Nouvellement installée au Québec, elle ne peut accéder à la propriété
Certains immigrants de‐ vront prendre leur mal en patience s’ils veulent accé‐ der à la propriété en sol ca‐ nadien : une nouvelle loi entrée en vigueur le 1er janvier interdit l’achat d’une propriété aux nonCanadiens pour les deux prochaines années.
Laurie Carbonara est direc‐ tement visée par cette législa‐ tion. Cette travailleuse de la santé a quitté la France pour le Québec au début de l'an‐ née 2022 avec l'intention de tout recommencer à l'étran‐ ger.
Si l’achat d’une maison fai‐ sait partie de ses plans, la nouvelle loi l’empêchera de réaliser cette ambition jus‐ qu’en 2025.
On est déçu parce qu’on se dit qu’on a tout quitté, ditelle. On nous accepte parce qu’il manque de maind'oeuvre, mais on nous em‐ pêche d’accéder à la proprié‐ té.
Mme Carbonara détient un permis de travail tempo‐ raire depuis mars 2022. Elle cherchait à devenir proprié‐ taire sur la Rive-Sud de Mont‐ réal, à Longueuil. Mais puis‐ qu’elle n’est ni citoyenne ni ré‐ sidente permanente, la Loi sur l'interdiction d'achat d'immeubles résidentiels par des non-Canadiens lui inter‐ dit d’acquérir une propriété résidentielle.
Le gouvernement prévoit des exceptions pour les diplo‐ mates et les réfugiés, ainsi que pour certains étudiants étrangers et les résidents temporaires qui ont déclaré leurs impôts au Canada pen‐ dant trois des quatre der‐ nières années.
Laurie Carbonara ne tombe dans aucune de ces ca‐ tégories.
Nous espérons nous éta‐ blir ici pendant longtemps, mais cette loi remet en cause notre immigration, se désolet-elle.
Contrer la spéculation
Le but avoué de la Loi sur l'interdiction d'achat d'im‐ meubles résidentiels par des non-Canadiens est de stabili‐ ser le marché immobilier au pays en freinant la spécula‐ tion immobilière.
Dans un communiqué, la Société canadienne d’hypo‐ thèques et de logements (SCHL) a qualifié de raison‐ nable la mesure du gouverne‐ ment fédéral.
La pénurie de logements fait en sorte que de nom‐ breux Canadiens peinent à se trouver un logis abordable, et les investissements étrangers spéculatifs sur le marché de l'habitation ont exacerbé ce problème, a déclaré Leonard Catling, porte-parole de la SCHL.
L'objectif de cette interdic‐ tion temporaire est de s'assu‐ rer que les logements servent à loger les Canadiens, au lieu de servir de placements spé‐ culatifs aux investisseurs étrangers.
Leonard Catling, porte-pa‐ role de la SCHL
Efficacité incertaine
David Wachsmuth est titu‐ laire de la chaire de recherche du Canada en gouvernance urbaine de l’Université McGill. Il s’attend à voir un recul de la part de résidences cana‐ diennes dans les mains d’in‐ vestisseurs étrangers.
Mais cette part était déjà minime , nuance l’expert. Je ne pense pas que cette décision aura des répercussions ma‐ jeures sur l'accessibilité au lo‐ gement au Canada, que ce soit dans un sens ou dans l'autre, précise-t-il.
De nombreux analystes du secteur immobilier abondent dans le même sens, que ce soit en raison de la petite part du marché accaparé par les acheteurs étrangers, ou en‐ core des exemptions dont certains pourront bénéficier.
Pour Brendon Ogmund‐ son, économiste en chef pour l’Association immobilière de la Colombie-Britannique, il s’agit davantage d’une mesure poli‐ tique que d’une politique éco‐ nomique.
Une grande partie du pu‐ blic a été convaincue au cours des dernières années que ce sont les investisseurs étran‐ gers qui font grimper les prix des maisons, plutôt que de s’attarder à la cause réelle, soit