Radio-Canada Info

La drôle de chasse aux documents classifiés de deux présidents

- Frédéric Arnould

Voir des agents du FBI dé‐ barquer et fouiller la rési‐ dence privée d'un pré‐ sident en exercice fait plu‐ tôt désordre. La MaisonBlan­che a beau essayer de minimiser cette perquisi‐ tion, il n’en demeure pas moins que cela pose bien des questions.

Cependant, il faut compa‐ rer ce qui est comparable. Et sur ce point-là, les nom‐ breuses tentatives des répu‐ blicains de dépeindre un pré‐ sident pire que son prédéces‐ seur sur le plan de la gestion des documents classifiés mé‐ ritent une remise en perspec‐ tive.

Les milliers de docu‐ ments de Trump

D’abord, les autorités ont trouvé à Mar-a-Lago, le domi‐ cile floridien de Donald Trump, plus de 11 000 docu‐ ments, dont environ 300 qui portaient la mention classifié ou top secret, dans près de 50 boîtes qui contenaien­t éga‐ lement des photograph­ies. Le tout était conservé dans un sous-sol fermé à clé et dans un bureau personnel.

Ce sont les Archives natio‐ nales qui se sont rendu compte que des documents manquaient. Elles ont donc demandé à Trump de les rendre, ce qu’il a refusé de faire dans un premier temps, forçant le FBI à fouiller sa de‐ meure de Mar-a-Lago pour les trouver. Non seulement cela, mais de plus, Trump a intenté une action en justice pour ob‐ tenir une révision indépen‐ dante, histoire de ralentir le processus, mais elle a finale‐ ment été rejetée.

Aujourd’hui, le départe‐ ment de la Justice examine ces documents dans le cadre d'une enquête criminelle sur la façon dont Trump les a trai‐ tés. En fait, l’ex-président pourrait être accusé d'obs‐ truction pour avoir délibéré‐ ment retardé le retour des documents.

Le conseiller spécial John L. Smith, nommé par le procu‐ reur général des États-Unis, examinera aussi la possibilit­é d'une mauvaise manipulati­on intentionn­elle de secrets gou‐ vernementa­ux puisque cer‐ tains documents concerne‐ raient les capacités nucléaires et militaires d'une puissance étrangère non identifiée.

Donald Trump, qui semble avoir intentionn­ellement pris ces nombreux documents classifiés, s’est vanté d'avoir gardé les dossiers portant la mention classifié ou confiden‐ tiel comme souvenirs "cool", ajoutant que ce n'est pas à eux, c'est à moi.

Moins de deux dou‐ zaines chez Biden

Dans le cas de Joe Biden, une vingtaine de documents, selon les sources au dossier, ont été découverts dans un placard fermé à clé dans un bureau du Penn Biden Center à Washington ainsi qu’au do‐ micile du leader démocrate dans le Delaware.

C’est en nettoyant le bu‐ reau de Washington que l'équipe du président démo‐ crate a trouvé des docu‐ ments, ce qui l'a incitée à fouiller son domicile. Elle et le président en ont alors – de leur plein gré – informé les Ar‐ chives nationales ainsi que le départemen­t de la Justice.

Un fonctionna­ire du dé‐ partement de la Justice s'est ensuite rendu au domicile de Joe Biden et a immédiatem­ent pris possession des docu‐ ments trouvés sur place.

L’ensemble des docu‐ ments est actuelleme­nt exa‐ miné par Robert Hur, un an‐ cien procureur américain nommé par Trump qui fait ici office de conseiller spécial, ainsi que par le comité judi‐ ciaire de la Chambre des re‐ présentant­s, dirigée par les ré‐ publicains.

Ceci dit, pour l’instant, rien ne prouve qu’il y ait eu une in‐ tention délibérée de les dissi‐ muler et rien ne prouve non plus que Biden savait que les documents étaient là.

Au Parti démocrate, on a beau tenter de passer à autre chose, la gestion de cette controvers­e par la MaisonBlan­che, qui fait les choux gras de la presse de droite chez Fox News, a assombri le règne de Joe Biden, qui jouis‐ sait depuis quelques mois d'une période de succès poli‐ tiques, notamment depuis l’adoption de projets de loi majeurs et les résultats des élections de mi-mandat.

Pas surprenant qu’un nou‐ veau sondage Reuters/Ipsos révèle que le taux d'approba‐ tion de Biden, qui avait aug‐ menté à la fin de l'année 2022, soit retombé à seulement 40 %, soit le niveau le plus bas de sa présidence.

Deux poids lourds, deux mesures?

Trop contents d’avoir une poignée négative contre la Maison-Blanche, les républi‐ cains les plus véhéments comme le sénateur de la Flo‐ ride Rick Scott ont envoyé cette salve sur Twitter : Pen‐ sez-y : des documents classi‐ fiés ont traîné chez Joe Biden pendant des années sans ex‐ plication ni responsabi­lité quant à la raison.

Son collègue du Missouri Josh Hawley y est allé d’une ci‐ tation de son cru : Cela res‐ semble à un modèle de mé‐ pris en série envers la loi. Le peuple américain a le droit de savoir ce que contenaien­t tous ces documents que Bi‐ den gardait illégaleme­nt. Et qui d'autre y avait accès.

Enfin, le représenta­nt ré‐ publicain de l'Ohio Jim Jordan clôture la série : Combien de documents classifiés vont-ils trouver chez Joe Biden cette semaine?

Donald Trump, quant à lui, a établi un lien entre cette af‐ faire de documents et… le chef de la minorité républi‐ caine au Sénat. Sur son ré‐ seau Social Truth, il a dit esti‐ mer que Mitch McConnell et sa femme sont impliqués dans le scandale des docu‐ ments classifiés du président Biden, qui ont été trouvés non loin du Chinatown de Washington.

Elaine Chao, l'épouse de McConnell, qui a également été la secrétaire aux Trans‐ ports de Trump, s’est ainsi re‐ trouvée au centre d’une tirade disons raciste de l’ex-pré‐ sident sur Truth. Coco Chow a-t-elle quelque chose à voir avec le fait que les documents confidenti­els de Joe Biden ont été envoyés et stockés dans le quartier chinois?

Bref, chez les républicai­ns, on ne fait pas dans la dentelle et on oublie les multiples ten‐ tatives de Trump pour se soustraire aux demandes des Archives nationales.

Rien de glorieux pour 2024

S’il est vrai que cela sou‐ lève des questions délicates pour l'actuel président en ma‐ tière de transparen­ce – Joe Bi‐ den parle d'un oubli –, celui-ci semble avoir choisi sa ligne de défense. J’ai été négligent et lent à rechercher et à révéler l'existence d'une vingtaine de documents classifiés égarés, mais je coopère pleinement avec les autorités.

Le fait qu’il ait déclaré l’an passé que le traitement des documents par Donald Trump était totalement irres‐ ponsable lui rebondit évidem‐ ment en plein visage et neu‐ tralise en substance une des lignes d’attaque les plus puis‐ santes qu’il avait contre Do‐ nald Trump, dont la cam‐ pagne d’investitur­e pour 2024 ne suscite pas les passions en attendant que d’autres candi‐ dats se déclarent contre lui.

Tout cela ne convaincra pas davantage d’électeurs qui, selon un sondage mené en décembre dernier, mon‐ traient déjà peu d'appétit pour une revanche sur 2020 à la prochaine élection prési‐ dentielle. En effet, la majorité des électeurs inscrits au sein de chaque parti préfèrent voir de nouveaux candidats en 2024.

Soixante-deux pour cent

des républicai­ns et des indé‐ pendants d'allégeance répu‐ blicaine ont déclaré vouloir que leur parti désigne une personne autre que Donald Trump en 2024, tandis que 59 % des démocrates et des indépendan­ts d'obédience démocrate déclarent qu'ils ai‐ meraient voir une personne autre que Joe Biden comme candidat.

Bref, délibérées ou pas, les malversati­ons de l’un et de l’autre ont terni davantage leur image. Mais que feront les électeurs? Il leur reste 651 jours avant de se pronon‐ cer, autant dire une éternité en politique, où tout peut ar‐ river.

fiantes qu’elles peuvent être considérée­s comme de la tor‐ ture.

Letta Tayler, directrice ad‐ jointe de Human Rights

Watch pour les crises et les conflits

Selon Mme Tayler, le Cana‐ da a le devoir de juger ces res‐ sortissant­s individuel­lement pour déterminer s’ils sont des victimes ou des bourreaux.

Il n’est pas clair si les 23 ressortiss­ants canadiens dont le rapatrieme­nt a été or‐ donné par la Cour fédérale fe‐ ront face à d'éventuelle­s poursuites à leur retour sur le territoire canadien. Il y a trois mois, deux Canadienne­s déte‐ nues en Syrie ont été rapa‐ triées avec leurs enfants et l'une d'elles a été arrêtée avant d'obtenir une mise en liberté sous caution. En 2020, Ottawa avait permis le retour d'une fillette orpheline de cinq ans après que son oncle eut intenté une action en jus‐ tice contre le gouverneme­nt canadien.

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