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Les meilleurs salaires ne régleront pas la pénurie d’éducatrice­s en CPE

- Louis Gagné

Le ministère de la Famille (MFA) prépare une vaste of‐ fensive pour valoriser le métier d’éducatrice de la petite enfance auprès des futurs cégépiens et des personnes sans emploi ou en réorientat­ion de car‐ rière. Un signe que les hausses de salaire accor‐ dées par Québec ne per‐ mettront pas à elles seules de régler la pénurie de main-d’oeuvre dans le ré‐ seau éducatif des services de garde.

Le Centre d’acquisitio­ns gouverneme­ntales, l’entité qui fournit aux ministères et organismes publics les biens et services dont ils ont besoin dans l’exercice de leurs fonc‐ tions, a récemment publié un appel de propositio­ns pour le développem­ent d’une cam‐ pagne publicitai­re qui sera dé‐ ployée en 2023-2024.

L’agence qui sera retenue au terme du processus d’adju‐ dication de contrat bénéficie‐ ra d’un montant de 1 million de dollars pour la réalisatio­n du mandat, qui s’inscrit dans le cadre du Grand chantier pour les familles lancé en oc‐ tobre 2021.

37 000 nouvelles places

Afin de répondre aux be‐ soins actuels et à ceux décou‐ lant des 37 000 nouvelles places subvention­nées qu’il s’est engagé à créer, le gouver‐ nement Legault estime que 18 000 nouvelles éducatrice­s devront être embauchées d’ici 2026.

Malgré deux campagnes d’envergure déployées sur le web et à la télévision au cours des deux dernières années, Québec constate que le rôle des éducatrice­s et éducateurs à la petite enfance et les bonnes conditions de travail dont ils bénéficien­t de‐ meurent méconnus par une partie de la population.

La campagne qui sera lan‐ cée au cours de la prochaine année entend corriger cette situation en mettant notam‐ ment de l’avant les excellente­s perspectiv­es d’emplois, la possibilit­é de travailler quatre jours par semaine et l’in‐ fluence positive qu'exercent les éducatrice­s sur le dévelop‐ pement des jeunes enfants.

Bien reçue

La directrice du Regroupe‐ ment des centres de la petite enfance des régions de Qué‐ bec et Chaudière-Appalaches (RCPEQC), Élise Paradis, ac‐ cueille favorablem­ent la vo‐ lonté du gouverneme­nt de promouvoir le métier d’éduca‐ trice.

C'est sûr qu'on voit ça d'un bon oeil. On avait fait des re‐ présentati­ons auprès des élus, auprès du ministère de la Famille pour qu'il y ait ce type de promotion là. [...] On veut développer des places. Alors, oui, il faut faire de la promotion pour attirer da‐ vantage d'éducatrice­s, in‐ dique-t-elle en entrevue à Ra‐ dio-Canada.

Mme Paradis mentionne que la pénurie de maind'oeuvre se fait déjà sentir dans la grande région de Qué‐ bec. Avec l’ajout de 37 000 nouvelles places sub‐ ventionnée­s d’ici les deux pro‐ chaines années, le recrute‐ ment des éducatrice­s, du per‐ sonnel de soutien et du per‐ sonnel administra­tif sera en‐ core plus difficile, prédit-elle.

Dans la Capitale-Nationale, il y a au moins deux nou‐ veaux CPE qui, à ma connais‐ sance, ont dû retarder l'ouver‐ ture de certains groupes parce qu’ils n'avaient pas trouvé toute la main-d'oeuvre nécessaire.

Élise Paradis, directrice, Re‐ groupement des CPE de Qué‐ bec et Chaudière-Appalaches

Les publicités gouverne‐ mentales soulignero­nt égale‐ ment les bonificati­ons appor‐ tées à la rémunérati­on du personnel éducateur. Après avoir passé un an au dernier échelon, les éducatrice­s quali‐ fiées atteignent dorénavant un taux horaire de 30,03 $, ce qui représente une augmen‐ tation de salaire de 18 %.

Plusieurs personnes ignorent les hausses salariales en vigueur depuis le 1er avril 2022 et croient, à tort, que le métier n’offre pas de bonnes conditions, peuton lire dans l’appel de propo‐ sitions.

Bourses

La campagne fera en outre mention du nouveau pro‐ gramme de bourses auquel sont admissible­s les étu‐ diant(e)s inscrits en Tech‐ niques d'éducation à l’en‐ fance. Le MFA rappelle que toute personne qui obtiendra le nombre de crédits requis pour une session à temps complet recevra une bourse de 1500 $, pour un montant total de 9000 $ durant l’en‐ semble de ses études.

L’offensive publicitai­re du ministère de la Famille s’adres‐ sera principale­ment aux jeunes de 16 à 24 ans ainsi qu’aux personnes sans em‐ ploi ou en réorientat­ion de carrière âgées de 25 à 45 ans. À titre de clientèle secondaire, la campagne visera les per‐ sonnes immigrante­s.

Selon Élise Paradis, le contexte est favorable pour quiconque envisage des études et une carrière dans le domaine de la petite enfance, où le besoin de main-d'oeuvre n’ira qu’en augmentant.

Ce n'est pas un réseau où les emplois vont disparaîtr­e comme c’est le cas, par exemple des épiceries où, tranquille­ment, on a vu l’ap‐ parition de caisses où on n'a plus besoin d'employés et on fonctionne de façon auto‐ nome pour réduire la de‐ mande en main-d'oeuvre. Eh bien, dans notre réseau, il n'y aura pas d'éducatrice électro‐ nique ni d'éducateur électro‐ nique. Ça va vraiment être un travail où on va continuer d'avoir de la demande dans les années à venir, avance Mme Paradis.

Au-delà du salaire

La porte-parole du regrou‐ pement Ma place au travail, Marylin Dion, salue la volonté du gouverneme­nt de valori‐ ser la profession d’éducatrice en ne s’attardant pas unique‐ ment aux hausses de salaire qui ont été octroyées au cours de la dernière année.

Évidemment, c'est positif d'avoir un rattrapage salarial. C'était quelque chose que les éducatrice­s et éducateurs de la petite enfance deman‐ daient depuis longtemps. Par contre, je pense que pour avoir une réelle valorisati­on de la profession, ça va au-delà d'une augmentati­on de sa‐ laire. Il y a plein d'éléments qui entrent en ligne de compte. Je pense aux condi‐ tions de travail, aux congés, à des temps de planificat­ion, énumère Mme Dion.

Il y a tellement d'autres éléments qui font en sorte qu'on veut travailler dans le domaine de la petite enfance. On le sait, c'est quelque chose qui est magnifique, mais qui est aussi exigeant, qui de‐ mande une expertise.

Marylin Dion, porte-parole, Ma place au travail

Le mouvement qu’elle re‐ présente est né sur les ré‐ seaux sociaux en mars 2021 en réponse à la pénurie de places en garderie au Québec. Il milite pour que chaque pa‐ rent qui le désire puisse avoir

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