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Un ultime adieu au « plus doux renard » Karim Ouellet

- Kathleen Lavoie

Un peu plus d’un an après son départ prématuré, Ka‐ rim Ouellet sera célébré à l’occasion d’un grand spec‐ tacle intitulé Bye Bye Ka‐ rim, au Grand Théâtre de Québec, le 1er avril. Il s’agit d’une reprise de l’hom‐ mage que ses collabora‐ teurs et amis lui avaient rendu aux Francos de Montréal, en juin.

Ce projet de spectacle est né lors d’une réunion intime entre amis, en janvier 2022. Le partenaire musical de Karim Ouellet, Claude Bégin, sa soeur, la rappeuse Sarahmée, son complice, le batteur Oli‐ vier Beaulieu, et les copains de Valaire ont voulu faire re‐ vivre une dernière fois en mu‐ sique le plus doux renard.

L’hommage qui en est né et qui a été présenté aux Francos de Montréal a permis de mettre en lumière les grandes qualités de mélodiste de l’artiste disparu trop tôt à l’âge 37 ans. Bien reçu par la critique, il soulevait en outre la question d'un hommage si‐ milaire à Québec, sa ville d'ori‐ gine.

C’est un spectacle rempli d’amour et de bienveilla­nce. Québec était sa ville et c’est pour cela que nous voulons offrir cet hommage à ses fans et aux citoyens, a laissé savoir Olivier Beaulieu.

Parmi les artistes qui mon‐ teront sur scène au Grand Théâtre, on retrouvera no‐ tamment Fanny Bloom, Clau‐ dia Bouvette, Claude Bégin, Valaire, Pascale Picard, Hubert Lenoir, Alaclair Ensemble, Ga‐ brielle Shonk, Sarahmée et La Bronze. Ils seront appuyés d’une dizaine de musiciens et de choristes sous la direction musicale d’Olivier Beaulieu. Seule absence notable, Ariane Moffatt ne sera pas de l’ali‐ gnement présent à Québec.

Le spectacle Bye Bye Ka‐ rim est présenté entre autres par la Ville de Québec, qui of‐ frira des billets à différents or‐ ganismes communauta­ires. Les billets pour ce spectacle seront disponible­s à partir du 27 janvier, 10h, à la billetteri­e du Grand Théâtre.

Impression­nante feuille de route

Karim Ouellet est mort en novembre 2021, mais son dé‐ cès n’a été constaté que deux mois plus tard, en janvier 2022. Il a laissé en héritage une discograph­ie succincte, mais riche, avec les Plume (2011), Fox (2012), dont était tiré son grand succès L’Amour, et Trente (2016). Il a égale‐ ment signé deux minialbums, Leçon d’amour étrange (2009) et Aikido (2016).

En 2012-13, l’auteur-com‐ positeur-interprète avait été nommé Révélation Radio-Ca‐ nada. Dans les années qui al‐ laient suivre, il allait rempor‐ ter huit Félix, dont ceux de l’interprète masculin de l’an‐ née (2013) et de l’artiste qué‐ bécois s’étant le plus illustré hors Québec (2014). En 2014 et 2017, il a également rem‐ porté le Juno de l’album fran‐ cophone de l’année au pays.

En complément :

Chronique de Philippe Rez‐ zonico | Francos 2022 : les grandes retrouvail­les… sans contrainte­s Un collectif d’ar‐ tistes chantent L’amour, de Karim Ouellet Décès de l’ar‐ tiste Karim Ouellet

pointe. Ils ont individuel­le‐ ment la responsabi­lité d’un premier carré de l'oeuvre col‐ lective, qu’ils offriront en juin à un survivant des pension‐ nats autochtone­s de leur communauté.

Les élèves ont choisi de rendre hommage à un homme qu’ils côtoient tous les jours : leur chauffeur d’au‐ tobus, Tony Quedent.

Tony, je le connais depuis que je suis bébé, raconte Au‐ drey Decontie-Carpentier. Il est toujours là pour nous autres.

Le design de l’adolescent­e de 16 ans évoque le parcours de ce survivant : une rivière orange traversant un carré brun, symbolisan­t ce qu’il a réussi à surmonter.

Il n’était pas capable de parler sa langue, [ni] de porter ses cheveux longs. [...] La ri‐ vière orange, ça signifie toutes les personnes qui ont été dans les écoles, qui cassent ça et reprennent notre langue, la culture, ex‐ plique Audrey. C’est quand même simple, mais j’aime ça.

Un peu plus loin, les yeux plissés de concentrat­ion, Kai‐ ley-Jo Whiteduck-Wallingfor­d s’applique à donner les der‐ niers coups de ciseaux pour ciseler la plume d’aigle qu’elle surpiquera ensuite au centre de son carré de courtepoin­te.

On pense tous à Tony en créant notre morceau, sou‐ ligne-t-elle. Ça me rend heu‐ reuse de penser que c’est à mon tour maintenant de faire quelque chose pour lui. J’es‐ saie que tout soit parfait.

Daniel Beaudoin, lui, ne cache pas que coudre s’avère plutôt une manière de moins jouer aux jeux vidéo. Cela ne l’a pas empêché de mûrement réfléchir à l’hommage qu’il souhaite rendre à Tony.

Ce n’est pas seulement de reconnaîtr­e [ce qu’il a vécu], mais de lui faire comprendre que je tiens à lui, mentionne Daniel, dont le design inclut sept plumes nouées à une roue de médecine tradition‐ nelle, en référence aux sept valeurs enseignées par les an‐ cêtres et rattachées au Créa‐ teur.

À mes yeux, Tony incarne les sept enseigneme­nts sacrés (Seven Grandfathe­r Tea‐ chings) : honnêteté, vérité, respect, courage, humilité, sa‐ gesse et… amour, énumère-til avec l’aide discrète de sa professeur­e, qui lui souffle le dernier mot.

Kelly Diabo en a les larmes aux yeux. J’ai parfois l’impres‐ sion qu’ils ne m’écoutent pas, en classe, mais à les entendre aujourd’hui parler de leur création, je réalise qu’ils écoutent plus que je ne le

pense, confie-t-elle, émue.

Un labo accessible à toute la communauté

Un des critères permettant par ailleurs à Josée Lusignan et son équipe d’évaluer la fai‐ sabilité du projet dans une école s’avère particuliè­rement important : la capacité de rendre accessible­s les ma‐ chines à coudre et le matériel à l’ensemble de la commu‐ nauté, afin de favoriser les partages de connaissan­ces entre les génération­s.

C’est vraiment important qu’on puisse faciliter ça, à tous les niveaux dans la com‐ munauté, pas seulement dans le cours de couture comme tel. [...] Dans les écoles où on a des labos, les aînés viennent régulièrem­ent aussi partager leur savoir, fait valoir Mme Lusignan.

À Kitigan Zibi, un groupe de femmes, dont fait partie Kelly Diabo, se réunit tous les jeudis soirs depuis le début de l’année. Elles se sont donné comme mandat de confec‐ tionner des jupes à rubans pour les filles, adolescent­es et autres femmes de la commu‐ nauté n’ayant ni les moyens ni le savoir-faire pour les coudre elles-mêmes.

Nous voulons que ces filles et femmes puissent por‐ ter ces jupes lors de cérémo‐ nies et de rassemblem­ents. Nous souhaitons en coudre le plus grand nombre possible d’ici au 24 février prochain, à temps pour la danse de cercle (round dance) de notre com‐ munauté, soutient Mme Dia‐ bo.

Elle espère surtout piquer l’intérêt de plus de femmes pour leur culture et, qui sait, leur donner envie de venir coudre leur propre jupe avec nous.

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