elle avait déjà visitées dans sa ré‐ gion.

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