L’Allemagne s’achemine vers un accord de livraison des chars Leopard en Ukraine
Sous pression depuis des jours, l'Allemagne a en‐ trouvert mardi la voie à une autorisation pour les pays alliés de livrer des chars lourds Leopard récla‐ més avec insistance par l'Ukraine, et a promis de répondre « avec l'urgence requise » à une requête en ce sens de la Pologne.
Mardi soir, deux médias al‐ lemands, le Spiegel et la chaîne d'information NTV, ont même assuré que le chance‐ lier Olaf Scholz allait donner son feu vert, probablement mercredi.
L'Allemagne envoie des chars Leopard à l'Ukraine, a twitté le Parti libéral-démo‐ crate (FDP), membre de la coalition gouvernementale.
Le dirigeant allemand, qui doit s'exprimer mercredi de‐ vant la Chambre basse du Parlement allemand, donne‐ rait aussi son accord aux pays, dont la Pologne, qui souhaitent livrer des chars Leopard 2 à Kiev, selon ces médias.
Les discussions doivent se finir par des décisions, a ex‐ horté mardi soir le président ukrainien Volodymyr Zelens‐ ky. Les alliés ont le nombre re‐ quis de tanks nécessaires à l'armée ukrainienne pour ren‐ verser les troupes de Moscou, a-t-il déclaré dans son allocu‐ tion quotidienne, martelant que les besoins sont plus im‐ portants que 5,10 ou 15 chars.
M. Zelensky a aussi défen‐ du des décisions nécessaires pour avoir un État fort après qu'une série de hauts respon‐ sables ont été démis de leurs fonctions dans la foulée d'une affaire de corruption concer‐ nant des approvisionnements de l'armée.
Quatre vice-ministres, dont celui de la Défense Viat‐ cheslav Chapovalov, ainsi que cinq gouverneurs et d'autres responsables ont dû quitter leur poste dans la foulée de cette affaire.
Une pression croissante
À Berlin, le ministre alle‐ mand de la Défense Boris Pis‐ torius a déclaré avoir expres‐ sément encouragé les pays partenaires qui ont des chars Leopard prêts à être déployés à entraîner les forces ukrai‐ niennes sur ces chars, au cours d'une conférence de presse à Berlin avec Jens Stol‐ tenberg, le secrétaire général de l'OTAN.
Ces déclarations consti‐ tuent une avancée dans la po‐ sition de l'Allemagne, où le gouvernement d'Olaf Scholz subit une pression croissante en vue de donner son feu vert aux pays partenaires qui le souhaitent pour qu'ils puissent livrer à l'Ukraine des chars d'assaut Leopard, de fa‐ brication allemande.
Jusqu'ici, la Finlande et la Pologne se sont dites prêtes à le faire. Varsovie, qui veut créer une coalition de pays soutenant l'Ukraine avec des chars Leopard 2, a officielle‐ ment envoyé une requête en ce sens, dont la réception a été confirmée mardi par Ber‐ lin.
Le premier ministre polo‐ nais Mateusz Morawiecki a dit espérer une réponse rapide, parce que les Allemands tardent, tergiversent, agissent d'une manière difficile à com‐ prendre.
Message clair
Le chef de l'OTAN, Jens Stoltenberg, a quant à lui sa‐ lué le message clair du nou‐ veau ministre allemand de la Défense, en poste depuis moins d'une semaine.
De telles livraisons n'ap‐ porteront rien de bon aux re‐ lations russo-allemandes, a en revanche réagi le porte-parole du Kremlin, Dmitri Peskov.
Selon les observateurs, ces chars sont susceptibles d'avoir un impact significatif pour les Ukrainiens face au rouleau compresseur des troupes russes, qui re‐ prennent un peu de terrain sur le front de l'est de l'Ukraine.
Lundi, la Pologne avait prévenu qu'elle était prête à se passer de l'autorisation de Berlin. Ce pays, qui se dit dis‐ posé à envoyer 14 Leopard 2 à Kiev, discute avec une quin‐ zaine d'États à ce sujet, car de nombreuses armées euro‐ péennes possèdent de tels blindés.
La crainte d'une escalade militaire avec Moscou et ses réticences à faire assumer à l'Allemagne un leadership dans le camp occidental ex‐ pliquent les hésitations du chancelier, selon des ana‐ lystes.
Pour l'Ukraine, le soutien militaire et financier des alliés occidentaux est crucial. Elle dit avoir besoin de centaines de chars modernes et d'autres armements pour me‐ ner une nouvelle offensive.
Aujourd'hui, cela fait exac‐ tement onze mois depuis le début de la guerre à grande échelle. Le 335e jour. Un jour que nous passerons comme le 334e, unissant nos forces pour la victoire, a déclaré le président ukrainien Volody‐ myr Zelensky.
Corruption
Ce jour est aussi marqué par le retour en force d'un mal endémique dans ce pays : la corruption.
Outre le vice-ministre de la Défense, celui de la Politique sociale et deux autres du Dé‐ veloppement territorial ont été démis de leurs fonctions après un scandale de corrup‐ tion présumé concernant des approvisionnements de l'ar‐ mée, le premier de cette am‐ pleur depuis le 24 février 2022.
D'autres limogeages avaient déjà récemment eu lieu en Ukraine, qui était clas‐ sée à la 122e place sur 180 sur l'indice de perception de la corruption de l'ONG Transpa‐ rency International en 2021.
Dimanche, le ministre ad‐ joint des Infrastructures Vas‐ syl Lozinsky avait été arrêté pour avoir reçu un pot-de-vin de 400 000 $ afin de faciliter l'achat de générateurs à des prix gonflés, au moment où son pays affronte de vastes coupures d'électricité à la suite des frappes russes sur les installations énergétiques.
M. Zelensky a par ailleurs demandé à son homologue français Emmanuel Macron de refuser aux athlètes russes l'autorisation à participer aux Jeux olympiques de Paris en 2024.
J'ai particulièrement insisté sur le fait que les athlètes russes ne doivent pas avoir leur place aux JO de Paris, a déclaré sur Telegram M. Ze‐ lensky à l'issue d'un entretien téléphonique avec le chef de l'État français.
En Russie, les autorités ont enfin donné, pour la première fois depuis le début des hosti‐ lités il y a 11 mois, le bilan des victimes civiles russes dans une région frontalière avec l'Ukraine. Selon Moscou, 25 personnes auraient été tuées et près de 100 autres blessées par des tirs ukrai‐ niens dans la région de Belgo‐ rod.