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La parole de Dieu, au rythme du hip-hop

- Frédéric Arnould

La musique chrétienne est un phénomène aux États Unis et les plus grands noms du genre sont de vé‐ ritables stars qui en‐ grangent des millions de dollars. Mais souvent, quand on l'évoque, on ne pense qu’à la country ou au rock contempora­in, alors qu’un autre style mu‐ sical devient de plus en plus populaire : le hip-hop chrétien.

En ce samedi matin, James Rosseau accueille son invité du jour, Prodi The Prodigal, dans son petit studio de ra‐ dio. L’animateur est un pion‐ nier du hip-hop de Philadel‐ phie et ses chansons sont loin de l’habituelle prose du rap de rue, puisqu’il propage la bonne parole de Dieu.

Doté d'une voix chaude et d'une stature imposante, le fondateur de Holy Culture Ra‐ dio explique que c’est une forme d’art qui permet de changer la trajectoir­e de nos jeunes.

Le sacerdoce qui l’anime est passé à la vitesse supé‐ rieure en avril dernier, lorsque Sirius XM, l’opérateur de radio numérique par satellite, a ajouté Holy Culture Radio à sa liste de stations. Cinq millions de personnes qui écoutent notre chaîne, pour moi, ce n'est pas un choc. Je suis très motivé par ce que Dieu fait pour nous. Je ne pourrais pas être plus époustoufl­é.

Son invité, Prodi, repré‐ sente un bon exemple de ré‐ demption par le rap chrétien. Cet ancien criminel revendeur de drogues a été condamné plusieurs fois et a passé quelques années derrière les barreaux.

J’entrais en prison et j'en sortais, c’était presque confor‐ table. Tout le monde me connaissai­t, c’était presque une réunion à chaque fois, ra‐ conte-t-il.

Et puis, un jour, le déclic s’est fait. Dieu a mis quelque chose dans mon coeur et je partage maintenant mon nouveau chemin à travers ma musique.

Aujourd’hui, il a à son actif plusieurs vidéos de ses com‐ positions, telles que Cyclone et poursuit son bout de che‐ min dans la production de rap chrétien.

Dans son émission ponc‐ tuée par des grands titres du rap chrétien, où Dieu apparaît à tout bout de champ dans des histoires messianiqu­es au son des percussion­s et du beat hip-hop, James Rosseau échange aussi avec divers in‐ vités sur la question du jour : Est-il vraiment encore néces‐ saire d’aller à l’église?

S’ensuit une enfilade de commentair­es où Dieu se trouve dans leurs coeurs et où la musique permet de diffuser un message de positivité pour ramener dans le droit chemin les brebis égarées.

La messe au son du hiphop

À quelque 35 minutes du studio de Holy Culture Radio, basé à Wilmington, au Dela‐ ware, le pasteur Mike a décidé de joindre les deux mondes en fondant dans la région de Philadelph­ie, en Pennsylvan­ie, une église où l’attrait des fi‐ dèles est stimulé par la mu‐ sique hip-hop.

Dans ce local, à côté d’un studio de danse et d’un com‐ merce où se donnent des cours de dressage pour chiens, quelques dizaines de fidèles ont répondu présents à l’appel de ce pasteur qui se fait appeler Mynista, un clin d’oeil à son pseudonyme d’an‐ cien rappeur hardcore (Synis‐ ta), dont la jeunesse a été émaillée de criminalit­é parfois violente. Fils d’un propriétai­re de discothèqu­e et d’une mère accro au crack, cet ancien ven‐ deur de drogues a fait de la prison pour trois cambrio‐ lages à main armée.

C'était mon style de vie, ra‐ conte-t-il. Mais aujourd'hui, je loue et je vénère Jésus. Je l’aime.

Depuis 22 ans maintenant, il n’est pas peu fier d’avoir réussi à se tenir loin de ce pas‐ sé peu reluisant et il professe l’amour de Dieu tout en of‐ frant ses prestation­s de rap devant ses fidèles qui dansent et se trémoussen­t au son d’un de ses titres phares, Dance with with devil like this, ah ah!

La petite foule mixte afroaméric­aine, latino et blanche est animée, elle semble appré‐ cier cette bonne parole en‐ jouée et rythmée.

Je pense que c'est at‐ trayant pour la jeune généra‐ tion et je l'ai également constaté, en tant que prê‐ cheur, auprès d'une foule plus âgée, en raison du contenu et de l'esprit. Ils disent : avant je n'aimais pas le rap, mais j'aime le vôtre.

Pasteur Mike, alias Mynis‐ ta

Ce parcours de rédemp‐ tion et de souffrance­s passées semble être une constante aussi pour Lady Ay, une femme qui a subi des agres‐ sions et des abus dans sa jeu‐ nesse et qui a décidé de pro‐ pager elle aussi le message de Dieu.

Avec un petit côté blingbling et un rythme envelop‐ pant, elle rappe dans ses vi‐ déos comme s’il n’y avait pas de lendemain. J'ai commencé à écrire de la poésie parce que c'était une façon pour moi d'exprimer mes sentiments. Un jour, j'ai vu cette fille dans l'église qui rappait. Et je me suis dit : attends, je pourrais faire ça à l'église?

Tout en prêchant elle aussi dans une église, elle s’est donc lancée corps et âme dans

l’aventure musicale, accompa‐ gnant même B.E.R.I.D.O.X, un pionnier du hip-hop chrétien, qui salue la popularité gran‐ dissante de cette musique qui s’est beaucoup démocratis­ée.

Grâce à Internet et aux studios numériques, nous avons tous accès à la création, explique le producteur dans un studio d’enregistre­ment de Philadelph­ie. Avec un ordina‐ teur portable, une petite caisse de résonance, un mi‐ crophone, vous pouvez créer.

La question étant : êtes-vous prêt à aller jusqu'au bout et à vous y engager? Parce que ça ne va pas être une chose fa‐ cile. Vous allez vraiment de‐ voir travailler dur pour ça.

Lady Ay, en tout cas, es‐ père avoir trouvé sa bonne voie. Tu sais, toute ma mu‐ sique, c'est pour représente­r le Christ et je ne ferai aucun compromis là-dessus. Mais oui, j'aimerais en vivre.

Rapper à l'aide du Saint Esprit

La musique chrétienne contempora­ine est une indus‐ trie de centaines de millions de dollars aux États-Unis. Mais pour l’instant, c’est sur‐ tout le rock et la pop chré‐ tienne qui prennent toute la place.

La reine du genre est sans conteste Amy Grant, dont la carrière vient d’être saluée par le milieu lors d’une cérémonie au Kennedy Centre de Wa‐ shington qui rassemblai­t les grandes pointures de la mu‐ sique de tout acabit, comme U2.

C’était la première fois qu’une vedette de la musique chrétienne était intronisée pour son apport à l’industrie musicale généralist­e. Même Joe Biden l’a accueillie à la Mai‐ son-Blanche et l’a présentée comme une grande voix qui est un don de Dieu qu’elle partage avec tout le monde.

Encore loin de ces hom‐ mages musicaux, James Ros‐ seau espère que cette recon‐ naissance de la reine de la musique chrétienne va rejaillir sur le style hip-hop.

Je pense qu'il est difficile de ne pas reconnaîtr­e que notre pays pourrait utiliser plus de positivité, plus de forces galvanisan­tes, comme de la colle pour nous rassem‐ bler. Je pense que notre mu‐ sique peut être ce ciment.

Des ondes positives qui sonnent comme la voie du sa‐ lut pour Prodi. Quoi qu'il ar‐ rive, je vais continuer, tu vois ce que je veux dire? Et je sais que la seule façon de le faire est de le faire grâce aux conseils et à l'aide du Saint-Es‐ prit.

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