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Médecin itinérant depuis 53 ans à Amos, le Dr Messier prend sa retraite

- Martin Guindon Travail d’équipe

Après avoir fait la navette entre Montréal et Amos pendant 53 ans, le Dr Mi‐ chel Messier tire sa révé‐ rence à l'âge de 82 ans.

En 1969, le médecin psy‐ chiatre montréalai­s a partici‐ pé à la mise sur pied du dé‐ partement de psychiatri­e à l’Hôpital d’Amos, avec le Dr Roger Leduc et soeur Ro‐ lande Dupré. Il a largement contribué à y implanter un modèle de psychiatri­e com‐ munautaire qui prévaut en‐ core aujourd’hui.

Autrement dit, on mettait l’accent sur les services à ca‐ ractère communauta­ire à do‐ micile, dans des lieux com‐ muns à tout le monde. L’hôpi‐ tal avait sa place, bien enten‐ du, la consultati­on externe aussi, mais on ne cherchait pas à tout faire à l’intérieur d’un séjour hospitalie­r, ex‐ plique le Dr Messier.

Au fil des années, le service interne de psychiatri­e est d’ailleurs passé de 22 à 8 lits à l’Hôpital d’Amos.

L’hôpital, il faut que tu t'en serves comme endroit qui ac‐ cueille des gens qui ont des besoins aigus, ponctuels, pour de courts séjours. Le reste du temps, il faut aider les gens à bien vivre dans leurs familles, dans leur job, avec leurs amis, dans la socié‐ té dont ils font partie, prône le médecin psychiatre qui pra‐ tiquait aussi à l’Hôpital Dou‐ glas de Montréal.

Cette approche s’appuie davantage sur l’expertise des médecins omnipratic­iens et des autres profession­nels de la santé, ce qui a permis au Dr Messier de pratiquer à dis‐ tance, en venant à Amos sur une base d’abord hebdoma‐ daire, puis aux deux se‐ maines, sans relâche… pen‐ dant 53 ans.

C’est une manière de tra‐ vailler en équipe qui est valo‐ risante, qui est appréciée. Moi, j’ai beaucoup de plaisir à faire ça. Ça me permet de limi‐ ter l’importance de mon rôle, parce qu’il y a bien du monde capable de prendre des res‐ ponsabilit­és à part entière. Alors, même si je ne suis pas là, ça ne veut pas dire que ça s’arrête là, souligne-t-il.

Une marque de confiance stimulante pour les équipes en place, comme en témoigne l’infirmière à la retraite Gay‐ tane Trudel, qui a oeuvré une vingtaine d’années dans l’équipe du Dr Messier.

Les profession­nels qui ont travaillé avec lui, ce qu’on a apprécié, c’est la confiance qu’il nous faisait et le respect qu’il avait pour les connais‐ sances qu’on avait. C'est ce qui nous a fait aimer travailler avec ce gars-là, en plus de la passion. C’est un homme pas‐ sionné par son travail et par la clientèle. Tout est fait en fonc‐ tion de la clientèle.

Gaytane Trudel

L'infirmière à la retraite ajoute que le Dr Messier s’est toujours montré disponible pour son équipe et pour les patients. Même durant la pandémie, alors qu’il avait donné son numéro de télé‐ phone à ses clients, puisqu’il ne pouvait plus se déplacer.

Attaché aux gens

Quand on évoque le fait qu’il s’est déplacé aussi sou‐ vent durant toutes ces an‐ nées, Michel Messier n’y voit pas un exploit particulie­r.

Quand ça fait partie du pro‐ gramme d’activités, je n’ai ja‐ mais trouvé ça exigeant au sens de pénible, répond-il.

L’autre affaire, c’est que je me suis aussi fait des amis. La directrice des soins infirmiers m’a présenté son mari qui est chasseur. J’ai alors commencé à aller à la chasse avec lui et ça fait 45 ans qu’on va à la chasse ensemble. Donc, ça s’est ajouté au fil des années et ça fait que même si je ne re‐ viendrai plus travailler à Amos, je vais revenir pour des raisons sociales et amicales, aller à la pêche et à la chasse, et je vais avoir le temps, se ré‐ jouit-il.

À la blague, le Dr Messier reconnaît qu’il est 17 ans en retard sur l’âge de la retraite, mais il croit que l’heure est ve‐ nue, alors qu’il est encore en bonne santé physique et psy‐ chologique.

Ça m’a pris du temps avant de me décider parce que primo, je me demandais ce que j’étais pour faire si je ne faisais plus de psychiatri­e. Et deuxièmeme­nt, j’étais attaché aux gens, et ça, c’est impor‐ tant. Mais là, je pense que c’est le temps que j’arrête, ra‐ conte-t-il.

L’esprit tranquille

Et le médecin psychiatre se dit plutôt rassuré quant à la suite des choses. Il prépare ses clients à son départ de‐ puis sept mois et il part l’es‐ prit tranquille.

Je ne peux pas dire que je suis inquiet. On l’est toujours un peu, parce que lorsque tu es le moteur de quelque chose ou l’animateur privilé‐ gié, c’est sûr que ton départ fait une différence. Mais en même temps, tous les gens avec qui j'ai travaillé, qui sont autour de moi, ils travaillen­t avec moi de la façon dont je travaille et ils aiment ça. Pour‐ quoi tout ce monde change‐ rait tout d’un coup? Parce que je pars? Mais non, ça ne marche pas comme ça, as‐ sure-t-il.

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