Ottawa envisage de renforcer les règles de protection des passagers aériens
Après les annulations et re‐ tards de vols qui sont tom‐ bés en cascade pendant les Fêtes et ont laissé nombre de voyageurs démunis, Ot‐ tawa reconnaît que des améliorations s'imposent dans les demandes d'in‐ demnisation.
Les droits des passagers devraient revenir au centre des opérations des compa‐ gnies aériennes, a défendu le ministre fédéral des Trans‐ ports.
Je veux m'assurer que le système est solide et rigou‐ reux.
Omar Alghabra, ministre des Transports du Canada, en entrevue à CBC
Ce que nous recherchons en ce moment, c'est tout outil supplémentaire et toute amé‐ lioration que nous pouvons apporter au système pour faire en sorte que les compa‐ gnies aériennes soient beau‐ coup mieux préparées et que les droits des passagers soient au centre de leurs opé‐ rations, a-t-il ajouté, sans pré‐ ciser le contenu de ces chan‐ gements, ni leur aspect coerci‐ tif.
Parmi les récits de voyage les moins enviables, la passa‐ gère Chantale Lapointe a rap‐ porté une cinquantaine d'heures de retard avec Sun‐ wing et aucune mise à jour de son dossier de réclamation depuis.
Le système informatique de plainte de Sunwing ne fonctionne pas, volontaire‐ ment ou non, a témoigné la voyageuse désabusée. Je crois qu’il devrait y avoir un endroit où l’on pourrait remplir nos réclamations correctement, qu’on ne soit pas laissés à nous-mêmes.
Que dit la réglementa‐ tion?
Elle exige qu'une compa‐ gnie aérienne dédommage les passagers lorsqu'un vol est retardé ou annulé pour une raison attribuable à la compa‐ gnie.
En cas de retard dû aux conditions météorologiques, les compagnies aériennes sont tenues d'en informer les passagers et de leur proposer une nouvelle réservation.
S'ils ne peuvent pas être réacheminés dans les 48 heures, la compagnie aé‐ rienne est tenue de leur offrir un remboursement.
Une tempête de neige au Canada, un mois de dé‐ cembre, ce n’est pas une cir‐ constance extraordinaire! pointe Jacob Charbonneau, PDG de Vol En Retard, une en‐ treprise venant en aide aux passagers aériens en échange d’une commission sur les gains récupérés.
Démarches kaf‐kaïennes...
Pour espérer obtenir gain de cause, encore faut-il connaître ses droits...un fac‐ teur sur lequel jouent trop souvent les compagnies fau‐ tives, relève l’avocate Sylvie de Bellefeuille, conseillère budgé‐ taire et juridique à Option consommateurs.
Dans la mesure où les ré‐ clamations sont soumises in‐ dividuellement, les transpor‐ teurs font le pari (écono‐ mique) que seule une infime partie des passagers mènera les démarches à terme, ob‐ serve-t-elle.
Il y a des sanctions admi‐ nistratives qui sont prévues au niveau du règlement de protection des passagers, mais jusqu’à maintenant, elles n'ont pas été appliquées très très souvent et pas avec de gros montants, constate éga‐ lement Jacob Charbonneau, PDG de Vol En Retard.
Selon cet expert, la ténaci‐ té du plaignant finit par payer : il ne faut pas avoir peur de contester un premier refus, conseille-t-il. On le voit, les compagnies aériennes re‐ fusent systématiquement [d’indemniser] sachant que très peu de personnes vont se rendre aux prochaines étapes, parce que c’est long et fastidieux.
...et délais dissuasifs
Autre écueil : les délais de traitement à l'Office des transports du Canada (OTC) s’allongent à mesure que les recours se multiplient. Cet or‐ ganisme de réglementation est chargé de régler les diffé‐ rends entre les compagnies aériennes et les clients quand ces derniers s’estiment lésés.
Les données démontrent que les passagers sont de plus en plus nombreux à y avoir recours. En août 2022, l'arriéré des plaintes s'élevait à 18 200 dossiers. Il est passé à plus de 30 000 à la fin du mois de novembre.
Le gouvernement envi‐ sage justement de renforcer les règles afin que les plaintes contre les compagnies aé‐ riennes soient réglées avant de parvenir à l'OTC, a précisé le ministre Alghabra qui sou‐ haiterait que les compagnies aériennes soient davantage tenues d'indemniser les pas‐ sagers avant que ces derniers ne déposent plainte.
Actuellement, de nom‐ breux passagers ont l'impres‐ sion que la charge leur in‐ combe, a-t-il reconnu. Nous voulons nous assurer que nous mettons en place des règles pour garantir que la charge incombe plutôt à la compagnie aérienne.
Des responsables de l'OTC ont récemment mentionné à une commission parlemen‐ taire que certains plaignants pouvaient attendre jusqu'à 18 mois la résolution de leur cas.
Le PDG de Sunwing, Ste‐ phen Hunter, et son pré‐ sident, Len Corrado, ont pré‐ senté leurs excuses dans une lettre ouverte jeudi, à la suite de la débâcle des voyages pla‐ nifiés fin 2022. Ils ont assuré que l'entreprise acceptait les demandes de compensation admissibles.
Avec les informations de Camille Feireisen, de Stella Dupuy et de CBC