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Chez le Canadien, c’est l’ère des communicat­ions

- Martin Leclerc

Parce que le mandat du sport profession­nel consiste à vendre de l’es‐ poir, il suffit parfois de mi‐ ser sur un bon plan de com‐ munication pour réconfor‐ ter la clientèle.

Mine de rien, le Canadien a bouclé l’année 2022 avec une fiche de 30-46-10, ce qui a valu aux hommes de Martin StLouis, selon la méthode de calcul embellie de la LNH, une moyenne de réussite de ,407. Le CH vient donc de connaître sa pire année depuis 1941, alors que la Seconde Guerre mondiale faisait rage et que la glorieuse époque des six clubs n’était pas encore com‐ mencée.

Si on analyse la dernière année du Canadien d’un point de vue communicat­ionnel, cette situation est particuliè‐ rement fascinante.

À pareille date l’an dernier, le CH était en quelque sorte à feu et à sang.

En plus d’avoir amorcé la saison sans son gardien nu‐ méro un et sans son capi‐ taine, sans oublier le départ du premier centre Phillip Da‐ nault pour Los Angeles, l’équipe était décimée par une invraisemb­lable cascade de blessures.

Pas moins de 11 joueurs de la Ligue américaine com‐ posaient la formation. Sami Niku, Kale Clague et Corey Schueneman formaient la moitié de la brigade défen‐ sive. Du côté de l’attaque, plus de la moitié des effectifs était composée de joueurs du Ro‐ cket de Laval comme Lukas Vejdemo, Jesse Ylonen, Alex Belzile ou Cameron Hillis.

Selon les notes de matchs de la ligue, la formation du dé‐ but de 2022 était encore plus jeune que celle sur laquelle mise présenteme­nt le Cana‐ dien.

Et Dominique Ducharme, qui n’avait pas encore cumulé une année d’expérience comme entraîneur-chef dans la LNH, se faisait joyeusemen­t ramasser sur la plupart des tribunes. On disait de lui que son système de jeu était mau‐ vais. Et parce qu’il n’était pas flamboyant durant ses points de presse, on lui reprochait de ne pas savoir communique­r avec ses joueurs et de nuire au développem­ent d’un jeune comme Cole Caufield. ***

Le 5 janvier 2022, le Cana‐ dien a annoncé la nomination de Chantal Machabée à titre de vice-présidente des com‐ munication­s. Cette embauche d’une personnali­té du monde des médias sortait drastique‐ ment des sentiers battus. Et elle a valu à l’organisati­on un très fort courant de sympa‐ thie, tant du côté des médias que de celui du public.

Deux semaines plus tard, ce fut au tour de Kent Hughes d’être embauché comme di‐ recteur général pour épauler le vice-président américain Jeff Gorton.

Hughes, un Québécois bi‐ lingue installé dans la région de Boston depuis plusieurs décennies, menait jusque-là une fructueuse carrière d’agent. Cette embauche aus‐ si était inorthodox­e. Peu connu du public, le nouveau DG du Canadien a immédiate‐ ment identifié les valeurs qu’il souhaitait implanter au sein de l’organisati­on. Et il a rapide‐ ment rehaussé le niveau de proximité avec les partisans en en multiplian­t les entre‐ vues.

Puis le 9 février, un peu plus de deux semaines après la nomination de Hughes, la nouvelle direction du Cana‐ dien a relevé Ducharme de ses fonctions et annoncé l’em‐ bauche de Martin St-Louis à titre d’entraîneur-chef par in‐ térim.

Formé à l’Université du Vermont (la même que Du‐ charme), St-Louis s’impose depuis comme le meilleur communicat­eur à avoir occu‐ pé les fonctions d’entraîneur­chef du Canadien. Combiné à son passé de supervedet­te et à son statut de membre du Temple de la renommée, cet atout s’est avéré extrê‐ mement puissant et utile pour lui. Les talents de com‐ municateur de St-Louis sont même parvenus à faire ou‐ blier son inexpérien­ce dans le métier.

Dès la première rencontre, son discours passionné et ses réflexions originales sur le ho‐ ckey ont conquis ses joueurs, les partisans et les représen‐ tants des médias.

Après la première confé‐ rence de presse de Martin StLouis, les partisans de l’équipe étaient littéralem­ent galvani‐ sés. Le nouvel entraîneur n’al‐ lait pas menotter ses joueurs dans un système rigide, disaiton. Il allait plutôt préconiser des concepts qui allaient leur permettre de s’exprimer et de maximiser leur talent.

En gros, le CH venait de dénicher le cerveau capable de résoudre la quadrature du cercle. Ou d’enseigner aux joueurs à amener leur game dans la game.

Incroyable­ment, 11 mois plus tard, la lune de miel de St-Louis ne s’étiole pas. À Montréal, dans un contexte perdant, c’est du jamais vu. ***

En 2022, le Canadien a pré‐ senté la 26e attaque de la LNH avec une moyenne de 2,84 buts marqués par match. L’année précédente, sous la gouverne de Ducharme, le Tri‐ colore avait figuré au 27e rang avec une moyenne de 2,56 buts par rencontre.

Désormais l’une des équipes les plus indiscipli­nées de la LNH, et avec dans sa for‐ mation une quantité appré‐ ciable de bois mort, le CH a bouclé l’année 2022 au 32e et dernier rang en défense, ac‐ cordant pas moins de 3,92 buts par rencontre.

Jake Allen et Samuel Mon‐ tembeault ont remporté cha‐ cun 13 victoires et ils ont res‐ pectivemen­t maintenu des moyennes d’efficacité de ,899 et ,895. L’année précédente, l’équipe occupait le 23e rang avec une moyenne de 3,18 buts accordés par rencontre.

Il est bon de souligner qu’en 2021, Carey Price avait dispu‐ té 25 des 89 matchs de l’équipe, au cours desquels il avait maintenu une moyenne d’efficacité de ,901. Pour sa part, Jake Allen avait obtenu 50 départs et maintenu une moyenne de ,905.

Quant aux unités spé‐ ciales, leur niveau de perfor‐ mance n’a pas vraiment chan‐ gé. L’avantage numérique du CH était 29e en 2021 avec un taux de réussite de 16,1 %. Il a chuté au 31e rang en 2022 avec une moyenne de succès de 15,4 %. Le désavantag­e nu‐ mérique est toutefois passé du 31e au 21e rang entre 2021 et 2022. Mais son taux d’effi‐ cacité s’est accru de seule‐ ment 0,9 %, passant de 75,7 % à 76,6 %.

Bref, d’une année à l’autre, on pourrait arguer que ce fut blanc bonnet et bonnet blanc. Pourtant, de façon générale, la plupart des gens sont convaincus que le Canadien est en bien meilleure posture qu’il ne l’était précédemme­nt.

Est-ce la réalité? Ou le mes‐ sage leur est-il simplement li‐ vré différemme­nt.

Désormais, il n’y a pas d’at‐ tente. Et chaque défaite est

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