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Pérou : « Trop d’injustice et de mépris des élites de Lima. C’est trop! »

- Jean-Michel Leprince

La carcasse de l’édifice pa‐ trimonial incendié dans le centre-ville historique de Lima jeudi soir fumait en‐ core le lendemain matin et le brasier risquait de se propager. L'incendie n’avait rien à voir avec les manifestat­ions, mais il a permis à la police d’expul‐ ser les protestata­ires du centre-ville.

Les quelque 7000 manifes‐ tants venus du sud sont re‐ tournés loger chez des sym‐ pathisants. Certains sont à Vil‐ la El Salvador, une banlieue pauvre de Lima, un ancien bi‐ donville d’un demi-million d’habitants issus des mêmes régions défavorisé­es.

Leurs grands-parents ou leurs parents sont surtout des Quechuas qui ont fui la pauvreté à la recherche d’une vie meilleure à Lima ou dans la périphérie de la capitale.

C’est le cas d’Adrian Rimas‐ ca, un jeune élu local, qui s’est joint à eux et a participé à la prise de Lima la veille.

Nous les comprenons par‐ faitement, nous savons que les différence­s avec Lima sont immenses et que leur qualité de vie est terrible.

Adrian Rimasca, secrétaire général quartier No 2, Villa El Salvador

Des manifestan­ts, qui sont des paysans de Cuzco, ont été hébergés par un foyer d’aide sociale de Villa El Salvador.

Ils ont quitté leur travail et leurs familles pour venir, à leurs frais, réclamer dans la capitale la démission de la présidente par intérim, Dina Boluarte, et une nouvelle constituti­on. Ils ne sont visi‐ blement pas financés par des intérêts occultes ou des orga‐ nisations terroriste­s, comme certains le sous-entendent.

Ils sont inquiets. Ils croient qu’ils ont été dénoncés et s’apprêtent à se réfugier ailleurs de peur d’être jugés et condamnés en vertu de l’état d’urgence.

À Cuzco, d’où ils viennent, les manifestat­ions et les af‐ frontement­s continuent. Aux lancers de pierres et de bou‐ teilles, la police riposte avec des gaz lacrymogèn­es.

Il y a des blessés, mais pas de morts comme à Puno. C’est là que se trouvent les deux dernières victimes. On en compte 45 depuis le début du conflit en décembre.

Adrian dit qu’ils n’avaient pas le choix. Trop d’injustice et de mépris des élites de Li‐ ma. C’est trop!

Alors tout a éclaté, nous sommes fatigués de tout ça au point de nous lancer dans la rue et d’aller à la capitale.

Deuxième nuit de mani‐ festations

Les affronteme­nts qui ont marqué la première nuit de protestati­ons à Lima se sont poursuivis, mais en groupes plus petits et mobiles.

Alors que le Congrès et le palais présidenti­el étaient les cibles claires des manifestan­ts la veille, les objectifs pour la deuxième journée étaient flous.

Certains paraissaie­nt se di‐ riger vers le quartier riche de Miraflores, symbole de la ri‐ chesse politique et écono‐ mique des élites de la capitale, mais ils n'y sont pas parve‐ nus.

Il ne semble pas y avoir de dirigeant du côté des protes‐ tataires, ce qui rend le dia‐ logue avec le gouverneme­nt plus complexe et laisse planer une incertitud­e sur la durée de ces manifestat­ions.

Les manifestan­ts qui s'étaient réfugiés dans l'Uni‐ versité San Marcos pour y passer la nuit ont été expul‐ sés par les forces de l'ordre.

D'autres villes du Pérou sont aussi le théâtre de mou‐ vements de protestati­on.

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