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Qu’est-ce qui attend le Parti républicai­n divisé?

- Louis Blouin

« Divisé », « l’air incapable de gouverner », le Parti ré‐ publicain a la gueule de bois, après une semaine chaotique à Washington. La prochaine élection pré‐ sidentiell­e (2024) n’est pas si loin. Le « Grand Old Par‐ ty » aura-t-il le temps de faire oublier les désaccords et de retomber sur ses pattes?

Entrevue avec un stratège républicai­n de l’Arizona, Brian Seitchik, qui a travaillé au sein des campagnes de Do‐ nald Trump en 2016 et 2020.

Quand vous regardez le Parti républicai­n actuelle‐ ment, qu’est-ce que vous voyez?

Je vois un parti très divisé. D’un côté, un groupe loyal à Donald Trump et, de l’autre, des élus qui rejettent la faute sur l’ancien président pour les résultats décevants lors des élections de mi-mandat en 2022, prêts à passer à autre chose.

Il y a des divisions au sein du caucus républicai­n au Congrès au sujet de possibles ententes avec les démocrates, de la tenue d’une enquête sur le clan Biden et de l’adoption de certains projets de loi. Ac‐ tuellement, il n’y a aucun plan pour avancer, ni de force uni‐ ficatrice. Espérons que la pro‐ chaine campagne présiden‐ tielle permettra d’allier le parti contre Joe Biden. Nous sommes encore loin de là.

Jusqu’à quel point les disputes internes, expo‐ sées au grand jour cette se‐ maine, sont-elles domma‐ geables pour le parti? Que laissent-elles entrevoir pour les travaux qui s’amorcent au Congrès et pour la prochaine prési‐ dentielle?

Ça augure mal. Des votes ardus s’en viennent dans ce 118e Congrès. L’élection du président aurait dû être le plus facile! Si c’est un avantgoût de ce qui s’en vient, ce sera un trajet mouvementé. Il y a le plafond de la dette, les enjeux à la frontière, la néces‐ sité pour les républicai­ns de générer des votes et celle de créer un environnem­ent hos‐ tile à Joe Biden. Mais nous ne pouvons même pas nous en‐ tendre sur un président de la Chambre!

Lors des élections de mimandat, plusieurs électeurs des banlieues, qui votent ha‐ bituelleme­nt républicai­n ou qui votent avec le parti sur des enjeux comme la fron‐ tière et l’inflation, ont choisi, cette fois, d’appuyer les dé‐ mocrates parce que c’était le chaos dans notre formation. Ils ne voient pas un parti ca‐ pable de gouverner ou de diri‐ ger le pays. L’épisode de la dernière semaine contribue à ce sentiment.

Franchemen­t, j’ai hâte à la campagne présidenti­elle où nous aurons l’occasion de nous unir contre Joe Biden et de démontrer que nous avons un plan. Ce n’est pas du tout ce que le Parti républi‐ cain a fait ces derniers jours.

Cette semaine, Donald Trump a demandé publi‐ quement aux élus républi‐ cains récalcitra­nts de se ranger derrière Kevin Mc‐ Carthy pour le poste de président de la Chambre. Sur le coup, son appel a été ignoré. Faut-il y voir une perte d’influence de l’an‐ cien président?

Je ne comprends pas pour‐ quoi il a décidé de s’en mêler. Certains de ses alliés les plus fidèles, comme Andy Biggs, Lauren Boebert et d’autres, ont tout simplement ignoré sa demande. C’était claire‐ ment un enjeu entre le caucus républicai­n et Kevin McCar‐ thy. Donald Trump n’a eu au‐ cune influence.

À une certaine époque, quand Trump disait : "Sautez", le caucus demandait : "À quelle hauteur?". Ce n’est tout simplement plus le cas actuel‐ lement.

Brian Seitchik, stratège ré‐ publicain

Faut-il en déduire que Donald Trump a perdu des plumes?

Absolument. Plusieurs per‐ sonnes ont mis en cause le

président Trump pour les ré‐ sultats décevants aux élec‐ tions de mi-mandat. Ajoutez à cela les multiples enquêtes le visant et un lancement de campagne terne en vue de 2024. On peut compter sur les doigts de la main ceux qui ont appuyé sa candidatur­e sur-lechamp. Comparez cela à la campagne de 2020 où les gens faisaient la file pour être dans son camp.

Il semble qu’appuyer Mc‐ Carthy était une erreur de sa part, au moment où il n’avait pas l’influence pour faire changer des votes.

Les récents sondages auprès des électeurs répu‐ blicains sont largement fa‐ vorables au gouverneur de la Floride, Ron DeSantis, dans une potentiell­e pri‐ maire républicai­ne en vue de 2024. Avez-vous l’impres‐ sion que les jeux sont faits?

Ce sera une bataille. Do‐ nald Trump a encore une base d’appuis assez solide. Les Trump ou rien [Trump or die] sont certaineme­nt pré‐ sents. En ce moment, la candi‐ dature de Ron DeSantis est un souhait en quelque sorte [aspiration­al]. Elle n’a pas en‐ core été annoncée. Il n’a tou‐ jours pas encaissé de coups.

À ce point-ci, Ron DeSantis est la solution de rechange conservatr­ice à Donald Trump. Il tente de plaire à tout le monde. Une cam‐ pagne va lui infliger des bles‐ sures. Personne ne sait com‐ ment ça va tourner. L’affron‐ tement ne sera pas beau.

* Certains propos ont été raccourcis ou modifiés à des fins de clarté et de concision.

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