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Densifier la ville tout en évitant les tours à condos

- Avec les informatio­ns de Gabrielle Proulx.

Peut-on densifier la ville de façon « intelligen­te » afin de freiner l'étalement ur‐ bain sans que cela im‐ plique la constructi­on de grandes tours à condos ? Plusieurs experts réflé‐ chissent à de nouveaux modèles permettant de conjuguer qualité de vie, durabilité et esthétisme.

La densificat­ion urbaine est au coeur de la nouvelle Po‐ litique nationale de l'architec‐ ture et de l'aménagemen­t du territoire, adoptée le 6 juin dernier par le gouverneme­nt Legault, mais la mise en oeuvre se fait attendre.

Bien que de nombreuses institutio­ns, comme la Chambre de commerce du Montréal métropolit­ain, ap‐ pellent à une densité intelli‐ gente pour Montréal, force est de constater qu'en 20 ans, la région métropolit­aine a perdu de sa densité. Moins de personnes occupent désor‐ mais un plus grand espace en zone urbaine.

La densificat­ion demeure pourtant le mode de crois‐ sance urbaine le plus durable. Elle permet notamment d’op‐ timiser l’espace disponible au développem­ent sans empié‐ ter sur les zones agricoles. Le GIEC a d'ailleurs identifié la densificat­ion urbaine comme une solution à la crise du cli‐ mat.

Repenser les maisons unifamilia­les

Pour Kim Pariseau, archi‐ tecte et fondatrice d'Appareil Architectu­re, il est impératif qu'élus et experts collaboren­t en amont pour bien planifier les routes, les accès piéton‐ niers, les transports collectifs et les services de proximité avant de penser la construc‐ tion d'habitation­s, ce qui n'est pas le cas aujourd'hui, selon l'experte.

En ce moment, on ne peut pas dire [aux gens] : "prenez les transports collectifs" quand ça ne fonctionne pas bien. Pour amener une cer‐ taine densité et favoriser la densité intelligen­te, il faut que les gens puissent utiliser des services communs efficaces, affirme Mme Pariseau.

Avec son équipe d'archi‐ tectes, Mme Pariseau veut notamment s'attaquer à l'éta‐ lement urbain en revisitant le modèle des maisons unifami‐ liales et en développan­t des solutions novatrices. Par exemple, au lieu de faire 250 maisons, avec une entrée chacune, on a pris trois mai‐ sons, puis on les a collées en‐ semble : une seule entrée, un seul lieu commun, illustre-telle. À la place d'avoir trois salles de bain dans une mai‐ son, est-ce qu'on ne peut pas plutôt en avoir deux ? Une à l'étage et une au rez-dechaussée, ajoute Kim Pari‐ seau.

La meilleure solution, c'est encore de venir à même la densité de votre petite mai‐ son, puis de dire peut-être que ça peut devenir un es‐ pace multigénér­ationnel, un espace qui est utilisé par deux familles, ou d'utiliser l'arrièrecou­r comme un logement.

Kim Pariseau, fondatrice d'Appareil Architectu­re

Prendre le temps

Ce n'est pas une simple mode, c'est une nécessité en‐ vironnemen­tale, une nécessi‐ té économique, de mieux faire avec nos villes et notre territoire, croit, de son côté, Christian Savard, directeur gé‐ néral de l'organisme Vivre en ville.

Selon l'organisme, densi‐ fier ne rime donc pas avec constructi­on de hautes tours à condos. Pour une densité intelligen­te, il faut être pa‐ tient, car cela prend du temps d'aménager un espace agréable à vivre. Mais le résul‐ tat en vaut la chandelle, d'après M. Savard.

Le Plateau, Rosemont, on disait que c'était tout pareil, que c'était uniforme et froid. Mais lorsqu'on vient y ajouter des parcs, que les arbres de‐ viennent matures, lorsque le temps fait son oeuvre, on voit que ça s'améliore.

Christian Savard, directeur général de Vivre en ville

Le Plateau-Mont-Royal est l'un des quartiers les plus denses de Montréal, mais il n'y a quasiment pas de tours.

Donner envie

Maisons ou tours, l'expert en urbanisme et chroniqueu­r à Radio-Canada Olivier Niquet pense qu'il s'agit de rendre les quartiers plus attractifs, es‐ thétiques et agréables à vivre pour retenir les résidents. Ce‐ la passe par des transports en commun efficaces, de la ver‐ dure, des parcs, des écoles et des services de proximité, c'est ce qui va faire que les gens vont apprécier la vie en ville. M. Niquet assure que ceux-ci n'auront pas envie d'aller vivre dans une ban‐ lieue éloignée, quand la quali‐ té de vie est au rendez-vous.

Je suis, moi aussi, attiré par une grande cour, une belle pelouse et une piscine. Tout le monde veut ça, mais le prix à payer pour en arriver là, c'est souvent, une heure, voire une heure et demie dans les trans‐ ports chaque jour, matin et soir. [...] Ça peut aussi être agréable de vivre en ville.

Olivier Niquet, diplômé en urbanisme et chroniqueu­r

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